Pour l’amour de l’antique

Archéologie et art asiatique s’affirment à Tefaf Bâle

Le Journal des Arts

Le 20 novembre 1998 - 599 mots

Pour sa quatrième édition, Tefaf Bâle, qui s’est tenue du 7 au 15 novembre, affiche un bilan satisfaisant, surtout en matière d’archéologie et d’art asiatique, affirmant sa prépondérance dans ce domaine. La Suisse et l’Allemagne, viviers de collectionneurs, fournissent la majorité de la clientèle.

BÂLE. Ce n’est pas de l’antique mais ça y ressemble. Pour se mettre au diapason de la foire, la galerie Piltzer a demandé de surprenantes pièces à Anne et Patrick Poirier : des fragments de sculptures monumentales en marbre suspendues par des chaînes à une structure métallique rouge. L’effet est garanti, la vente moins. Sans doute fallait-il ce coup d’éclat pour attirer l’attention dans une manifestation dominée par l’archéologie. Avec une quinzaine d’antiquaires spécialisés en antiquités classiques et égyptiennes, “c’est un rassemblement unique au monde”, souligne David Cahn (H.A.C. Kunst der Antike, Bâle), et “cela commence à se savoir”, note Didier Wormser (L’étoile d’Ishtar, Paris). De plus, toujours selon ce dernier, “les Suisses et les Allemands ont une culture plus classique”, ils s’intéressent donc plus naturellement à l’archéologie, “grecque et romaine surtout”. La preuve, des pièces importantes ont été rapidement vendues, tel ce remarquable buste d’Aphrodite d’époque romaine (Royal-Athena Galleries, New York), parti le soir du vernissage à 275 000 dollars (1,5 million de francs), ou encore un important buste d’Agrippine (H.A.C.). Par ailleurs, les exposants se sont plu à constater la venue de conservateurs de musées importants, comme le Metropolitan Museum de New York ou les musées égyptiens de Berlin et Munich, gage de crédibilité.
Si, comme l’affirme l’un des exposants, les collectionneurs d’archéologie sont également amateurs d’art primitif, les stands consacrés à l’art ethnographique et précolombien ont dû les ravir. Toutefois, Bernard de Grunne (Bruxelles), qui proposait de rares pièces australiennes, déplore la trop grande prudence des collectionneurs suisses. Nombre d’exposants soulignent en effet que ceux-ci hésitent longuement avant d’acheter une œuvre, a fortiori lorsqu’il s’agit d’un nouveau venu. Ainsi, de nombreuses ventes ne se concrétisent que le dernier week-end. En matière d’art asiatique, la galerie Vanderven & Vanderven Oriental Art (s’Hertogenbosch), qui a vendu un ensemble de 18 figures funéraires chinoises en terre cuite d’époque Han, exposait quelques trésors plus secrets, tels ces petits tulipiers en bleu et blanc imitant la céramique de Delft, elle-même inspiré des productions chinoises. À l’exemple de ces vases, Tefaf Bâle organise la rencontre de plusieurs sphères de l’art, équilibrant le domaine archéologique par une forte section consacrée au mobilier et aux objets d’art européens.

Modernité marginale
Entre ces deux pôles majeurs, les quelques exposants de la section art moderne semblaient un peu isolés. À la galerie Art Focus (Zurich), si on observe un niveau d’activité comparable à celui de l’an dernier, on regrette qu’aussi peu d’“art classique du XXe siècle” soit proposé, observant que plusieurs exposants initialement annoncés avaient fait défection. Pourtant, la galerie Delaive (Amsterdam), avec un bel ensemble d’huiles sur papier de Sam Francis, et la Oriol Galeria d’Art (Barcelone), qui présentait des peintres espagnols, de Picasso à Barceló, avaient tenté leur chance. Non sans succès pour cette dernière, puisque le soir du vernissage, elle avait vendu la Brigitte Bardot d’Antonio Saura pour un million de francs. Plus isolé encore, Jacques de Vos (Paris) était le seul à proposer de l’Art déco, encore méconnu en Suisse. Il exposait notamment un rare ensemble composé d’une table et six chaises de Marcel Coard, gainées de parchemin, ainsi que plusieurs sculptures de Jean Lambert-Rucki. Satisfait par sa première participation, il se dit prêt à revenir l’an prochain. Sans doute sera-t-il plus entouré si, comme le souhaite Adriano Ribolzi, les arts appliqués du XXe siècle devaient prendre plus d’importance.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°71 du 20 novembre 1998, avec le titre suivant : Pour l’amour de l’antique

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