L’affaire des dessins pillés rebondit

Huit feuilles volées en 1943 vont réintégrer le Musée de Brême

Le Journal des Arts

Le 26 septembre 1997 - 449 mots

Après six mois d’enquête, dix dessins de maîtres viennent d’être récupérés à New York. Un Japonais qui avait essayé de les vendre à des agents secrets, dont un agent des douanes américaines, a été arrêté et inculpé de recel et de vente frauduleuse. Huit des dessins appartiennent à la précieuse collection de la Kunstverein de Brême, pillée par l’Armée rouge à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cette saisie, la plus importante réalisée à ce jour, ajoute un nouveau chapitre à une histoire déjà mouvementée.

NEW YORK (de notre correspondant). En avril, Masatsugu Koga se présentait au bureau de l’attaché culturel de l’ambassade d’Allemagne à Tokyo avec dix dessins, estimés environ dix millions de dollars, dont Le Bain des femmes d’Albrecht Dürer (six millions de dollars) et la Femme debout, les mains levées de Rembrandt. Prétendant que les dessins appartenaient à sa famille, il proposait de les vendre douze millions de dollars avant de réduire son prix de moitié. Les fonctionnaires allemands ayant identifié huit des œuvres comme venant de la Kunsthalle de Brême, il proposa alors que l’affaire soit finalement traitée à New York. En 1943, la Kunstverein de Brême avait envoyé les dessins de ses collections au château de Karnzow, au sud de Berlin, afin de les mettre à l’abri. Deux ans plus tard, les troupes russes trouvaient, dans les caves du château, les précieuses feuilles et pillaient des milliers d’entre elles, avant que la Commission de récupération de l’Armée rouge ait pu enregistrer tout le stock.

Dessins "acquis" par le KGB
En 1989, l’architecte russe Victor Baldin, aujourd’hui décédé, se rendait en Allemagne pour informer la direction de la Kunst­verein de Brême que plusieurs centaines de dessins de la collection étaient entreposés en Union soviétique. Capitaine dans l’unité qui avait découvert les œuvres en 1945, il avait personnellement dérobé 362 dessins et deux tableaux. Après la guerre, il fit don de son butin au Musée d’archi­­tecture de Shchusev, où les œuvres se trouvent toujours. Un autre vétéran russe a restitué une centaine de dessins, qui ne sont jamais allés plus loin que l’ambassade d’Alle­magne à Moscou. D’autres en­sembles de pièces en provenance de Brême se trouvent au Musée Pouchkine et dans des collections privées. Les dessins saisis en possession de Masatsugu Koga venaient du Musée national de Bakou, en Azerbaïdjan. Alors que celui-ci avait annoncé une exposition d’œuvres provenant du Musée de Brême, prétendument "acquises" par le KGB en 1947, Interpol reçut, en juillet 1993, un avis selon lequel douze de ces dessins avaient été volés. Les Allemands en ayant demandé la restitution, chacun crut alors à une opération commanditée par Bakou. Jusqu’en avril dernier, lorsque Masatsugu Koga s’est présenté à l’ambassade d’Allemagne à Tokyo...

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°44 du 26 septembre 1997, avec le titre suivant : L’affaire des dessins pillés rebondit

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