Stéphane Loire : « Musée du Louvre : école italienne, XVIIe siècle, I »

Un catalogue des peintures bolonaises du Louvre

Le Journal des Arts

Le 12 septembre 1997 - 676 mots

Le catalogue des peintures bolonaises du Louvre, dressé par Stéphane Loire, doit être rangé parmi les réalisations monumentales. Bien que, grâce à ce travail, notre connaissance de ces œuvres repose désormais sur une base solide, le spécialiste de Guido Reni, Stephen Pepper, discute certaines attributions.

Jusqu’à cette publication, l’histoire et le statut de la peinture bolonaise au Louvre semble n’avoir été qu’un tissu d’inexactitudes et d’erreurs. Stéphane Loire prend naturellement position à plusieurs reprises sur les questions d’attribution, de datation et d’iconologie, qui peuvent être examinées dans un cadre beaucoup mieux défini. La netteté avec laquelle il établit ses arguments contribue à alimenter notablement discussions et controverses. Par exemple, pour le David avec la tête de Goliath (inv. 519) et le Saint Sébastien (inv. 532) de Guido Reni, il omet de mentionner deux autres versions autographes : d’une part, le David de la collection du défunt sénateur Volpone – qu’il faut identifier au David mentionné par Assarino en 1639 – que j’ai publié en 1992 ; d’autre part, le Saint Sébastien de Dulwich, actuellement en restauration à la National Gallery, qui est repertorié comme l’une des versions d’atelier de la toile du Louvre, alors que je l’ai publié comme autographe voici quelques années. Dans l’article consacré à l’Enlèvement d’Hélène (inv. 539), il semble mettre en doute la réalité de l’exposition décrite par Sandraert, mais il note aussi, avec justesse, que si elle a vraiment eu lieu, elle n’a pu se tenir qu’en 1632. Cette date permettrait de l’inclure dans le catalogue de Reni, mais Stéphane Loire semble n’admettre que la possibilité d’une copie : où donc était l’original ?

La suite des événements proposée par Sir Denis Mahon et moi-même est que le marchand de Lyon – Lumague, manifestement – a avancé l’argent pour le compte de Marie de Médicis, afin d’acheter le tableau à Reni en 1631. En 1632, après le départ en exil de Marie de Médicis, Lumague, qui cherchait à récupérer son argent, a demandé à Spada de vendre le tableau à Rome. La toile a donc été incorporée à l’exposition à la dernière minute, sans être vendue. La vente n’a eu lieu, en fait, qu’après la mort de Lumague (1641), lorsque M. de la Vrillière en a fait l’acquisition, modifiant ainsi le thème de sa collection pour passer des scènes "stoïques" à des scènes plus féminines. Stéphane Loire attribue Sainte Cécile (R.F. 3828) à Giovanni Andrea Sirani. Mais, même d’après la photographie assez médiocre, je crois que l’on peut discerner la délicatesse de Guido Reni dans le traitement de la bouche et la subtilité des ombres aux alentours du nez. Maintenant que la toile est nettoyée, je pense que l’attribution à Reni sera évidente. Il range la Lapidation de saint Étienne (inv. 203) parmi les œuvres d’Annibale Carrache et élucide l’histoire complexe du tableau. Mais il n’apporte aucun élément nouveau. Il est impossible de développer les raisons pour lesquelles cette œuvre est d’Antonio Carracci, peut-être l’élève le plus apprécié du maître, mais j’ai longuement évoqué cette question par ailleurs (Classicismo e natura, n° 9, Rome, 1996). Stéphane Loire donne aussi 1583 comme date de naissance d’Antonio, ce qui n’est nullement assuré. Enfin, il attribue la Mort d’Absalon à G.B. Viola (inv. 189), mais Clovis Withfield a récemment proposé Antonio Carracci, en nous invitant à reconsidérer les différentes techniques de paysage pratiquées par le Dominiquin, Viola, Bonzi et Antonio dans le cadre de l’atelier romain d’Annibale (Classicismo e natura, 1996, p 16). Richard Spear s’en tient à une conception restreinte de l’atelier, et l’attribution de Stéphane Loire reste limitée par cet horizon artificiellement restreint. Viola est incapable de peindre les beaux paysages de cette œuvre, alors que l’attribution à Antonio – également soutenue par Sir Denis Mahon – relance la discussion sur ce type d’œuvres. Les personnages, un peu faibles, sont toutefois plus solides, au sens "annibalesque" du terme, que ceux des œuvres généralement attribuées à Viola.

Stéphane Loire, Musée du Louvre : école italienne, XVIIe siècle, I. Bologne (Réunion des musées nationaux), 482 p., 335 ill. n/b, 14 ill. couleurs, 450 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°43 du 12 septembre 1997, avec le titre suivant : Stéphane Loire : « Musée du Louvre : école italienne, XVIIe siècle, I »

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