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Hommage à Daniel Arasse

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 31 mars 2009 - 331 mots

Parmi notre sélection d’ouvrages d’histoire de l’art qui ont marqué ces quinze dernières années, un auteur occupe une place à part.

Disparu en 2003, à l’âge de 59 ans, Daniel Arasse s’était imposé comme un des plus grands spécialistes de la Renaissance italienne avec de nombreux ouvrages de référence portant sur le sujet : L’Homme en perspective. Les primitifs d’Italie et L’Homme en jeu. Génies de la Renaissance italienne (Genève, Famot, 1978 et 1980 ; Paris, rééd. Hazan, 2008) ; Léonard de Vinci. Le rythme du monde (Hazan, 1997) ; L’Annonciation italienne. Une histoire de perspective (Hazan, 1999)… Des études dans lesquelles l’auteur milite pour une analyse du visible plutôt qu’il ne soumet l’œuvre à cette « érudition livresque ». C’est en ces mêmes termes qu’il s’exprimait, au cours d’un entretien publié dans ces colonnes (1) à l’occasion de l’exposition « Botticelli » au Musée du Luxembourg en 2003 – dont il fut l’un des commissaires. Cette approche « beaucoup plus visuelle » de l’art est au centre des ouvrages Le Détail. Pour une histoire rapprochée de la peinture et Le Sujet dans le tableau. Essais d’iconographie analytique (Paris, Flammarion, 1992 et 1997). Sans oublier On n’y voit rien. Descriptions (Paris, Denoël, 2000, et rééd. chez Folio Poche, 2002), l’un de ses derniers textes où l’on retrouve son écriture et son raisonnement singulier, capable de réconcilier grand public et spécialistes, mêlant la passion à l’érudition. Élève de Chastel, enseignant à la Sorbonne (Paris-I et Paris-IV) de 1969 à 1993, Daniel Arasse avait ensuite rejoint l’École des hautes études en sciences sociales. Particulièrement sensible à la photographie, l’historien de l’art portait un regard attentif sur la création contemporaine, comme en témoignent sa monographie consacrée à Anselm Kiefer (Éditions du Regard, 2001) ou son essai décryptant la série « Morgue » du photographe américain Andres Serrano. « Je pense que l’art contemporain est aussi bon et intéressant que l’art classique », disait-il.

(1) lire le JdA no 178, 10 octobre 2003, p. 5.

Svetlana Alpers|L’Art de dépeindre. La peinture hollandaise au XVIIe siècle, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », 1990. L’auteure étudie la « culture visuelle » des Hollandais, qu’elle oppose à l’importance que revêt pour les Italiens le contenu textuel, la référence à la mythologie ou à l’iconographie chrétienne.

Thomas Crow|L’Atelier de David. Émulation et Révolution, Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », 1995. Loin d’être un simple espace de production et de formation, l’atelier est le lieu où se révèlent les enjeux d’une époque « en rupture », explique Crow. Les idéaux révolutionnaires et la fascination pour une Antiquité vertueuse déterminent une « esthétique » partagée avec David par Drouais, Girodet ou Gérard.

Dario Gamboni|The Destruction of Art. Iconoclasm and Vandalism since the French Revolution, Londres, Reaktion Books, 1997. Ce livre traite d’un aspect essentiel de la vie des images : l’iconoclasme, et sa forme moins organisée, le vandalisme, témoins de l’attraction (magique) qu’exercent les œuvres d’art sur les hommes. On attend avec impatience l’édition française…

Hans Belting|Image et culte. Une histoire de l’art avant l’époque de l’art, Paris, Les Éditions du Cerf, 1998. Un « classique » de l’histoire de l’art de ces quinze dernières années : Belting y examine le statut des images liées au culte (dans le monde chrétien) puis leur transformation en « œuvres d’art ».

