Culture de sculptures

Les champs de sculpture de Smith renaissent pour l’été

Le Journal des Arts

Le 4 juillet 1997 - 600 mots

Le Parc de Storm King propose, à partir de cet été, une sélection tournante de sculptures de David Smith, en référence aux installations de plein air que l’artiste américain exposait dans ses champs de Bolton Landing.

MOUNTAINVILLE, ÉTAT DE NEW YORK. L’œuvre de David Smith, dont Robert Motherwell déclarait qu’elle était "aussi raffinée qu’un Vivaldi, et aussi puissante qu’un semi-remorque", est mal connue du grand public. Pourtant, ses assemblages abstraits d’acier soudé et ses "dessins dans l’espace" ont considérablement développé le médium inventé par Picasso et Gonzalez, pour inspirer ensuite d’autres artistes comme Caro et les minimalistes. Si Smith a un pair chez ses contemporains, ce ne peut être qu’Alexandre Calder. Mais tandis que mobiles et stabiles ont assuré à ce dernier une belle popularité, Smith n’a pas la notoriété qu’il mérite. Déjà peu connu dans son propre pays, il ne l’est pratiquement pas à l’étranger, malgré une bonne représentation de son œuvre dans les musées américains et plusieurs expositions en Europe. Étroitement associé aux peintres expressionnistes abstraits, il ne partage pourtant pas leur renommée. La préférence des Américains pour les œuvres bidimensionnelles expli­que en partie ce phénomène, mais l’attitude de l’artiste y a également contribué. Isolé dans le village de Bolton Landing, à proximité du Lac George, il préférait vivre et travailler dans sa ferme des Adirondacks, loin de la scène new-yorkaise.

Des champs de sculpture
Pendant les deux dernières années de sa vie, David Smith a disposé en rangs, dans les champs entourant ses ateliers, des sculptures de très grande taille allusivement figuratives, tels les soldats d’une armée futuriste. Si de nombreux amis et collectionneurs ont pu les voir, ces installations de plein air n’étaient pas destinées au public, mais plutôt au seul plaisir de l’artiste. Celui-ci affirmait avoir besoin d’auto-référence, vouloir être entouré de son œuvre. Rien ne dit qu’il les ait conçues pour ce site en particulier ; toutefois, cette exposition correspondait bien à sa personnalité et à sa méthode. Or, depuis la disparition de Smith en 1965, ses sculptures ont rarement été regroupées en plein air, et la plupart des rétrospectives qui lui ont été consacrées ont pris place dans des salles des musées. À partir de cet été, trois expositions au Storm King Art Center de Mountainville se proposent de recréer l’atmosphère des champs de Bolton Landing. Sous la double houlette du directeur du Centre, David Collens, et d’une des filles de Smith, Candida, la première exposition rassemble 22 œuvres d’extérieur – en acier, acier peint et bronze – qui couvrent la carrière du sculpteur. Un certain nombre de sculptures plus petites et une sélection de dessins et photographies sont également présentées en intérieur. Le cycle se poursuivra l’année prochaine avec ses bronzes, et s’achèvera en 1999 sur un panorama de ses œuvres en acier inoxydable, dont le superbe Cubi d’acier poli. Cette manifestation célèbre le trentième anniversaire de l’acquisition par le Storm King Art Center de 13 sculptures de la succession David Smith. C’est à cette occasion que furent achetées les magnifiques Sitting Printer (1954-1955), Three Ovals Soar (1960), Volton XX (1963) et Becca (1964), complétées par cinq sculptures de la série Voltri Bolton prêtées par l’État de New York, et cinq autres appartenant à ses filles, dont Lunar Arc (1961) et Primo Piano III (1962). L’exposition ne se veut pas "une reconstitution archéologique des champs de Bolton Landing, précise Candida Smith, mais Storm King donnera une impression aussi fidèle que possible de cet environnement".

LES CHAMPS DE DAVID SMITH, jusqu’au 16 novembre, Storm King Art Center, Old Pleasant Hill Road, Mountainville, État de New York, tél. 1 914 534 31 90, tlj 11h-17h30.

Le Storm King Art Center
Situé dans la vallée de l’Hudson, à quelque 90 kilomètres au nord de New York, Storm King est le plus grand des parcs extérieurs dédiés à la sculpture nord-américaine. Ses 160 hectares de forêts et de prairies sont constellés d’environ 120 sculptures abstraites d’artistes comme Calder, Moore, Nevelson, Noguchi, Rickey, Caro, di Suvero, Serra, Abakanowicz, et d’autres moins connus. Les vertes pelouses et les terrasses se détachant sur un fond de montagnes boisées offrent un cadre extraordinaire à ces œuvres monumentales, habituellement confinées aux places et squares des villes. La collection permanente comprend également une centaine de sculptures d’intérieur, de dessins et de photographies, exposés dans une réplique de château normand édifiée en 1935 pour le précédent propriétaire du terrain. Co-fondé en 1960 par Ralph E. Ogden, disparu en 1974, et l’actuel président et directeur H. Peter Stern, l’établissement doit son nom à la montagne Storm King qui domine le site à l’est. Depuis son ouverture, le parc a doublé sa surface et participe au maintien de la réserve naturelle environnante de plus de 900 hectares. En activité huit mois par an, il attire environ 40 000 visiteurs avec des expositions consacrées à Alice Aycock, Ursula van Rydingsvard, Marc di Suvero…

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°41 du 4 juillet 1997, avec le titre suivant : Culture de sculptures

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