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Affrontements à Berlin

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 3 mars 2009 - 537 mots

Les projets de Kunsthalle se multiplient dans la capitale de l’Allemagne.

BERLIN - Véritable serpent de mer, l’idée d’une Kunsthalle à Berlin anime régulièrement les débats Outre-Rhin. Depuis plusieurs mois, elle revient sur le tapis de manière rocambolesque avec trois projets concurrents.
Une Kunsthalle a longtemps existé dans l’ex-Berlin Ouest. Souffrant d’une programmation datée, de plus en plus déconnectée des débats esthétiques ambiants, celle-ci a fermé ses portes en 1994. La perspective d’une nouvelle Kusthalle a resurgi à la suite d’une exposition organisée en décembre 2005 dans l’ancien Palais de la République aujourd’hui détruit. L’artiste Coco Kühn et la curatrice Constanze Kleiner avaient alors invité trente-six artistes pour une exposition de onze jours baptisée « 36x27x10 ». Les duettistes trouvent alors un mécène, Dieter Rosenkrantz, lequel finance à hauteur de 1 million d’euros la construction d’un bâtiment temporaire. Inauguré en décembre dernier sur Schlossplatz, ce cube est gainé d’une membrane bleue traversée d’un nuage blanc stylisé, conçue par l’artiste Gerwald Rockenschaub. Mais la Temporäre Kunsthalle est, comme son nom l’indique, provisoire, et devra fermer ses portes en août 2010. « Nous ne voulons pas devenir une Kunsthalle permanente. Notre idée serait de bouger la structure dans d’autres capitales, vers l’Est. Nous sommes en discussions avec Moscou et Istanbul », indique Thomas Eller, codirecteur du lieu.

Projets privés
Aussi, d’autres plans à vocation plus pérenne pointent-ils de toutes parts. Directeur du Künstlerhaus Bethanien, Christoph Tannert voudrait lui réhabiliter un ancien marché aux fleurs de 6 000 m2 au Sud de Kreuzberg. « La Kunsthalle temporaire n’est qu’une première étape. C’est un projet privé soutenu par de l’argent privé. D’un point de vue social, c’est Kreuzberg qui serait le district le plus intéressant pour une Kunsthalle publique », insiste-t-il. Ce dernier avait déjà avancé ses pions en organisant du 31 mai au 1er juin un week-end artistique dans le bâtiment. Pour convaincre la municipalité, celui-ci compte beaucoup sur le poids politique d’Alice Ströver, membre du Parti écologique, et l’appui du Jewish Museum, désireux d’occuper la moitié de cet espace.
Mais le maire de Berlin, Klaus Wowereit, est lui aussi entré dans la danse avec le principe d’un nouveau bâtiment près du Hamburger Banhof. Pour cette construction, l’élu espérait rallier des investisseurs privés, notamment Nicolas Berggruen, fils du célèbre marchand Heinz Berggruen, lequel aurait pu y installer sa collection d’œuvres de Warhol et Koons. Néanmoins, en janvier dernier, celui-ci s’est retiré du projet.
Ce foisonnement d’initiatives convergentes ou divergentes laisse perplexe alors que Berlin dispose déjà d’un centre d’art expérimental réputé, le KW. « Le KW est un humus sur lequel des positions artistiques émergent et pourraient trouver leur place dans quinze ans dans une Kunsthalle, précise Gaby Horn, directrice de l’espace. Une Kunsthalle pourrait se concentrer sur des grandes expositions monographiques d’artistes établis. La discussion semble plutôt porter en ce moment sur la création d’un lieu pour les artistes vivant à Berlin. » Comme toutes les structures berlinoises, le KW, qui ne bénéficie que d’une subvention municipale de 500 000 euros soit 30 % de son budget, doit courir après l’argent. Les édiles devront dès lors veiller à ne pas dépouiller Pierre pour habiller Paul, abonder une nouvelle structure publique pour mieux léser l’existant, une pratique courante en Allemagne.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°298 du 6 mars 2009, avec le titre suivant : Affrontements à Berlin

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