Rouen : l’histoire naturelle en berne

Fermeture du muséum fondé en 1828

Le Journal des Arts

Le 4 avril 1997 - 427 mots

La municipalité de Rouen a décidé, en décembre, la fermeture au public des salles de son Musée d’histoire naturelle pour d’impérieuses raisons de sécurité. Un établissement singulier, riche d’intéressantes collections, dont l’avenir embarrasse les responsables locaux.

ROUEN. "Ce musée situé aux étages supérieurs d’un bâtiment XVIIe, avec des planchers hors d’âge et des escaliers en colimaçon, était un piège à feu", résume, résigné, Jean-Robert Ragache, adjoint à la Culture de Rouen. Georges Charpentier, attaché territorial au musée, est plus sévère encore : "Dépourvu d’issues de secours, de système anti-feu, d’alarmes, un système électrique désastreux... nous aurions dû fermer il y a vingt ans". Déjà consciente du problème, l’ancienne équipe municipale avait lancé un concours d’architecture pour créer un bâtiment neuf, à proximité du jardin des Plantes, où auraient été installées les collections. Ce projet, évalué à près de 150 millions de francs, fut stoppé en 1995 en raison de la défection du Conseil général, principal partenaire financier. Avec son conservateur à temps partiel et ses douze agents (contre le double pour son homologue du Havre), le musée est censé poursuivre ses activités scientifiques et pédagogiques extra-muros.

Deux kilomètres de vitrines
"C’est un musée au charme inouï, un musée de musée tel que nous n’en avons conservé aucun dans notre pays", s’enflamme le marchand d’art océanien Anthony Meyer, qui en souligne la richesse non seulement en art océanien – collection Rumeau – avec des instruments de musique et de navigation de grande qualité, et de rares pièces Maori et des îles de l’Amirauté, mais aussi en art africain – anciennes collections Lecomte, Delapoipiere et Lesieur. "Les Australiens m’ont consulté récemment pour un problème de même nature à Adélaïde. Un musée est un gardien du savoir et de l’histoire par ses collections, mais aussi par lui-même. Or, jamais nous ne sauvegardons l’esprit d’origine de quelques salles ou d’un musée complet. S’il n’est pas restauré dans son jus, il s’agira d’une perte irréparable", conclut le spécialiste. Jean-Robert Ragache convient du "charme incomparable de cet établissement, avec ses deux kilomètres de vitrines, ses boiseries, mais insiste sur le risque qu’il représente en termes de sécurité, et surtout, ajoute-t-il, sa restauration coûterait aussi cher (près de 40 millions de francs) que son transfert dans un autre lieu et occasionnerait une perte de 25 % des surfaces utiles". Dans cette hypothèse, il resterait néanmoins 1 300 m2…
La réflexion est en cours à Rouen, où l’on songe à un nouveau partenariat ville-département. Mais l’idée de restaurer ce musée, fondé en 1828 par un érudit local, Félix-Archimède Pouchet, médecin, naturaliste et zoologiste, semble bien compromise.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°35 du 4 avril 1997, avec le titre suivant : Rouen : l’histoire naturelle en berne

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