Rupture

La Biennale de Lyon sans tête

David et Goliath

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 17 février 2009 - 584 mots

Catherine David ne sera pas la commissaire de la prochaine Biennale de Lyon prévue à l’automne. Si son projet artistique n’est pas à l’origine de ce divorce par consentement mutuel, Catherine David met en cause la surcharge de travail imposée par son poste de conservateur en chef à l’Inspection générale des Musées de France.

LYON - La nouvelle a fait l’effet d’un électrochoc : invitée en avril 2008 en tant que commissaire, Catherine David, conservateur en chef à l’Inspection générale des Musées de France, ne dirigera pas la Biennale de Lyon prévue du 16 septembre 2009 au 3 janvier 2010. « D’un commun accord », précisent les deux parties intéressées. Pourtant, Catherine David avait trouvé son articulation artistique autour des « trous noirs et complexités de la modernité », et des nouveaux territoires, avec notamment un volant mexicain. Pour Thierry Raspail, directeur artistique de la Biennale de Lyon, « il n’y avait pas de désaccord sur le projet artistique, mais Catherine était prise par un emploi du temps dur et lourd. J’ai senti début janvier qu’on n’y arriverait pas. » « La surcharge de travail que j’ai à l’Inspection aurait pu être négociable, mais je n’avais pas une maîtrise de mon agenda, indique pour sa part Catherine David. On m’avait promis que tout s’arrangerait, mais ça ne s’est pas arrangé du tout. » La Direction des Musées de France (DMF) n’aurait-elle pas été assez souple dans son autorisation de cumul ? « Je ne vois pas de quoi la DMF devrait se sentir fautive, rétorque Rodolphe Rapetti, adjoint à la directrice des Musées de France. La DMF considère que le commissariat extérieur est une bonne chose, je la pratique moi-même en préparant l’exposition « Odilon Redon » au Grand Palais en 2011. On avait discuté avec Catherine David des jours dont elle pouvait disposer pour la Biennale. Deux jours par semaine lui avaient été accordés. Nous lui avions juste demandé que ses activités extérieures ne portent pas préjudice à son travail à l’Inspection. Catherine David a pu réaliser tous les voyages nécessaires. On lui avait demandé qu’ils soient réalisés sur ses temps de congé. » La pratique du cumul est certes fréquente, plusieurs conservateurs de la DMF comme Denis Coutagne, Xavier Salmon ou Jean-Hubert Martin bénéficiant actuellement de cette opportunité. Mais il est impossible de comparer le travail sous flux tendu d’une Biennale concoctée en un an et demi, et pour laquelle des productions se révèlent nécessaires, et une exposition monographique dont l’organisation s’étire en général sur trois ans…
Le retrait de Catherine David est d’autant plus dommage que cette commissaire est l’une des rares personnalités françaises internationalement respectées. Connue pour son sérieux, elle aurait pu effacer le passif de la dernière édition de la Biennale. Bien que fragilisée, la manifestation n’est pas pour autant annulée. Difficile toutefois de concevoir un projet en à peine six mois. « Le retard pris dans la conception n’est pas catastrophique, on peut encore le rattraper, affirme Thierry Raspail. Je m’accorde quinze jours de réflexion. Il s’agira probablement d’un travail en équipe. » Qu’adviendra-t-il des productions lancées avec les artistes ? « Rien de démentiel n’avait été engagé, mais des artistes avaient commencé à travailler », confie Catherine David. Cet incident soulève plusieurs questions. Est-il bien sage d’attendre la fin d’une Biennale pour nommer un nouveau directeur artistique et construire un événement dans l’urgence ? Des personnalités de renom comme Catherine David doivent-elles rester cantonnées dans des postes administratifs et contraintes à un cumul difficile à gérer ?

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°297 du 20 février 2009, avec le titre suivant : La Biennale de Lyon sans tête

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