Londres ne suit pas New York

Plus de 40 % des lots n’ont pas trouvé preneur

Par Roger Bevan · Le Journal des Arts

Le 1 janvier 1997 - 632 mots

Les ventes d’impressionnistes et d’art moderne n’ont pas tenu leurs promesses à Londres. Les enchérisseurs ont manifesté peu d’enthousiasme devant la faible qualité des œuvres proposées.

LONDRES. Les catalogues édités par Christie’s et Sotheby’s pour les ventes d’œuvres impressionnistes et d’art moderne, qui se sont tenues respectivement les 2 et 3 décembre, comportaient bien peu d’œuvres intéressantes ou nouvelles. Ces deux ventes n’ont hélas pas permis à la dynamique amorcée à New York en novembre de se confirmer, la remontée récente de la livre sterling dissuadant en outre les acheteurs étrangers. Christopher Burge, qui tenait le marteau pour Christie’s, et Simon de Pury, qui officie chez Sotheby’s, affichaient pourtant une confiance à toute épreuve, mais les résultats leur ont donné tort.
Sur les soixante lots proposés par Christie’s, seuls trente-six ont trouvé preneur, pour un montant total de 12,67 millions de livres (109 millions de francs). La "performance" de Sotheby’s a été tout aussi décevante : vingt-neuf lots sur cinquante quatre se sont vendus, pour un total de 13,55 millions de livres (116 millions de francs).
Sur les deux ventes, quarante-neuf lots, soit plus de 40 % des œuvres exposées par les deux maisons, sont restés invendus et n’ont d’ailleurs, pour la plupart, suscité aucune enchère. Avec ces maigres résultats, il n’est donc pas étonnant que le marché des impressionnistes et de l’art moderne soit désormais cantonné à New York, où des ventes comparables produisent régulièrement 80 à 100 millions de dollars (420-520 millions de francs).

Edgar Degas, Danseuses vertes ; Christie’s, lot 13, couverture du catalogue ; estimé 2,5-3,5 millions de livres, adjugé 2 millions de livres (17 millions de francs).
Comparée aux superbes pastels de Degas passés en vente le mois dernier à New York, cette œuvre ne saurait être considérée comme un chef-d’œuvre ; pourtant, Christie’s l’avait choisie pour illustrer la couverture du catalogue et celle de son magazine Preview de décembre. Qu’elle soit l’une des deux œuvres les plus chères proposées au cours de la semaine souligne la pauvreté des lots. Un unique enchérisseur par téléphone, qui a fait son offre au directeur du département de New York, Michael Findlay, l’a acquise à un prix inférieur à l’estimation basse, mais bien assez élevé au regard de sa qualité.

Fernand Léger, Homme à la pipe ; Chris­tie’s, lot 20 ; estimé 800 000-1,2 million de livres, adjugé 750 000 livres (6,5 millions de francs).
Ce tableau, version plus petite d’une composition plus intéressante conservée au Musée d’art moderne de la Ville de Paris, est le lot le plus cher de ceux qu’Annely Juda a achetés ou, du moins, a tenté d’acquérir. Il semblerait que la galeriste de Londres n’agissait pas pour son propre compte, mais pour celui d’un collectionneur. Elle s’est également intéressée à une esquisse à l’huile de Seurat (lot 6), finalement emportée par un autre enchérisseur, et à une étude de Picasso à la gouache et à l’aquarelle (lot 23), qu’elle a pu enlever.

Gino Severini, Simultanéité de groupes centrifuges et centripètes (Donna alla finestra) ; Christie’s, lot 35 ; estimé 1-1,5 million de livres, adjugé 1,7 million de livres (14,5 millions de francs).
Le grand marchand d’art londonien Ivor Braka, qui voulait ce lot, l’a acquis à l’issue d’une compétition avec un enchérisseur au téléphone qui faisait monter  les enchères par paliers de 50 000 livres. Ce chef-d’œuvre du Futurisme, très dynamique, est d’autant plus précieux qu’il est l’un des rares à avoir passé outre aux restrictions du marché italien. Il constitue peut-être le lot le plus important et le plus intéressant mis en vente au cours de la semaine. L’œuvre n’avait pas trouvé d’acquéreur le 10 mai 1994 chez Christie’s à New York (lot 53), où elle avait été estimée entre 2,5 et 3,5 millions de dollars, mais cette péripétie ne lui a pas été préjudiciable à Londres.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°32 du 1 janvier 1997, avec le titre suivant : Londres ne suit pas New York

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