Redécouverte

L’artiste foudroyé

L’œuvre d’Henri Gaudier-Brzeska, qui court de 1910 à 1915, s’installe à Orléans

Le Journal des Arts

Le 8 décembre 2009 - 498 mots

ORLÉANS - Henri Gaudier-Brzeska (1891-1915) revient en triomphe chez lui. Une rétrospective dédiée à l’enfant du pays, après avoir été présentée cet été au Centre Pompidou, s’installe au Musée des beaux-arts d’Orléans (Loiret), enrichie de 120 dessins appartenant au musée orléanais.

Issu d’un milieu modeste, Henri Gaudier abandonne ses études de commerce pour se tourner vers l’art en 1910. Il rencontre alors Sophie Brzeska – dont il accolera le nom au sien dans l’un de ses élans romantiques –, une Polonaise de vingt ans son aînée avec qui il entretiendra une relation aussi houleuse que passionnée. En 1911, pour échapper au service militaire, il fuit à Londres avec Sophie, où il définit sa conception de l’art auprès de l’avant-garde. Grand admirateur de Rodin à ses débuts, il mêle ensuite différents courants, du cubisme au primitivisme, pour devenir une figure marquante du vorticisme, variante britannique du futurisme créée par le poète américain Ezra Pound. Revenant sur sa position, il repasse la Manche en 1914 pour s’engager dans l’armée. Il est tué au cours de la bataille d’Artois en 1915, à 23 ans. Après la mort de Sophie à l’asile de Gloucester en 1925, son œuvre est vendue et arrive à la Tate Gallery de Londres où un assistant s’y intéresse. Harold Stanley Ede entreprend de faire connaître Gaudier-Brzeska. Mais, l’enfer étant pavé de bonnes intentions, sa frénésie employée à placer l’œuvre de l’artiste dans des institutions, sans passer par le marché, ne favorisera pas sa reconnaissance.

Le parcours de l’exposition se présente en deux temps, de la collection du Musée des beaux-arts d’Orléans à celle du Musée national d’art moderne. Sélectionnés par la commissaire Isabelle Klinka-Ballesteros, avec l’aide de l’historien d’art Pierre Brullé, les dessins ouvrent le bal. Les premières œuvres de l’artiste précèdent ses portraits, ses nus, mais aussi ses travaux en tant qu’employé des ateliers d’arts décoratifs Omega, pour aboutir au vorticisme. Peu à peu, le style de Gaudier-Brzeska se dessine : un trait vif et puissant comme sur l’impressionnante Tête de chien (1913), des mains et des pieds en brosse comme sur L’Étude pour Caritas (1914). Une présentation de lettres et de livres montre également les deux numéros de Blast, revue manifeste du vorticisme, comportant chacun un texte de Gaudier-Brzeska sous le titre Vortex. La deuxième partie du parcours met en scène les collections du Centre Pompidou. Dans une chronologie relative – l’œuvre de Gaudier-Brzeska ne s’étend que de 1910 à 1915 –, on le découvre sculpteur, des maladresses de l’étrange Madone (1912) à la belle Caritas (1914). À la mesure du personnage, une note théâtrale vient clore la rétrospective avec les deux derniers dessins envoyés du front par l’artiste, peu de temps avant sa mort. Henri Gaudier-Brzeska est méconnu comme sculpteur, mais plus encore comme dessinateur. Le Musée des beaux-arts d’Orléans livre donc une belle démonstration, mettant en lumière la quête d’un être qui se cherche en tant qu’homme et artiste.

HENRI GAUDIER-BRZESKA

Commissaire : Isabelle Klinka-Ballesteros, conservatrice en chef et directrice des musées d’Orléans

HENRI GAUDIER-BRZESKA. COLLECTIONS DU MUSÉE NATIONAL D’ART MODERNE ET DU MUSÉE DES BEAUX-ARTS D’ORLÉANS, jusqu’au 17 janvier 2010, Musée des beaux-arts, 1, rue Ferdinand-Rabier, 45000 Orléans, tél. 02 38 79 21 55, www.orleans.fr, tlj sauf lundi 10h-18h. Catalogue, éd. Fage, 208 p., 180 ill., 20 euros, ISBN 978-2-8497-5183-1

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°315 du 11 décembre 2009, avec le titre suivant : L’artiste foudroyé

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