Ovation pour le câble

Aux États-Unis, les arts ont leur chaîne

Le Journal des Arts

Le 30 janvier 1998 - 707 mots

En avril 1996 a été lancée sur le câble « Ovation », la première chaîne de télévision américaine exclusivement consacrée aux arts. Présente essentiellement à Washington DC et Los Angeles, elle pénètre progressivement d’autres réseaux, celui de New York notamment, et envisage de s’étendre à l’étranger. Un exemple à suivre.

ALEXANDRIE, VIRGINIE (de notre correspondant) - La chaîne Ovation touche aujourd’hui trois millions de foyers, situés en majorité dans les zones de Washington DC et de Los Angeles. Elle vient d’obtenir, par un contrat de cinq ans avec Time Warner Cable, son entrée en première partie de soirée sur le marché de New York City, ajoutant ainsi à ses fidèles des centaines de milliers de foyers à Manhattan et dans le Queens. Le directeur d’Ovation, J. Carter Brown, fait remarquer que New York est un terrain d’essai décisif pour un projet de télévision : “C’est une véritable percée qui va inévitablement en susciter d’autres.” Grâce à cet accord, Ovation diffusera ses émissions sur le marché new-yorkais en partageant le réseau à mi-temps, de 18 heures à 6 heures du matin, avec une chaîne pour enfants sans publicité. La programmation progressera jusqu’à vingt heures d’émissions quotidiennes, durée habituelle des programmes d’Ovation sur les autres réseaux. Si les New-Yorkais bénéficient à profusion d’événements et d’œuvres artistiques, les programmes culturels sont rares sur leur petit écran. Ce vide constitue un magnifique créneau pour le mélange de spectacles et de documentaires qu’Ovation propose sur le théâtre, la danse, l’opéra, le jazz, le rock, la musique classique, la littérature et les arts plastiques. Sont offerts au téléspectateur des pièces de théâtre, des concerts, des visites d’expositions, des portraits d’artistes et de personnalités du monde de l’art, ainsi que des informations sur les coulisses des manifestations culturelles et le programme du jour. Même si d’autres réseaux, comme PBS (Public Broadcasting Service), Bravo et A & E (Arts and Enter­tain­ment) proposent quelques rares émissions artistiques, il n’en existe aucune sur les arts plastiques. Pour sa part, J. Carter Brown, qui est égale­ment directeur honoraire de la National Gallery of Art de Washington, consacre presque un quart de ses programmes aux beaux-arts. “Les musées vont devenir un pôle d’attraction pour le public américain, prévoit-il, et je suis persuadé que cette audience va augmenter.” Ovation a déjà diffusé, pour n’en citer que quelques-uns, des documentaires sur Vermeer, Monet, Cézanne, Degas, Frida Kahlo, le Bauhaus, Joseph Cornell, l’Art dégénéré, Warhol, Rauschenberg, Hodgkin et la sculpture cambodgienne. Ses programmes sur les spectacles ont été remarqués et lui ont valu une nomination pour le prix “Cable ACE” de la National Academy of Cable Programming. Si Ovation a jusqu’ici acheté environ 80 % de ses programmes, elle envisage à l’avenir d’en créer ou d’en coproduire la moitié avec des groupes comme PBS, Arte, la BBC, des musées et autres organismes.

De gros investisseurs
Ovation a attiré de gros investisseurs tels que la New York Times Company, Time Warner Cable, J.P. Morgan, Howard Heinz En­dowment, et des personnalités isolées comme Agnes Gund, présidente du MoMA. Le public américain amateur d’émissions sur l’art est plus important que celui des événements sportifs et extrêmement intéressant sur le plan économique. Selon la chaîne, il se compose essentiellement d’adultes cultivés, âgés de 25 à 54 ans, dont 63 % de femmes, dans des foyers au revenu annuel de 60 000 dollars (360 000 francs) ou plus. Ce marché étant encore quasiment vierge, “Ovation n’a pas de vrai concurrent pour l’instant, déclare son président Harold E. Morse. Je m’attends néanmoins à en voir surgir dans les deux années qui viennent. Mais nous ferons tout pour rester le fer de lance dans ce domaine”. Pour l’instant, la rentabilité reste la priorité d’Ovation, et l’extension hors des frontières pourrait y contribuer. “S’il y a une entreprise d’envergure globale, c’est la nôtre”, ajoute Harold Morse, qui vient de négocier avec des groupes audiovisuels en Asie et Amérique du Sud pour diffuser dans ces pays. De son côté, J. Carter Brown vise l’Afrique du Sud et Israël : “L’Europe est déjà bien nantie, mais ce serait intéressant de coproduire des programmes avec elle”. Ovation envisage de doubler le nombre de ses spectateurs d’ici avril, en s’implantant sur des marchés aussi vastes qu’Atlanta, Philadelphie, le sud de la Floride et Chicago.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°53 du 30 janvier 1998, avec le titre suivant : Ovation pour le câble

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