BNP Arts à l’épreuve

Les collections seront dispersées à New York et Londres

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 23 octobre 1998 - 714 mots

Christie’s dispersera en trois temps, à New York les 18 novembre et 28-29 janvier, et à Londres le 16 décembre, les deux collections de tableaux et de dessins constituées entre 1989 et 1991 par le fonds d’investissement en œuvres d’art BNP Arts, filiale de la BNP. Ces placements réalisés au prix fort à une époque où le marché était florissant se révéleront-ils profitables ? Réponse dans quelques semaines.

PARIS. “Nous souhaitons que les œuvres se défendent par elles-mêmes”. Face aux attaques portant sur la qualité inégale des œuvres réunies par le fonds d’investissement BNP Arts, Jean-Pierre Blanc, directeur de la filiale, a choisi d’adopter un profil bas. Ce qui ne l’empêche pas de répondre pied à pied à certaines des critiques dont la filiale a fait l’objet. Pourquoi n’avoir pas choisi une maison de vente française pour disperser ces collections, s’interroge le collectionneur Richard Rodriguez. “Un appel d’offres a été lancé, auquel ont répondu deux groupes français et deux auctioneers. L’offre la plus intéressante était celle de Christie’s.” Pourquoi vendre à une période où le marché commence seulement à se redresser, alors que les collections ont été  formées à une époque où les prix étaient très élevés ? “Nous aurions préféré attendre encore un peu, mais l’indivision ne pouvait durer plus de dix ans”, explique Éric Turquin, l’un des trois experts français à avoir participé, aux côtés de Bruno de Bayser et Marc Blondeau, à la constitution de cette collection pour le compte de Finacor Art, la filiale spécialisée dans la gestion de collections d’art à laquelle la BNP avait fait appel.

Un placement de 125 millions de francs
Les deux collections ont été rassemblées entre 1989 et 1991, pour un montant total de 125 millions de francs. “Tradition française”, formée à partir de 1989, est composée de 28 tableaux et dessins français des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles, achetés grâce à une enveloppe de 75 millions de francs. Une Fantaisie égyptienne d’Hubert Robert, estimée 350-450 000 dollars (1,9-2,4 millions de francs), fait partie des œuvres les plus importantes. “C’est le summum de l’art d’Hubert Robert, déclare Éric Turquin. On ressent le choc vécu par le peintre face au gigantisme des Pyramides.” La collection comprend aussi une délicate sanguine sur papier de Jean-Baptiste Greuze, Tête de jeune fille (220-328 000 francs), une toile en grisaille de Louis Léopold Boilly, la Lettre ou l’Évanouissement (822 000-1,2 million de francs), et Quai Henri IV, Paris de Stanislas Lépine (1,3-1,9 million de francs). Quelques œuvres modernes s’inscrivent dans cet ensemble, parmi lesquelles une toile de Boudin pleine de fraîcheur, Le Havre, la Fête des régates (3,5-4,49 millions de francs), une aquarelle gouachée de Paul Cézanne, Pot de géranium (2,7-3,8 millions de francs), ou encore la Vue d’Ornans et son clocher par Gustave Courbet (4,3-6,5 millions de francs). “C’est un tableau d’une qualité remarquable, dans la grande tradition française des paysages de Claude Lorrain”, souligne Marc Blondeau. La seconde collection, rassemblée à partir de 1991 autour du thème du “cabinet italien”, est constituée d’une cinquantaine de dessins. “Notre choix s’est porté sur des œuvres de qualité, dotées d’une attribution solide, mais aussi sur des feuilles qui se raréfient sur le marché”, explique Bruno de Bayser. Parmi eux, un ensemble unique de vingt dessins de Federico Zuccaro (vers 1540-1609) acheté 2,5 millions de dollars chez Sotheby’s à New York en janvier 1990, (est. 10,9-16,4 millions de francs), une étude d’homme assis du Florentin Giambattista di Matteo (548-822 000 francs), mais aussi des feuilles dues à David, Oudry et Goya.

Un fonds de placement en œuvres d’art

BNP Arts a constitué ces deux collections dans une optique de diversification du patrimoine de ses clients. Elle a fait appel à Finacor, une autre filiale spécialisée dans la gestion de collections d’art, qui réunissait trois experts français (Bruno de Bayser, Marc Blondeau, Eric Turquin) chargés d’acheter des œuvres pour un budget donné. “Il s’agissait d’acquérir des œuvres en fonction de deux thèmes déterminés à l’avance – Tradition française et Cabinet italien – dans des secteurs qui n’étaient pas inflationnistes”?, explique Marc Blondeau. Les œuvres ont été achetées sous forme de parts indivises par des clients de la BNP, pour être dispersées au plus tard à la fin de l’année 1998. À cette date, le produit de la vente sera réparti entre les souscripteurs.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°69 du 23 octobre 1998, avec le titre suivant : BNP Arts à l’épreuve

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