Art et communication

Peinture contre peinture

Le Journal des Arts

Le 30 mai 1997 - 445 mots

Il y a peinture et peinture. Peinture à l’huile et peinture à l’eau.

Œuvres picturales ou revêtements muraux. Les peintures Avi, du groupe Kalon, ont fait depuis longtemps le parallèle entre les deux. Quoi de plus naturel, en effet, que de faire appel à un expert pour témoigner des qualités d’une peinture. À la création, ensuite, d’imaginer des situations humoristiques et des astuces pour bâtir une histoire. On se souvient de leur campagne de 1994, "L’homme à l’oreille coupée", autoportrait de Van Gogh qui avait quelques difficultés à saisir le discours de son voisin cubiste. Aujour­d’hui, l’agence Ogilvy & Mather récidive dans la même ligne avec le coup des "tableaux animés". Dans le film "Le Nu", ce sont donc deux nouveaux tableaux qui nous sont proposés. Le premier représente une jeune femme extravertie, à demi nue avec un drap pour seul vêtement, peinte dans l’esprit des grands classiques du XVIIIe siècle. Le second, moderne, lui oppose un vieux grincheux, jaloux, conventionnel et passablement irrité par le côté aguicheur de la belle et sa nudité affichée. Il fera donc tout pour qu’elle se rhabille... sans succès ! Celle-ci est bien trop occupée à s’extasier sur le pouvoir couvrant, la facilité d’utilisation, la beauté, la couleur, la rapidité de séchage, l’absence d’odeur de la peinture Avi, mais également sur les charmes du jeune homme qui est en train de repeindre la pièce devant elle. Deux toiles inventées et réalisées pour la circonstance par le peintre et restaurateur Pascal Blaise, qui n’hésite pas à trancher dans les styles. Quant aux trucages pour animer les personnages, deux comédiens ressemblant aux modèles des tableaux ont adopté une posture identique pour réciter leur texte. Des pastilles noires ont été apposées sur les muscles de leur visage et de leur corps afin de suivre chacun de leurs mouvements. L’ordi­nateur a fait le reste : chaque mouvement a été entré en informatique puis recalqué sur les tableaux pour les animer. À travers cette campagne, agence et annonceur entendent conforter la position de la marque dans les concepts de simplicité et de facilité d’utilisation, – depuis toujours associés à Avi –, mais aussi renforcer ses critères qualitatifs en donnant plus de sens et de contenu à la communication. L’ensemble de la démarche est sympathique, amusant. On peut déplorer, cependant, la vulgarité des propos des deux protagonistes, tant dans les mots eux-mêmes que dans la façon de les dire. Dommage, l’art, ici, n’a pas atteint son sommet !

Agence : Ogilvy & Mather / Directeur de création : Bernard Bureau / Concepteur-rédacteur : Franck Rey / Directeur artistique : Stéphanie Surer / Réalisateur : Bruno Decharme / Production : Kamikaze / Effets spéciaux : Spark

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°39 du 30 mai 1997, avec le titre suivant : Peinture contre peinture

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