Des maçons en toute franchise

Le Musée des beaux-arts de Tours célèbre au grand jour la pensée maçonnique

Le Journal des Arts

Le 16 mai 1997 - 496 mots

À Tours, la franc-maçonnerie troque l’habit de société secrète pour celui d’association discrète. Partant du principe que la suspicion qui entoure traditionnellement leurs activités est avant tout le fait de l’ignorance, les francs-maçons de France invitent le public à une exposition volontairement \"éclairante\" sur leurs rites, leur philosophie et leur histoire.

TOURS. C’est bien connu, les francs-maçons sont partout. Jusque sur la lune, depuis que le frère Edwin Aldrin y a déposé le drapeau maçonnique, le 21 juillet 1969. Dans l’espoir de battre en brèche quelques préjugés, tout en apportant la preuve d’un rare œcuménisme, les différentes obédiences maçonniques françaises et européennes ont donc décidé de s’associer pour organiser en France la première exposition "consensuelle" sur la franc-maçonnerie. La 150e année de travail de la loge tourangelle "Les Démophiles" et le riche passé maçonnique de l’Indre-et-Loire ont conduit les organisateurs à choisir le Musée des beaux-arts de Tours pour présenter plus de quatre cents objets issus d’une trentaine de collections publiques et privées, françaises et étrangères, dont une centaine n’ont encore jamais été montrés. Les Musées du Grand Orient de France et de la Grande Loge de France prêtent bien sûr quelques fleurons de leur collections, dont, pour le second, le fameux service à café en grisaille et or de la Compagnie des Indes (vers 1760), et l’une de ses dernières acquisitions, le Grand livre d‘architecture (1795) frappé de la devise "Liberté, Égalité, Fraternité".

Mozart en loge
L’image d’un récipiendaire préparé pour l’initiation, à moitié nu et les yeux bandés, qui orne l’affiche de l’exposition est tirée du Mutus Liber Latomorum, ouvrage unique de 1760 prêté par un collectionneur privé, qui rassemble 31 aquarelles encore inédites. D’autres raretés ne manqueront pas de susciter l’intérêt du public, initié ou non, comme une série d’aquarelles du XVIIIe siècle provenant du Centre culturel maçonnique Prinz Frederick des Pays-Bas, ainsi que le mystérieux tableau de Mozart en loge du Musée historique de la Ville de Vienne. Peint par un artiste anonyme en 1790, il montre le musicien assis au premier plan de cette "tenue" de la "Loge zur neugekrönen Hoffnung" (L’espérance nouvellement couronnée), qui comptait parmi ses membres le médecin Franz Anton Mesmer, la comtesse von Thurn, le prince et les comtes Esterhazy… Exceptionnellement prêtés par la British Library, les deux manuscrits fondateurs de la franc-maçonnerie, le Regius (1390) et le Cooke (1425), rappelleront au novice les origines de la franc-maçonnerie "opérative", devenue "spéculative" à mesure de l’arrivée des intellectuels au sein des confréries. En fin de parcours, la scénographie de l’exposition inclut la reconstitution d’une bibliothèque, d’une salle d’agapes et d’un temple maçonniques que les visiteurs pourront traverser avant de rejoindre l’Hôtel-de-Ville, qui accueille jusqu’au 22 juin une exposition philatélique également consacrée à la culture maçonnique et à ses grands hommes.

LA FRANC-MAÇONNERIE, jusqu’au 31 août, Musée des beaux-arts, 18 place François-Sicard, 37000 Tours, tél. 02 47 05 68 73, tlj sauf mardi 9h-12h45 et 14h-18h. Catalogue, ouvrage collectif, 240 p., 200 ill. coul., éditions Nicole Fisbach-Alfil éditions, 240 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°38 du 16 mai 1997, avec le titre suivant : Des maçons en toute franchise

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