Les coffres gardent leur secret

Interrogations après l’incendie qui a ravagé le Crédit Lyonnais

Le Journal des Arts

Le 1 juin 1996 - 554 mots

Louer un coffre est une parade au vol. L’avenir dira si elle en offre également une au feu, après l’incendie qui a détruit aux deux tiers le siège du Crédit Lyonnais à Paris, le 5 mai.

"Nous avons ouvert quelques coffres et nous n’avons constaté aucun dégât pour l’instant", déclare Françoise Solana, chargée de coordonner le "projet coffres" après le gigantesque incendie qui a détruit aux deux tiers le siège du Crédit lyonnais à Paris, le 5 mai dernier.

Situé dans le IIe arrondissement, à proximité de Drouot, le bâtiment possédait la plus grande salle des coffres d’Europe avec 9 000 coffres loués. De nombreux tableaux, des collections de timbres, des objets précieux y sont entreposés, appartenant aussi bien à des collectionneurs qu’à des antiquaires ou des bijoutiers, désireux de mettre leurs biens à l’abri des voleurs. "L’eau qui a ruisselé sur les quatre étages du sous-sol, où se trouvent les coffres, a été complètement pompée, et l’air est en cours d’assèchement grâce à des déshumidificateurs", précisait à la mi-mai Françoise Solana. Selon elle, ni le feu, ni l’eau déversée pour éteindre l’incendie ne devraient avoir détérioré le contenu des coffres. La crainte principale réside dans les dégâts éventuellement causés par la forte humidité de l’air. Les pompiers ont déclaré ignorer si les salles des coffres avaient été endommagées. Ce doute entretient l’inquiétude des locataires de coffres, qui ont été très nombreux à appeler le Crédit Lyonnais pour faire part de leur appréhension.

La banque, qui a engagé des travaux d’étayage pour assurer la stabilité des structures, a obtenu le 14 mai l’autorisation préfectorale permettant la visite des sous-sols. La direction devait aussi négocier avec l’inspection du travail et les syndicats les horaires d’ouverture des salles des coffres afin d’organiser au mieux les visites des propriétaires : vraisemblablement de 8h à 20h, six jours sur sept. Pour des raisons de sécurité, les visites se feront au compte-gouttes, par petits groupes : au maximum trois clients, accompagnés d’un coffrier et d’un agent de sécurité. "Nous avons estimé à trois quarts d’heure le temps moyen pour que les clients fassent l’inventaire du contenu de leur coffre. Les visites vont donc s’étaler sur plusieurs semaines, voire plusieurs mois", considère Françoise Solana. Certains compartiments sont de grandes dimensions et peuvent facilement contenir une commode Louis XV. Il existe même quelques chambres fortes de la taille d’une petite pièce. Les visites devraient commencer par le 4e sous-sol, le plus touché par le ruissellement de l’eau. D’autre part, les clients qui auront informé la banque de la fragilité du contenu de leur coffre seront prioritaires.

Le Centre Pompidou récupère ses tableaux
Onze tableaux – un Picasso (Nature morte à la guitare, 1921), un Utrillo, un Foujita, un Valadon, un Friesz, un Dufy et cinq Marquet –, prêtés au Crédit lyonnais par le Centre Pompidou, ont été épargnés par les flammes. Ils ornaient les salons de la direction au siège de la banque. En échange de ce prêt, le Crédit lyonnais avait mis à la disposition du musée une salle à Bayeux afin d’y entreposer des toiles. Lorsque l’incendie s’est déclaré, un agent de sécurité a décroché les tableaux et les a entreposés dans le bureau du président Jean Peyrelevade, situé dans l’Hôtel italien qui a échappé à l’incendie. Ils ont été restitués au Centre Pompidou dès le lendemain du sinistre.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°26 du 1 juin 1996, avec le titre suivant : Les coffres gardent leur secret

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