Roland Recht|Le croire et le voir. L’art des cathédrales, XIIe-XVe siècle, Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », 1999. En retraçant l’histoire des cathédrales, l’auteur montre comment, de l’architecture à la statuaire, du vitrail à la peinture, l’édifice gothique a été entièrement conçu pour être vu, devenant le témoin privilégié de l’évolution du regard et du culte chrétien.

Yve-Alain Bois|Matisse et Picasso, Paris, Flammarion, 1999. Après les études nombreuses sur Picasso et sur Braque, il fallait aborder la confrontation de ces deux figures centrales de l’art du XXe siècle, si opposées, mais dont l’auteur montre ce qu’elles se doivent réciproquement.

L’Architecture moderne en France (sous la dir. de Gérard Monnier), 3 vol., Paris, éd. Picard, 1999-2000. L’architecture moderne, dans ses aspects sociaux, urbanistiques et esthétiques, est ici analysée avec rigueur.

Simon Schama|Le Paysage et la Mémoire, Paris, Seuil, 1999. Avec un texte divisé en trois parties consacrées respectivement au bois, à l’eau et au roc, Schama nous entraîne dans les récits mythiques et toutes les représentations qui ont donné forme au paysage, à travers les sédimentations de l’histoire et de l’acte poétique.

Richard Krautheimer| Rome, portrait d’une ville 312-1308, Paris, Le livre de poche, coll. « Références », 1999. Il s’agit d’un classique de l’histoire de l’art dont la traduction française a été l’occasion d’une remise à jour de la bibliographie.

Emmanuel Pernoud| L’Invention du dessin d’enfant en France, à l’aube des avant-gardes, Paris, Hazan, 2001. On a beaucoup écrit depuis près de quarante ans sur le « primitivisme » et son influence sur l’art moderne. Pernoud aborde ici un sujet quasi inédit qui modifie notre conception de l’histoire de l’art du XXe siècle.

Guido Beltramini et Antonio Padoan|Andrea Palladio, l’œuvre architecturale, Paris, Flammarion, 2001. Un ouvrage sur l’un des plus grands architectes classiques, qui sut réinventer l’architecture antique.

Cesare Brandi|Théorie de la restauration, Paris, coéd. Institut national du Patrimoine/Éditions du patrimoine, 2001. Texte de référence signé d’un historien de l’art italien encore trop peu connu en France, l’ouvrage mêle la théorie de l’art, l’esthétique et une méditation sur la survie des œuvres dont nous avons le plus grand besoin.

Guillaume Glorieux|À l’Enseigne de Gersaint. Edmond-François Gersaint, marchand d’art sur le pont Notre-Dame (1694-1750), Paris, Champ Vallon, 2002. La finesse des analyses de l’auteur et le portrait qu’il dégage peu à peu de ce marchand célèbre sont un modèle de monographie historique.

Aline Magnien|La Nature et l’Antique, la chair et le contour. Essai sur la sculpture française du XVIIIe siècle, Oxford, Voltaire Foundation, 2004. Les livres sur la sculpture sont rares. Magnien aborde ses relations inattendues avec les sciences : la sculpture est aussi, au XVIIIe siècle, une voie d’accès à la connaissance, de l’Antique et du monde.

Conférences de l’Académie royale de peinture et de sculpture (sous la dir. de Christian Michel et Jacqueline Lichtenstein), 2 premiers tomes (1648-1681), Paris, École nationale supérieure des beaux-arts, 2006. Ces conférences ne sont connues que sous la forme d’anthologies. Elles seront dorénavant disponibles pour les chercheurs et apparaîtront plus nettement comme des textes incontournables de l’histoire de l’art.

John Gage|Couleur et culture. Usages et significations de la couleur de l’Antiquité à l’abstraction, Paris, Thames & Hudson, 2008. Cette somme remarquable aborde tous les aspects physiologiques, historiques et esthétiques de la couleur.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°300 du 3 avril 2009, avec le titre suivant : Hommage à Daniel Arasse

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