Grand Palais

Un bon millésime

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 1 octobre 2008 - 676 mots

Organisée du 11 au 21 septembre, la Biennale des Antiquaires a affiché un commerce correct dans un contexte économique général plutôt difficile.

PARIS - La Biennale des Antiquaires a fait preuve cette année de panache. Tournant le dos au décor ennuyeux de la dernière édition, le salon a offert une circulation agréable et aérée, ponctuée d’espaces verts confortant l’idée de promenade. « La qualité des clients et du public a été exceptionnelle, sans comparaison avec la précédente, tout comme celle des services », vantait Dominique Lévy, codirectrice de la galerie L & M (New York), laquelle avait amené pour l’occasion un Rothko à 42 millions de dollars. Le marchand d’art d’Extrême-Orient Antoine Barrère (Paris) précisait toutefois que « les ventes étaient très difficiles à concrétiser, les négociations plus longues ». Il n’en a pas moins vendu un Bodhisattva du Japon au Musée Guimet. Sa consœur bruxelloise Gisèle Croës a affirmé, pour sa part, avoir réalisé sa meilleure Biennale depuis 1998.
Le commerce a connu de fait plusieurs vitesses selon les spécialités. Les Arts décoratifs des années 1950 s’en sont sortis haut la main. La galerie Jousse Entreprise (Paris) a cédé au Vitra Design Museum de Weil am Rhein (Allemagne) une chaise longue de Jean Prouvé réalisée pour la Villa Saint-Clair. Nouvelle recrue de la Biennale, Willy Huybrechts (Paris) a vendu en à peine quatre jours une vingtaine de meubles dans une gamme de 50 000 à 300 000 euros. Surfant sur des prix raisonnables, Yves Gastou (Paris) a aussi fait feu de tout bois avec le mobilier de Carlo Scarpa. Yves Macaux (Bruxelles), dont l’accrochage autour de la Sécession viennoise était l’un des plus réussis du salon, a vendu deux pièces avant la Biennale grâce au catalogue adressé à ses meilleurs clients, et huit autres meubles sur le salon. « Des gens qui achètent pour plusieurs millions d’euros dans l’année ne vont pas changer leur train de vie du jour au lendemain, même s’ils ont perdu 3 % à la Bourse, à moins d’être actionnaire de Merill Lynch », observait-il. Un sentiment que modulait Pierre Passebon (Paris) : « La plupart des décorateurs étaient là, mais je n’en ai pas vu se promenant avec un client pour acheter. Les Américains étaient très inquiets, pressentaient la faillite de Lehman Brothers dès le vernissage ». Le marchand n’en a pas moins cédé son ensemble de céramiques de Fausto Melotti à un Américain.

XXe siècle en force
Face à la prédominance du XXe siècle, le XVIIIe siècle a joué des coudes. La Maison Kraemer (Paris), qui participait pour la première fois au salon, a voulu donner un coup de jeune à sa présentation en optant pour deux cubes de verre, l’un de décor ancien, l’autre contemporain, contenant des meubles cousins germains. S’il n’y avait rien à redire sur la qualité des œuvres, l’arrangement laissait lui perplexe. Le Siècle des Lumières a néanmoins encore de beaux jours devant lui. Didier Aaron & Cie (Paris) a ainsi cédé une superbe paire de bougeoirs de Trapani pour un peu moins d’un million d’euros. Le secteur des tableaux anciens de la Biennale ne peut évidemment rivaliser avec celui de Maastricht faute d’une masse critique importante. Si Emmanuel Moatti (Paris) ou Maurizio Canesso (Paris) ont jugé les transactions juste « correctes », Konrad Bernheimer (Munich) a, lui, réussi à vendre quelques tableaux importants comme la Tarentelle de Jacques Sablet (environ 1 million d’euros), déjà présentée voilà deux ans à Maastricht.
Côté tableaux impressionnistes et modernes, la moisson n’a pas toujours été savoureuse, la galerie Brame & Lorenceau (Paris) ayant notamment déçu par son accrochage. Pour ce qui est de l’art d’après-guerre, le choix de haute volée de la consultante Daniella Luxembourg autour de l’art italien sortait du lot. Le regard était d’emblée capté par Nero Cretto, un superbe Alberto Burri de 1978, réservé bien avant la Biennale par un musée américain, et Uomo che si tocca il piede de Michelangelo Pistoletto. Hormis Pascal Lansberg (Paris), qui avait vendu un grand Soulages pour environ 2,5 millions d’euros, les transactions dans cette spécialité ont été plutôt tempérées.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°288 du 3 octobre 2008, avec le titre suivant : Un bon millésime

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