Artissima

L’événement ultrapointu du Piémont

Malgré la crise, la foire d’art contemporain de Turin promet un bon cru avec un programme liant arts visuels et théâtre

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 28 octobre 2009 - 693 mots

TURIN - « On fait Artissima car c’est une foire que les artistes trouvent intéressante. »

Ces propos de Darren Flook, directeur de la galerie The Hotel (Londres), en disent long sur le capital sympathie de la foire turinoise. Grâce à son aura artistique, cet événement ultra-pointu affiche encore une liste intéressante d’exposants, malgré le désistement de plusieurs galeries américaines. Contre toute attente, le New-Yorkais Andrew Kreps a, lui, préféré Artissima à Frieze Art Fair, à Londres. Il est rejoint par d’autres enseignes plus préoccupées par le contenu que par l’esbroufe, à l’instar de Miguel Abreu (New York), les Berlinoises Esther Schipper et Carlier Gebauer ou encore Bernard Bouche (Paris), lequel prévoit Susana Solano, Carlo Guaita et Giovanni Anselmo. « Artissima n’a jamais été une foire blockbuster, régie par les spéculateurs de l’art. Au contraire, nous avons attiré jusqu’à présent de véritables passionnés, des collectionneurs raffinés et discrets, indique Andrea Bellini, directeur du salon. Ainsi la crise, même si elle se prolonge, ne nous préoccupe pas comme elle préoccupe d’autres foires internationales. » Et d’ajouter : « Je pense que les manifestations de ce type doivent désormais pouvoir offrir à leur public de véritables expériences. » L’audacieux projet de Bellini consacré aux rapports entre les arts visuels et ceux de la scène dans cinq théâtres turinois, réunissant des artistes du calibre de Guy de Cointet, Cao Fei, Matt Mullican ou Michelangelo Pistoletto, a fini de convaincre certains nouveaux entrants comme gb agency (Paris). À l’ambiance créative et pétillante générée par Bellini s’ajoute la question du réseau. « On vend beaucoup plus à Arte Fiera à Bologne que sur Artissima, mais on est plus à l’aise à Turin, où nos voisins font le même métier et parlent la même langue », constate Claudia Cargnel, codirectrice de la galerie Bugada & Cargnel (anciennement Cosmic Galerie, Paris).
Certes, mais l’impératif commercial n’est pas à négliger et les collectionneurs italiens ne sont pas réputés dispendieux. Pourtant, d’après Claudia Cargnel, le marché transalpin est l’un des rares à ne pas s’être grippé avec la crise. Certains exposants comptent sur les achats institutionnels. « Les musées n’achètent plus auprès des trois grosses galeries italiennes », remarque Frank Elbaz (Paris), lequel a vendu l’an dernier deux pièces de Gyan Panchal au FRAC (Fonds régional d’art contemporain) Piémont. En 2008, les ventes sur Artissima ont même généré 50 % du chiffre d’affaires annuel de Balice Hertling (Paris). « Je suis Italien, ça aide. Certains de mes clients ne voyagent pas, ça ne les excite pas d’aller ailleurs », admet Daniel Balice, qui présente Samuel Richardot dans la section « Present Future ». Pour Javier Peres (Los Angeles, Berlin), qui déploie de larges sculptures de Terence Koh, les transactions se révèlent aussi importantes à Turin qu’à Londres, sur Frieze, voire supérieures à n’importe quel autre salon européen. « On apporte des pièces fortes, indique-t-il. On aborde la foire avec sérieux et, en retour, les clients nous prennent aussi au sérieux. » Le sérieux, voilà bien le nouveau maître mot du marché de l’art.

Castello ou no Castello ?
De l’autre côté des Alpes, la rumeur fait rage sur l’éventuelle nomination d’Andrea Bellini à la tête du Castello di Rivoli, musée d’art contemporain situé près de Turin. « Depuis deux ans, je suis victime de cette rumeur. Je n’ai pas été candidat et je n’ai pas été contacté officiellement par le Castello di Rivoli, se défend l’intéressé. Si on m’en propose la direction, il faudra que je réfléchisse. Mais de toute façon la meilleure façon de brûler un nom est d’en parler tout le temps. » L’hypothèse fait toutefois bondir Carolyn Christov-Bakargiev, conservatrice en chef du musée. « Je n’ai rien personnellement contre Bellini, il a toujours très bien organisé la foire, mais il n’a pas les qualifications pour diriger un musée, martèle-t-elle. Samuel Keller [ancien directeur des foires Art Basel et Art Basel Miami Beach] a été appelé par la Fondation Beyeler, mais il s’agit d’un musée privé, pas payé par l’argent des contribuables. Il faut que le futur directeur du Castello soit choisi sur la base de dossiers. On doit regarder de près les différents projets et sélectionner le meilleur. »

ARTISSIMA, 6-8 novembre, Lingotto Fiere, 280-294 via Nizza, Turin, Italie, www.artissima.it, tous les jours 12h-20h.

ARTISSIMA
Directeur : Andrea Bellini
Nombre d’exposants : 128
Tarif des stands : 210 euros le mètre carré
Nombre de visiteurs en 2008 : 45 000

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°312 du 30 octobre 2009, avec le titre suivant : L’événement ultrapointu du Piémont

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