Le jardin secret de Delvaux

Une fidélité insoupçonnée à la vallée mosane

Le Journal des Arts

Le 2 mai 1997 - 346 mots

En près de trois cents œuvres, le Musée de Huy crée la surprise. Peintre des gares et des femmes énigmatiques, Paul Delvaux se révèle aussi un paysagiste puissant qui, loin de toute théâtralité, a cultivé force et expressivité.

HUY (de notre correspondant). Parallèlement à la rétrospective qui se tient à Bruxelles, les villes de Huy et Wanze rendent un hommage singulier au peintre né à Antelme, près de Huy, il y a tout juste un siècle. À première vue, on pouvait craindre une approche régionaliste vantant l’attachement passé de Delvaux à son pays d’origine. En réalité, les quelque trois cents pièces sélectionnées par Luc Engen invitent à une relecture de l’œuvre. D’abord, ces toiles et – surtout – aquarelles, moins vues et moins connues, dégagent l’artiste des poncifs dans lesquels la critique l’a souvent emprisonné. L’imaginaire-refuge, fait de théâtralité et de "fantaisies pompéiennes", cède la place à un réel travail de peintre pris sur le vif au hasard des retours en famille. Delvaux y manie le pinceau avec un désir constant d’expressivité, loin des extravagances littéraires et des rêveries éveillées. Le peintre s’y révèle plus libre. À dire vrai, l’exceptionnelle continuité de ce travail, livré tantôt face à la nature, tantôt au cœur même du souvenir, semble témoigner d’un désir de repos que seul le paysage pouvait offrir. Aux côtés des grands nus que Delvaux a peints dès 1927, le paysage mosan s’impose comme une échappée loin des rituels scéniques et des allégories fantasmagoriques. Il devient un temps d’arrêt sans distanciation à l’égard de l’image, sans ce désir rhétorique de construire l’image. Il s’impose comme l’antidote d’un intellectualisme appuyé, et rend à la peinture sa spontanéité et à la matière sa présence initiale. L’univers devient aérien et loin des jeux du sens ; l’artiste se retrouve avec une joie que partagera le spectateur.

PAUL DELVAUX ET LE PAYS MOSAN, jusqu’au 30 septembre, Église Saint-Mengold, Huy, tél. 85 21 78 21, et château à l’Horloge, Wanze, tél. 85 21 39 02, tlj 14h-18h, juillet-aôut 10h-18h. Catalogue publié par le Crédit communal de Belgique, 236 p., 980 FB.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°37 du 2 mai 1997, avec le titre suivant : Le jardin secret de Delvaux

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