Quel avenir pour les expositions ?

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 9 décembre 2009 - 860 mots

Les expositions dans les musées font-elles partie des victimes de la crise économique qui a traversé l’année 2009 ?

Soutenue par un système de subventions publiques, la programmation dans les musées français a, certes, bien résisté. Rien n’indique cependant la situation à long terme, tant les ressources privées se font de plus en plus désirer. Les exemples de déprogrammation se sont en effet multipliés aux États-Unis (dont le système maintenu à flot par la philanthropie est en prise directe avec la réalité économique). L’annulation de plusieurs événements au Musée des arts décoratifs de Paris ne fait que démontrer la fragilité des structures dépendant de fonds privés. L’année 2010 promet pourtant son lot de temps forts, parmi lesquels la première rétrospective française de l’œuvre de Claude Monet depuis trente ans, aux Galeries nationales du Grand Palais à Paris. Mais aussi « Crime et châtiment, de Goya à Picasso » au Musée d’Orsay, la nouvelle réflexion thématique de Jean Clair sur une idée de Robert Badinter, qui tentera de réitérer le succès obtenu par « Mélancolie » en 2005.

Identités plurielles à la Villa Médicis
Éric de Chassey, directeur de la Villa Médicis à Rome
« L’exposition « Rome, la peinture d’un empire » organisée aux Scuderie del Quirinale, à Rome, a indéniablement marqué cette année 2009 par l’importance des prêts et la manière dont la muséographie, sans être envahissante, permet une parfaite compréhension du sujet. Attendue depuis longtemps, la rétrospective Soulages [au Centre Pompidou] constitue un moment essentiel dans la reconnaissance de son œuvre, particulièrement à l’international.
Pour 2010, la Villa Médicis présentera son projet intitulé « Les mutants », suite de propositions monographiques autour de la question essentielle d’hybridation – évoquant aussi bien les identités plurielles que de nouvelles formes d’art –, avec Adel Abdessemed, Djamel Tatah, Adrian Paci, Stephen Dean et Ellen Gallagher. Pendant l’été, nous devrions confronter des travaux récents d’Ellsworth Kelly à des dessins d’Ingres, artiste qu’il admirait. L’idée serait de mettre en exergue les rapports évidents de leurs œuvres quant au traitement des lignes, bordures et découpages, mais aussi la tension sous-jacente entre les notions de fragments et d’unité. Par ailleurs, j’attends beaucoup de l’exposition prévue cet été sur Richard Deacon au Musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg, et de la rétrospective Gabriel Orozco au MoMA [New York], au Centre Pompidou et à la Tate Modern [Londres]. »
 
Le plaisir pur de la peinture classique
Laurence des Cars, directrice scientifique à l’agence France-Muséums
« Le choix des expositions en 2009 était si grand qu’il est difficile d’en tirer une tendance générale. Parmi celles qui m’ont le plus marquée, je citerai « Miró. Painting and Anti-Painting 1927-1937 » au Museum of Modern Art de New York qui était une merveille, au même titre que, dans un autre registre, « Giorgio de Chirico » au Musée d’art moderne de la Ville de Paris. Ce qu’a fait Anish Kapoor à la Royal Academy of Arts de Londres témoigne d’une formidable occupation de l’espace et, au Louvre, « Rivalités à Venise » procure le plaisir pur de la peinture classique, ce qui est devenu chose rare et donc importante à souligner. Je souhaiterais aussi mentionner l’inauguration de la nouvelle aile de l’Art Institute de Chicago, qui est une vraie réussite. L’édifice de Renzo Piano allie sobriété et élégance, en plus d’une très belle mise en valeur des collections. Autre moment fort : les premières acquisitions pour le Louvre à Abou Dhabi [Émirats arabes unis], une vraie concrétisation du projet. En 2010, j’attends avec impatience l’ouverture du Centre Pompidou à Metz et de son exposition inaugurale consacrée à la notion du chef-d’œuvre. J’ai eu la chance de visiter le chantier cet été et j’ai été très impressionnée. Le concept du projet – une institution parisienne qui se réinvente – est, comme tout ce que fait Laurent Le Bon [lire page précédente], extrêmement brillant et intelligent. Et, de mon côté, je travaille sur l’exposition « Jean-Léon Gérôme » qui sera d’abord présentée au Getty Museum à Los Angeles pendant l’été, puis à la rentrée au Musée d’Orsay à Paris. »
 
Une offre orientée vers les valeurs sûres
Patrizia Nitti, directrice artistique du Musée Maillol à Paris
« En 2009, l’événement de l’année a été l’ouverture du Musée Magritte à Bruxelles. Pour ce qui est des expositions parisiennes, « Titien, Tintoret, Véronèse : rivalités à Venise » au Musée du Louvre, « James Ensor » au Musée d’Orsay, la très jolie exposition « Fellini » au Jeu de paume et le grand succès de la FIAC [Foire internationale d’art contemporain] au Grand Palais ont constitué une offre variée et de grande qualité.
En 2010, sans doute à cause de la crise, l’offre sera orientée vers les valeurs sûres. Personnellement, j’irai voir « Crime et châtiment, de Goya à Picasso » au Musée d’Orsay, « Christian Boltanski » dans la nef du Grand Palais, « Gabriel Orozco » au Centre Pompidou, « Jean-Michel Basquiat » au Musée d’art moderne de la Ville de Paris. Sans oublier, à partir du 3 février au Musée Maillol, notre exposition « C’est la vie ! » qui présente, de Caravage à Damien Hirst, des vanités du XVIe au XXIe siècle. »

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°315 du 11 décembre 2009, avec le titre suivant : Quel avenir pour les expositions ?

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