La Biennale au plus mal

Fermeture prématurée à Johannesburg

Le Journal des Arts

Le 3 janvier 1998 - 494 mots

La seconde Biennale d’art contemporain de Johannesburg a fermé ses portes avec un mois d’avance, en raison de problèmes financiers occasionnés par une fréquentation décevante, ce que démentent les autorités municipales. Les organisateurs avaient convié quelque cent soixante artistes de soixante pays, dont trente-cinq d’Afrique du Sud. La manifestation, prévue du 12 octobre 1997 au 18 janvier 1998, se tenait dans quatre lieux principaux, les organisateurs espérant voir affluer 100 000 visiteurs et doubler ainsi la fréquentation de la première Biennale.

JOHANNESBURG - La première Biennale de Johannesburg, en 1995, avait été jugée par certains comme insuffisamment orientée vers l’art africain. L’édition 1997 s’est en revanche construite autour du titre général de “Routes du commerce : histoire, géographie et culture”. Les anciennes voies commerciales des épices, de l’or et des esclaves d’Afrique et d’Orient vers l’Europe ont inspiré le directeur artistique, le New-Yorkais d’origine nigériane Okwui Enwezor. Le choix du commissaire ne faisait d’ailleurs pas l’unanimité, et beaucoup auraient préféré un Sud-Africain.

La municipalité de Johannesburg avait alloué un budget de trois millions de rands (3 681 000 francs), dont 400 000 ont été versés à vingt-cinq expositions parallèles. Le secteur privé, les ambassades étrangères et diverses sources ont apporté quelques millions supplémentaires. Malheu­reusement, l’estimation du nombre de visiteurs attendus était trop optimiste. À la fin du mois de novembre, seules 30 000 entrées étaient comptabilisées, sans compter les groupes scolaires. À court d’argent, la municipalité a décidé de fermer subi­tement l’exposition, sans consulter les sponsors privés, ni les organisateurs de la Biennale, ni même Okwui Enwezor, depuis longtemps rentré à New York. Elle a néanmoins décidé d’accorder un bref sursis, le temps pour les organisateurs de trouver un financement d’urgence et d’avertir artistes et commissaires. Selon Bongi Dhlomo, directeur de l’Africus Institute qui gère de la Biennale, l’attitude de la municipalité porte un tort considérable aux prochaines manifestations, surtout vis-à-vis de l’étranger : “Si l’on peut fermer une manifestation internationale comme celle-ci, cela signifie que l’on sacrifiera l’art au moindre prétexte. On n’en ferait sûrement pas autant pour une manifestation sportive !”

Les sponsors privés sont évidemment furieux de cette décision. Plus de 160 journalistes internationaux et 80 correspondants étrangers ont assisté à l’ouverture de l’exposition. La couverture médiatique correspondrait à un équivalent publicitaire de 15,6 millions de rands (19 millions de francs). À mille six cents kilomètres au sud, les événements organisés dans la ville du Cap en liaison avec la Biennale continueront comme prévu jusqu’au 18 janvier. Victor Modise, responsable culturel du Metro Council de Johannesburg, reste cependant optimiste quant à la tenue d’une troisième Biennale en 1999. Elle constituera, selon lui, un événement clé coïncidant – à la veille du nouveau millénaire – avec la seconde élection démocratique dans le pays et les Jeux Africains qui se dérouleront à Johannesburg. La question du financement reste néanmoins problématique. Dans les milieux artistiques locaux, le pessimisme est de rigueur : tout semble malheureusement indiquer que la Biennale de 1997 sera la dernière.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°51 du 3 janvier 1998, avec le titre suivant : La Biennale au plus mal

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