Bellange mi-ange, mi-bête

L’œuvre graphique du maniériste à Amsterdam

Le Journal des Arts

Le 28 août 1998 - 338 mots

De Bellange, grande figure lorraine du début du XVIIe siècle aux côtés de Callot, ne subsistent que quelques tableaux, 48 eaux-fortes et des dessins. Le Rijksmuseum a réuni, pour la première fois, l’ensemble de l’œuvre graphique de cet artiste étrange et mal connu, qui développe un maniérisme exacerbé très personnel.

AMSTERDAM - Peintre à la cour de Nancy de 1603 à 1616 – date où l’on perd sa trace –, Jacques Bellange a notamment réalisé un cycle de fresques au Palais ducal, des décors éphémères de fêtes, des tableaux de chevalet et des travaux sur papier. Sans doute son activité de dessinateur et de graveur était-elle secondaire, au regard des nombreuses entreprises menées pour la cour, mais son œuvre graphique n’en constitue pas moins l’ultime témoignage de son talent : ses peintures murales ont entièrement disparu et ses toiles n’ont guère connu un meilleur sort. Un Ange de l’Annonciation au Musée de Karlsruhe et une Lamentation au Musée historique lorrain donnent néanmoins un aperçu de ses recherches luministes et de ses coloris acides.

Le maniérisme de Bellange transparaît également dans ses eaux-fortes et ses dessins à la plume ou à la sanguine, réunis cet automne à Amsterdam. Les figures, étrangement allongées et contorsionnées, ont souvent une allure irréelle, même lorsqu’elles s’attachent à décrire des gueux ou des vielleurs à la Callot. La verve cruelle qui anime ces caractères offre un décalage déroutant avec l’extrême raffinement du trait et la subtilité des effets d’ombre et de lumière. Ceux-ci découpent les volumes en formes géométriques et organisent la composition, comme dans Les trois Marie au Sépulcre où un savant contre-jour amplifie l’étrangeté d’une perspective téléscopique.

Montée à partir d’une importante collection privée, que les fonds du Rijksmuseum et du Statens Museum de Copenhague viennent compléter, cette exposition constitue une occasion unique de découvrir ce fascinant mélange de préciosité et de perversité.

BELLANGE, UN GRAVEUR ORIGINAL

Jusqu’au 18 octobre, Rijksmuseum, Stadhouderskade 42, Amsterdam, tél. 31 20 673 21 21, tlj sauf 1er janvier 10h-17h. Catalogue en anglais 59,95 florins (environ 178 F).

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°65 du 28 août 1998, avec le titre suivant : Bellange mi-ange, mi-bête

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