Taïwan

Taiwan nouvel Eldorado

Orsay répond aux sirènes de la mer de Chine

Par Ian Robertson · Le Journal des Arts

Le 16 mai 1997 - 476 mots

Comme ce fut le cas pour l’exposition des tableaux du Louvre en 1995-1996, celle d’une soixantaine de tableaux du Musée d’Orsay aux musées de Taipei et de Kaohsiung représente de grands enjeux financiers. Et le succès considérable que remportent ces expositions-événements ne manque pas d’exacerber les conflits d’intérêts et de personnes qui agitent les milieux politico-économiques taiwanais.


KAOHSIUNG. Comme ce fut le cas pour l’exposition "Le paysage dans la peinture occidentale, œuvres du Musée du Louvre" organisée en 1995-1996 au National Palace Museum de Taipei, l’ombre des mécènes taiwanais se profile sur fond de rivalités politiques derrière l’exposition "L’âge d’or de l’Im­pres­­sionnisme, présentée en ce moment au Musée des beaux-arts de Kaohsiung. Selon Lin Min-Yuan, du bureau parisien de la Fondation Dimension Endowment for Art qui avait apporté 60 % des 20 millions de francs nécessaires au financement de l’exposition du Louvre, les prêts consentis par les deux musées français s’expliquent en regard des sommes considérables qui leur sont versées : le Louvre avait ainsi reçu un don de 10 millions de francs en contrepartie de l’envoi de 71 tableaux.  Dimension aurait également souhaité être le mécène de l’exposition du Musée d’Orsay, mais le China Times lui a finalement été préféré. La présentation initiale de "L’âge d’or de l’Impres­sionnisme" a eu lieu, au mois de janvier, au Musée national d’histoire de Taipei dont le directeur, Huang Kuan-nan – com­me celui du Musée des beaux-arts de Kaohsiung, Huang Tsai-lang –, entretient de très bonnes relations avec le propriétaire du China Times, Yu Gi-chung, un millionnaire qui a lui-même l’oreille du président de la République taiwanaise, Lee Dan-hwie.

Un million de visiteurs ?
Le président de Dimension, Geoffrey Huang, est plus difficile à situer sur l’échiquier politique, même s’il est proche de Chin Hsiao-yi, ancien secrétaire particulier de Tchang Kaï-chek et actuel directeur du National Palace Museum. Du fait de son importance et du précédent avec le Louvre, ce musée aurait théoriquement dû être le premier à accueillir  l’exposition des chefs-d’œuvre d’Orsay, mais son poids n’a cessé de décliner depuis la mort de Chiang Ching-kuo, fils et successeur de Tchang Kaï-chek, qui a accéléré la perte d’influence politique de la famille de l’ancien maréchal. Le soutien apporté par le China Times, une quinzaine de millions de francs environ, s’explique également par les concordances de vues entre le directeur du Musée national d’histoire et le magnat de la presse, tous deux partisans du credo nationaliste du Kuo-min-tang. Le dernier mot d’ordre émanant du palais présidentiel, "chaque citoyen doit faire sa révolution spirituelle", étant repris par Huang Kuan-nan sous une forme pratique : "Nous appliquons les règles du business pour promouvoir la culture". Sans doute avec un certain succès puisque l’exposition de 1996 aurait attiré 730 000 visiteurs, tandis qu’un million de visiteurs sont attendus pour la soixantaine de Monet, Renoir, Degas, Gau­guin, Van Gogh… prêtés par le Musée d’Orsay.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°38 du 16 mai 1997, avec le titre suivant : Taiwan nouvel Eldorado

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