Les paysages intérieurs de Bustamante

Au Jeu de Paume, un \"lent retour\" de l’artiste

Le Journal des Arts

Le 1 novembre 1996 - 419 mots

Jean-Marc Bustamante expose dix années de travail au Jeu de Paume sous le titre \"Lent retour\". À travers des thèmes et des matériaux restreints, la juxtaposition des œuvres cherche à démontrer qu’une figure, photographiée ou sculptée, peut générer un lieu et conduire à des paysages intérieurs.

PARIS - Avec "Lent retour", Jean-Marc Bustamante propose une exposition générique de son travail depuis la séparation du tandem Bazilebustamante, en 1987. Dans l’espace, une table basse avec une photographie sur le plateau (Ouverture I, 1993-1996) côtoie une forêt de plaques d’acier découpées en forme de sapin, peintes puis fichées dans des socles en béton (Arbres de Noël, 1994-1996). Un ensemble de photographies de cyprès (Tableaux, 1991) répond à de grandes vitrines où nagent cinq éléments de fer aux boulons protubérants (Aquarama I et II, 1996). Les œuvres – photographies, sculptures au sol ou aux murs – sont ici présentées sans souci chronologique, sans volonté rétrospective, comme le démontre l’absence de certaines pièces emblématiques. "Lent retour", le titre choisi par Bustamante, atteste donc d’une double volonté : indiquer le modèle qui a présidé à la sélection, véritable "sédimentation" pour l’artiste, et proposer aux spectateurs une pratique de l’exposition.

D’œuvre en œuvre, de salle en salle, on constate combien Bustamante produit des objets ambigus, abstraits ou organiques; parfois tributaires de notre environnement quotidien. Cependant, une constante s’impose. Toutes les pièces s’appliquent à fixer un lieu et générer un site ouvert à l’appropriation. Depuis la réalisation des photographies de paysages altérés par l’habitat pavil­lonnaire (1977), Bustamante s’in­téresse au site comme configuration d’éléments hétérogènes. Alors que l’enregistrement photographique figeait les objets au milieu de la nature, il produit à partir de 1987 des sculptures plus mobiles, ouvertes vers un paysage intérieur. Dans ces dernières, ce qu’il appelle "le fini agricole" permet de créer une tension entre l’esthétique industrielle et un rendu artisanal. Le rôle de la trace et du dessin dans les œuvres récentes est à ce sujet significatif. Le jeu sur la matière, avec ses accidents de fabrication contrôlés, ses couleurs sourdes distribuées en masses sombres et claires, satisfait la simplicité des formes. Au tactile répond l’optique. Évocation d’architectures tout autant qu’objets communs, les œuvres de Busta­mante instaurent l’existence de figures élémentaires en prise sur les éléments naturels. La stature du corps est omniprésente. Le visiteur peut alors s’y introduire et tracer les contours de sa propre expérience.

JEAN-MARC BUSTAMANTE : LENT RETOUR, jusqu’au 1er décembre, Galerie nationale du Jeu de Paume, mardi 12h-21h30, mercredi au vendredi 12h-19h, samedi-dimanche 10h-19h, Catalogue, 64 p., 200 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°30 du 1 novembre 1996, avec le titre suivant : Les paysages intérieurs de Bustamante

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