Faire grand bruit

La jeune génération sort de l’ombre à Tours

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 8 juillet 1998 - 508 mots

Après la Biennale de l’image à Paris, le CCC de Tours accueille pendant six mois la jeune génération : les travaux de quarante-deux artistes âgés d’une trentaine d’années y sont exposés en deux volets. Dans un centre d’art remodelé, les “Bruitsecrets�? de quatorze créateurs parmi les plus en vue ouvrent le bal.

TOURS - En pénétrant dans l’exposition, le bruit qui nous assaille n’a rien de secret, tant les artistes ont délibérément monté le son de leurs pièces respectives pour créer une ambiance sonore proche de la cacophonie. Arrivant de la gare toute proche, le visiteur n’est pas dépaysé puisqu’il est accueilli par la musique d’attente du service téléphonique de la SNCF, une installation sonore de Didier Courbot dont le titre est de bon augure : Nous allons être heureux.

“Bruitsecrets” se présente en effet comme une aventure collective rassemblant, dans un premier temps, quatorze artistes qui disposent déjà d’une certaine lisibilité. À partir du 3 octobre, vingt-huit autres créateurs élargiront encore le champ prospectif. L’objectif des trois commissaires de l’exposition – Alain Julien-Laferrière, directeur du CCC, et les deux jeunes critiques Céline Saraiva et Olivier Reneau – consiste à réunir pour la première fois la “génération montante”, c’est-à-dire des créateurs âgés en moyenne d’une trentaine d’années. Aussi les organisateurs ont-ils fait l’économie d’une thématique tirée par les cheveux qui chercherait à fédérer artificiellement des démarches autonomes. Chaque artiste est présenté pour lui-même. Néanmoins, quelques rapprochements s’opérent et des préoccupations communes apparaissent.

Un coup de projecteur
Le CCC a abondamment exposé la génération qui l’a immédiatement précédée, celle des Pierre Joseph, Philippe Parreno et consorts, formés dans les années quatre-vingt et adeptes d’un art gai, coloré, léger, un rien “fun”. Les participants de “Bruitsecrets” sont issus d’un tout autre monde. Plus rigoureux, ils s’attachent moins à la surface, tout en faisant déjà preuve, semble-t-il, d’une certaine maturité. En un mot, il est moins question ici de fantaisie.

Ainsi, à côté d’un monument mélaminé blanc de Mathieu Mercier, Matthieu Laurette expose Projection, Éliane Soleil, 10/06/98, une nouvelle rétroprojection dans laquelle l’artiste se fait notamment prédire l’avenir, tandis que Patrick Martinez propose un film d’animation étonnant. Au centre de l’exposition, Philippe Meste présente son Bateau de guerre, tout juste rendu par les autorités après sa saisie lors de son attaque du port de Toulon. Après Boris Achour, Stéphane Calais, Delphine Coindet, Serge Comte ou Guillaume Jamot, Malachi Farrell expose Chaises électriques, un son et lumières qui reste malheureusement dans le spectaculaire.

Même si l’espace du CCC n’a pas permis à certaines pièces de mieux respirer, faute de place, “Bruitsecrets” a le mérite de donner un coup de projecteur sur un ensemble de démarches significatives parmi les artistes français ou vivant en France nés à la fin des années soixante et au début des années soixante-dix. Il ne faudrait cependant pas s’arrêter en si bon chemin et présenter l’exposition au-delà de nos frontières.

BRUITSECRETS, jusqu’au 20 septembre ; seconde partie 3 octobre-3 janvier 1999, CCC, 53-55 rue Marcel-Tribut, 37000 Tours, tél. 02 47 66 50 00, tlj sauf lundi et mardi 15h-19h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°64 du 8 juillet 1998, avec le titre suivant : Faire grand bruit

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