Grenoble : le Cargo et son double

Le projet d’Antoine Stinco

Le Journal des Arts

Le 5 décembre 1997 - 493 mots

Auteur de la restructuration de la Galerie nationale d’art contemporain du Jeu de Paume, des kiosques du Jardin des Tuileries ainsi que de l’aménagement (en cours de réalisation) de l’École du Louvre et de l’aile de Flore du Musée, Antoine Stinco est cette fois-ci chargé de la reconfiguration d’un édifice contemporain à vocation culturelle. Lauréat du concours organisé pour la rénovation et l’extension du célèbre Cargo de Grenoble, conçu à la fin des années soixante, l’architecte développe un projet nuancé qui corrige autant qu’il renouvelle le \"brutalisme\" moderniste de l’ancien édifice.

GRENOBLE - Édifiée par l’architecte André Wogensky, ancien élève de Le Corbusier, et inaugurée par André Malraux à l’occasion des Jeux olympiques d’hiver en 1968, l’ancienne Maison de la Culture de Grenoble, mieux connue sous le nom de “Cargo”, avait besoin d’une sérieuse rénovation. Inspirée par une vision généreuse mais quelque peu utopique de l’action culturelle, sa conception architecturale s’avérait en décalage avec les nouveaux objectifs programmatiques du centre, formulés au cours des années quatre-vingt pour revaloriser la création artistique. En préalable à l’organisation du concours remporté par Antoine Stinco en septembre, une étude de programmation lancée au début des années quatre-vingt dix par Roger Caracache, l’actuel directeur du Cargo, avait préconisé une reconfiguration générale de l’ancien bâtiment afin de permettre la mise en place d’un projet pluridisciplinaire centré autour des “arts de la scène” – théâtre, danse, mu­sique –, en particulier par la création d’une véritable salle de concert. Le problème était rendu d’autant plus complexe que l’édifice, implanté à la lisière du vieux Grenoble, souffrait d’un déficit de lisibilité urbaine.

Le grand mérite du projet d’Antoine Stinco est d’avoir adopté un parti tout en nuances qui, s’il peut paraître au premier abord manquer de “souffle”, s’avère répondre correctement à tous les problèmes posés par une telle rénovation.

Jouer du "contrepoint"
Plutôt que tenter de rivaliser avec l’édifice d’origine, Stinco a préféré jouer du “contrepoint” en proposant une extension dont la volumétrie fragmentée, abritant les salles créées, vient habilement compléter la massivité du projet de Wogensky. N’inter­venant quasiment pas sur l’aspect extérieur du bâtiment – exception faite de deux passerelles menant à l’extension et de la création d’un emmarchement monumental venant signaler la nouvelle entrée –, il établit de cette façon un dialogue entre l’“ancien” et le “nouveau” Cargo, dont la complexité élémentaire vient enrichir l’environnement urbain. À l’intérieur, outre la création, dans l’ancien édifice, d’une salle de concert de neuf cents places en remplacement de l’ancien “théâtre mobile” (avec spectateurs au centre et scène en périphérie !) et la rénovation des autres espaces, Stinco a prolongé la logique de son parti en organisant, dans l’extension, les salles nouvelles autour d’une vaste cour intérieure, dont l’“urbanité” – qui n’est pas sans rappeler, toutes proportions gardées, celle déployée par Port­zamparc à la Cité de la Musique – devrait offrir un meilleur confort d’utilisation à ses utilisateurs quotidiens. À condition toutefois que ceux-ci acceptent d’être patients : l’inauguration est prévue pour fin 2000.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°49 du 5 décembre 1997, avec le titre suivant : Grenoble : le Cargo et son double

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