De Paris à New York

Deux galeries françaises s’exportent outre-Atlantique

Le Journal des Arts

Le 3 janvier 1998 - 628 mots

Antoine Laurentin, en novembre et décembre, puis Bernard Blondeel, en janvier et février, ont décidé de franchir l’Atlantique pour exposer l’un ses tableaux, l’autre ses tapisseries dans deux galeries new-yorkaises. Centré sur l’œuvre d’un artiste pour le premier ou sélection de ses plus belles pièces pour le second, ces partenariats ont permis aux marchands parisiens de montrer aux collectionneurs américains des œuvres représentatives de leurs spécialités respectives. Ces expositions temporaires leur ont également donné l’occasion de rencontrer de nouveaux clients qui n’auraient pas fait le voyage jusqu’à Paris.

PARIS - “Mon travail de galeriste est de faire redécouvrir des artistes oubliés,” explique Antoine Laurentin, dont la galerie est installée dans le deuxième arrondissement de Paris. Du 19 novembre au 19 décembre, il a présenté une rétrospective de l’œuvre du peintre romantique Paul Huet (1803-1869). La raison de son choix : “Proche d’Eugène Delacroix, dont il a fait l’oraison funèbre, cet artiste n’a pas bénéficié d’une belle exposition depuis plusieurs années”.

Ami intime de Richard Parkes Bonington, Huet était même tombé dans l’oubli, alors qu’il a bénéficié tout au long de sa vie d’un succès sans faille. Un peintre dont “le roi, puis l’empereur, ont acheté plusieurs tableaux de salon” ne pouvait en effet qu’intéresser ce marchand spécialisé dans les dessins et tableaux du XIXe siècle et qui s’est fixé pour objectif de “faire apprécier cette période aux particuliers”. Antoine Laurentin a donc rassemblé trente-cinq œuvres, dans une gamme de prix allant de 15 000 à 200 000 francs.

L’originalité de la démarche réside dans le lieu d’exposition, puisqu’il a choisi de présenter les paysages en plein air “de cet artiste qui a peint à contre-courant de l’école néoclassique” non pas au 65 de la rue Sainte-Anne, mais dans la galerie new-yorkaise de Bob Haboldt. “Même si quelques autres marchands ont déjà développé des partenariat de ce type, en ce qui me concer­ne, c’est une pre­mière”, déclare-t-il.

Et ce galeriste, qui “participe aux salons des beaux-arts et du dessin, ainsi qu’à la Biennale des antiquaires de Paris, mais plus à l’Art Fair ni au Works of paper, faute de temps”, entend bien s’attaquer ainsi au marché américain. Avec une vingtaine d’huiles sur toile et une quinzaine d’aquarelles, “toutes dans le goût américain”, il a réussi son pari de séduire de nouveaux collectionneurs.

Le triomphe de la Renommée
Pour des raisons similaires, les antiquaires de la rue de Lille Bernard Blondeel et Armand Deroyan présenteront, du 27 janvier au 21 février, une douzaine de leurs tapisseries les plus prestigieuses dans la nouvelle galerie de Tony et Loïs Blumka. Ces marchands new-yorkais, spécialisés en objets d’art du Moyen Âge et de la Renaissance, ont en effet “invité” les deux marchands européens dans leur nouvel espace, du 209 East 72th Street, “ouvert à deux pas de chez Sotheby’s”.

Trois œuvres d’exception figurent parmi ces pièces flamandes des XVe et XVIe siècles. Proposée à plusieurs millions de francs, Les eunuques Bightan et Tereh devant Esther et Assuérus, tissée à Bruxelles vers 1520, est la tapisserie la plus chère, avec la paire de Millefleurs de Bruges représentant des scènes de la vie d’Abraham, exécutée entre 1525 et 1550. Elles constitueront le clou de cette exposition, avec Le triomphe de la Renommée (1,8 million de francs), tissée à Bruxelles entre 1500 et 1504.

Une autre Millefleurs avec une scène de crucifixion, réalisée entre 1525 et 1550, côtoiera deux tapisseries, peut-être tissées à Tournai : la plus ancienne de la galerie, l’Érudit (249 x 120 cm), qui a été réalisée entre 1450 et 1475, à 600 000 francs ; une allégorie de la Guerre de Troie (207 x 210 cm), datant de la première moitié du XVIe siècle, à 750 000 francs. L’occasion pour les collectionneurs américains d’apprécier une spécialité européenne dans un cadre des plus appropriés.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°51 du 3 janvier 1998, avec le titre suivant : De Paris à New York

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