Inauguration

Rendez-vous au « Collegium »

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 17 septembre 2008 - 673 mots

Après cinq ans de restauration, le collège des Bernardins ouvre au public avec une programmation tournée vers l’art contemporain.

PARIS - Chef-d’œuvre de l’architecture gothique cistercienne, le collège des Bernardins renaît sous un jour nouveau et pour le moins surprenant puisqu’il se consacrera désormais à l’art contemporain. Aujourd’hui propriété de l’Église catholique de Paris, l’édifice a été fondé en 1247 (moins d’un demi-siècle après la création de la première université de France à Paris) et dédié à l’étude et à la recherche. Vendu comme bien national lors de la Révolution, il a accueilli successivement une prison, un entrepôt, une caserne de pompiers et enfin un internat pour l’École nationale de police. Au début des années 2000, le cardinal Jean-Marie Lustiger (décédé en 2007) souhaite y développer le projet d’« un lieu de dialogue intellectuel et spirituel » dédié à la « réflexion sur l’homme et son avenir ». Plus prosaïquement, l’opération, qui implique la restauration du monument historique et l’aménagement de nouvelles infrastructures, a coûté plus de 50 millions d’euros financés quasiment à parité par les pouvoirs publics (l’État, la Ville et la Région Ile-de-France), le diocèse de Paris et les partenaires mécènes.
Entièrement dégagée et restaurée, la grande nef s’offre au visiteur dans toute sa lumière. Sous les voûtes, quelques traces de polychromie demeurent comme un clin d’œil à son histoire. On peut y déplorer la présence d’un ensemble à vocation commerciale : une librairie-boutique et une cafétéria qui brisent la perspective et risquent de nuire à la magie du lieu. Pourtant conçu sobrement, le dispositif d’accueil n’est pas des plus heureux. En sous-sol, le cellier a été compartimenté en salles d’étude et de conférence à travers un jeu de grands panneaux de bois et verre. L’architecte en chef des Monuments historiques a pris le parti de restituer le toit dans ses dimensions médiévales, l’agrémentant de tuiles à l’aspect un peu trop flambant neuf. Aux étages, des salles de cours, de conférence, un studio d’enregistrement et un auditorium de 250 places accueilleront des séances de cinéma (1), des concerts de musique classique ou contemporaine, ainsi que des colloques sur des thèmes aussi divers que « Le sacré dans la publicité » ou « L’avenir du développement ». Ce, en relation avec la « chaire des Bernardins », pôle de recherche et d’étude scindé en cinq départements sur lequel le collège assoit sa légitimité scientifique.
Tournée vers l’art contemporain, la programmation des expositions est pilotée par un conseil d’orientation composé de dix personnalités, parmi lesquelles Bruno Racine, président de la Bibliothèque nationale de France ; Rémi Brague, historien du christianisme et professeur de philosophie à Paris-IV, ou Pierre Léna, astrophysicien au CNRS. Libres d’accès, les expositions devraient être financées par des opérations de mécénat. Une partie importante des équipes – comptant 22 salariés et 80 bénévoles – se consacre ainsi à cette activité de recherche de partenariats.
C’est l’artiste Claudio Parmiggiani qui inaugurera la nef avec des installations conçues pour l’occasion, grâce à la complicité de sa commissaire, Catherine Grenier, directrice de l’association de préfiguration du « Centre Pompidou-Alma ». Puis ce sera au tour de Gérard Titus-Carmel de présenter 160 œuvres inédites inspirées de la crucifixion du retable d’Issenheim. Avant de découvrir, l’été prochain, l’œuvre de deux jeunes créateurs, Hugues Rochette et Nathalie Brevet. Pour conclure l’année 2009, l’historien de l’art Éric de Chassey assurera le commissariat d’une exposition consacrée à « La Pesanteur et la Grâce » et qui réunira des artistes français et étrangers.
L’Église catholique de Paris se met ici au goût du jour. Associer patrimoine et création contemporaine – thème retenu cette année pour les Journées du patrimoine (2) – est un gage d’ouverture d’esprit mais aussi de bons chiffres de fréquentation.

(1) La Vie moderne, de Raymond Depardon et Claudine Nogaret, y sera projeté en avant-première.
(2) Lire le JdA no 286, 5 septembre 2008, p. 7.

Le Collège des Bernardins - 20, rue de Poissy, 75005 Paris, tél. 01 53 10 74 44, www.collegedesbernardins.fr.
Exposition « Claudio Parmiggiani » du 1er octobre 2008 au 31 janvier 2009.

COLLÈGE DES BERNARDINS

- Coût du projet : 50,8 millions d’euros (1,9 million pour l’acquisition des bâtiments ; 20,2 millions pour leur restauration ; 25,8 millions pour l’équipement et la création de nouvelles surfaces ; 2,9 millions pour le mobilier, matériel audiovisuel)
- Financement : 30 % subventions publiques ; 35 % diocèse de Paris ; 35 % mécénat
- Architectes : Hervé Baptiste, architecte en chef des Monuments historiques, et Jean-Michel Wilmotte, pour la partie contemporaine
- Budget de fonctionnement : 4 millions d’euros (dont 1 million pour la chaire des Bernardins)

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°287 du 19 septembre 2008, avec le titre suivant : Rendez-vous au « Collegium »

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