La fin de l’art et ses célibataires

Arthur Danto, Après la fin de l’art,
Jean-Marie Schaeffer, Les célibataires de l’art, pour une esthétique sans mythes

Danto et Schaeffer après la philosophie

Par Alain Cueff · Le Journal des Arts

Le 1 mai 1996 - 347 mots

Comment la philosophie peut-elle penser l’art et l’œuvre d’art aujourd’hui ? Deux essais – ceux d’Arthur Danto et de Jean-Marie Schaeffer – tentent, avec des objectifs et des styles différents, d’apporter des éléments de réflexion.

Depuis les thèses de Hegel, l’art donne un fil de plus en plus épais à retordre aux philosophes. Les évolutions contradictoires de l’art moderne depuis près de cent ans compliquent singulièrement la réflexion, surtout si, comme Danto, professeur de philosophie à l’université de Columbia et critique d’art à The Nation, on se prend à croire, avec autant d’arrogance que de naïveté et sans en jamais douter, à la fin de l’art. Son recueil d’essais est placé sous ce signe et discute, sur un mode hybride, de questions actuelles. L’hypothèse de l’œil innocent, l’art noble et trivial, la théorie institutionnelle, la portée subversive ou, au contraire, les ombres aliénantes de l’art sont les thèmes favoris de Danto, auxquels la Transfiguration du banal avait déjà accoutumé le lecteur.

Il ne lui faudra que plus de patience pour terminer ce volume, où sont tenus pour acquis nombre d’a priori qui, implicitement, forment un système. L’auteur ne livre plus d’analyses à partir de constats : il affirme des vérités souvent contestables, rarement fructueuses, sur un ton léger et plaisant, assure la quatrième de couverture. Mais, de son propre aveu, "ce sont là des difficultés qui relèvent de la simple taquinerie".

Chercheur au CNRS, Jean-Marie Schaeffer est, d’un point de vue stylistique, aux antipodes de son aîné américain. L’érudition le dispute à la précision, avec un sérieux qui dissuadera plus d’un chrétien. En cette fin de millénaire, il s’agit pour lui de débarrasser l’esthétique de ses scories mythiques et de retrouver un rapport aussi riche que possible aux œuvres. Question de plaisir, en définitive, sauf qu’il faut au préalable rééxaminer la notion d’œuvre dans la civilisation contemporaine et s’assurer de la viabilité des "matrices de prototypes".

Arthur Danto, Après la fin de l’art, Éditions du Seuil, 352 p., 170 F.

Jean-Marie Schaeffer, Les célibataires de l’art, pour une esthétique sans mythes, Éditions Gallimard, 400 p., 170 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°25 du 1 mai 1996, avec le titre suivant : Arthur Danto, <em>Après la fin de l’art</em>, <br />Jean-Marie Schaeffer, <em>Les célibataires de l’art, pour une esthétique sans mythes</em>

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