Le rôle accru des salons

Le Journal des Arts

Le 1 mars 1997 - 567 mots

Les dernières années ont vu apparaître plusieurs salons de très bon niveau – Tefaf Bâle, Salon des beaux-arts, Art Forum Berlin – qui viennent confirmer une tendance générale au regroupement des antiquaires et des galeristes.

Les raisons en sont multiples. En des temps où l’amateur en savait tout autant – sinon parfois plus - que le marchand, l’expertise garante de l’achat n’était pas nécessaire. L’acheteur d’aujourd’hui, plus pressé et moins sûr de ses connaissances, apprécie la garantie d’un salon dont il connaît les exigences en matière d’authenticité. S’y ajoutent la possibilité de trouver sous un même toit bon nombre des marchands qui comptent, qui ont réuni pour l’occasion des pièces de qualité, et l’excitation d’un rendez-vous régulier où l’on se promet de voir, et éventuellement d’acheter.

Pour les marchands, c’est une occasion de retrouver et de renouveler une clientèle a priori ciblée en fonction du contenu même du salon. On en arrive même à des situations où des antiquaires concentrent leur activité sur un certain nombre de salons et n’accueillent chez eux, sur rendez-vous, que quelques amateurs entre deux manifestations. Sans aller jusqu’à ces extrêmes, il est certain que les foires et salons jouent un rôle grandissant sur le marché. Le mouvement ne se limite pas aux salons d’importance nationale ou internationale mais s’étend à un rythme encore plus accéléré aux salons locaux, et l’on assiste à un véritable déferlement de manifestations où le bon grain disparaît un peu trop souvent sous l’ivraie. Les salons peuvent regrouper divers domaines du marché – comme la Biennale des Antiquaires, Maas­tricht, Tefaf Bâle ou Grosvenor House –, ne traiter que d’une spécialité donnée – Salon du Dessin par exemple –, ou d’un ensemble de spécialités cohérent – Salon des beaux-arts -, voire se concentrer sur une période précise, dans le cas des salons d’art contemporain.

L’approche choisie importe moins que le sérieux de l’organisation. Les professionnels s’accordent pour estimer que les salons qui se déroulent dans les grandes métropoles offrent les meilleures garanties, du fait des sélections opérées tant à propos des exposants eux-mêmes que des œuvres figurant sur leurs stands. L’admission des marchands s’effectue souvent par cooptation, et les œuvres sont toutes examinées, avant d’être présentées au public, par une commission d’experts. La question de l’authenticité soulève moins de difficultés en matière d’art contemporain, où l’intérêt du salon dépend alors presque uniquement de la sélection des exposants. La qualité de ces derniers vaut à Bâle son prestige, alors qu’après un "passage à vide", celui de la Fiac s’améliore ; notons que celle-ci a su équilibrer en son sein l’art d’avant-guerre et celui plus proche de nous, tandis qu’à l’étranger, Chicago se borne à l’art d’après 1945 et Berlin aux créations les plus contemporaines. Les autres salons, l’Arco à Madrid ou les foires allemandes (Cologne et Francfort principalement) ont un caractère international moins affirmé.

Le succès de ces salons ne préjuge pas de la qualité d’autres manifestations analogues. Il existe en France plusieurs salons provinciaux tout à fait dignes d’intérêt, tels – la liste est loin d’être limitative – Toulouse, Strasbourg, Bordeaux, Dijon ou Rouen. Pour les autres, il faudra être prudent et préférer une brocante qui dit clairement son nom à un salon bardé de pseudo experts dans de trop beaux quartiers. Et l’on n’oubliera pas, bien sûr, que les marchands dignes de ce nom possèdent des galeries dans lesquelles, l’année durant, ils sont heureux de recevoir les amateurs...

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°34 du 1 mars 1997, avec le titre suivant : Le rôle accru des salons

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