Esquisses

Les jardins secrets de Granet

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 28 avril 2009 - 512 mots

L’Académie de France à Rome lève le voile sur un pan intime de la production romaine et versaillaise du peintre.

ROME - Il serait dommage de voir l’exposition « L’Italie et mourir » (lire ci-dessus) sans avoir fait un saut à la Villa Médicis pour y découvrir la réjouissante exposition consacrée à l’un des célèbres alumni de l’Académie de France à Rome, François-Marius Granet (1775-1849). Concentrée sur les esquisses en plein air réalisées par le peintre à ses heures d’intimité, « Granet, de Rome à Paris, le plein air romantique » a valeur d’addendum à la rétrospective proposée par le Musée Granet d’Aix-en-Provence il y a moins d’un an. Le musée aixois est, du reste, le parrain bienfaiteur de cette exposition : la quasi-totalité des œuvres prêtées à Rome proviennent de ses collections.
Comme les premières salles du parcours viennent le rappeler, Granet est, dans les livres, un élève studieux devenu peintre d’Histoire et surnommé par la critique « le peintre des Capucins ». Un artiste officiel un peu ennuyeux s’appliquant à concevoir des compositions sagement équilibrées (Le Chœur des Capucins de l’église de la piazza Barberini à Rome), à créer des atmosphères silencieuses (L’école des sœurs) et à rendre hommage à ses maîtres (La Mort de Poussin). Derrière ce travail académique bien fait, se cache pourtant un Granet amoureux de la nature, un flâneur inspiré par la lumière de la campagne romaine, que la commissaire Anna Ottavi Cavina n’hésite pas à hisser au même rang que Poussin et Cézanne. En témoignent une centaine de petites études saisies sur le motif, d’abord à Rome ou dans ses environs (1802-1824), puis en France, à Paris et surtout dans le parc de Versailles (1824-1849), où Granet fut nommé conservateur du Musée historique. Contraint à une spontanéité imposée par la technique de l’huile sur papier, et plus tard l’aquarelle, le geste est aussi rapide que la touche est légère. Nuages de pluie, pins se détachant de l’horizon en contre-jour, la pièce d’eau des Suisses à Versailles sous la brume… Granet n’est pas dans l’anecdote, mais dans le ressenti – dans la plus pure tradition romantique. Astucieuse, la scénographie a su relever avec une simplicité désarmante le défi de présenter ces petites études, au format plus que modeste, dans de vastes vestibules en pente ascendante. Regroupées par dizaine, presque à touche-touche, les images échappent à la noyade et vont jusqu’à évoquer des idées jetées ça et là, par poignées, au même rythme qu’il a fallu au peintre pour les saisir et ainsi dépasser les frontières imposées par la discipline académique.

GRANET. ROME ET PARIS, LA NATURE ROMANTIQUE, jusqu’au 24 mai, Académie de France à Rome, Villa Médicis, 1, viale Trinità dei Monti, Rome, Italie, tél. 39 06 67 61 1, www.villamedici.it, tlj sauf lundi 11h-19h. Catalogue, éd. Electa, Milan, 128 p., 120 ill. couleurs, 30 euros en librairie, 25 euros sur place, ISBN 9-788837-070724

GRANET
Commissariat : Anna Ottani Cavina, historienne de l’art, avec la collaboration de Marc Bayard et Bernard Telay
Œuvres : près de 120, dont la quasi-intégralité provient du Musée Granet, à Aix-en-Provence

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°302 du 2 mai 2009, avec le titre suivant : Les jardins secrets de Granet

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