Le champ du signe

Saint-Étienne accueille le design

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 20 novembre 1998 - 519 mots

La 1ère Biennale internationale de Design de Saint-Étienne s’est déroulée du 7 au 15 novembre dans plusieurs sites de la ville, associant expositions, workshops, colloques et séminaires. Très éclectique, pour ne pas dire hétérogène, la manifestation se poursuit encore au Musée d’art moderne de la ville avec deux expositions consacrées à Prisunic et à l’histoire du siège au cours de notre siècle.

SAINT-ÉTIENNE - À la fin des années soixante et jusqu’au milieu des années soixante-dix, Prisunic s’est lancé dans l’aventure du design, publiant un catalogue qui offrait à bas prix du mobilier signé par quelques jeunes signatures de l’époque. Le Musée d’art moderne de Saint-Étienne, dans le cadre de la 1ère Biennale internationale de Design, a recréé un certain nombre d’intérieurs à partir du mobilier commercialisé par Prisunic : salle à manger de Terence Conran, lits de Marc Held, chaises de Gaë Aulenti... Les aménagements, quelque peu psychédéliques, sont agrémentés par une collection d’estampes également disponibles dans le catalogue et signées Alechinsky, Christo ou Wifredo Lam. Dans l’esprit Ikéa et Habitat, on navigue alors en pleine utopie de l’art et du design pour tous.

Sur le site principal de la Biennale, au Parc Expo, “design & entreprises” a décliné son pendant contemporain : cette partie a réuni soixante sociétés présentant quelques-uns de leurs produits confiés à des designers, de Knoll à Thomson, d’Alcatel à Téfal. La section principale de la Biennale occupait la majeure partie du hall A. Plus de trois mille objets et prototypes y ont été exposés sur des estrades en bois dans un certain chaos, mêlant travaux d’étudiants et de designers confirmés dans une hétérogénéité revendiquée. Les organisateurs ont annoncé avec fierté la présence de plus de sept cents créateurs venus de plus de cinquante pays. Le visiteur pouvait alors légitimement s’attendre à des surprises, à découvrir des projets farfelus, de folles créations. Après avoir tourné et tourné autour des présentoirs sans pouvoir saisir la logique qui avait conduit à la présentation, force était de constater que l’ensemble restait conventionnel, sage. On était loin de la débauche de créativité annoncée par Jacques Bonnaval, directeur de l’École des beaux-arts de Saint-Étienne et l’un des organisateurs de la Biennale. Ce dernier déclarait d’ailleurs, dans un entretien publié dans un supplément de Lyon Capital édité pour l’occasion : “(L’art contemporain) s’appuie sur des fondements intellectuels théoriques et ne concerne personne. Sauf les milieux professionnels, les critiques d’art, les universitaires qui font leur auto-apologie. [...] Seuls les discours le justifient. [...] Aujourd’hui pour continuer, l’art a un champ de récupération, c’est le design. Le design [...] pose mieux la question de l’art”. Un discours pour le moins étonnant de la part d’un directeur d’école d’art. Ses étudiants de la section design ont quant à eux organisé une “Bi-off” dans le hall C adjacent, dans une présentation particulièrement soignée, plus soignée même que la manifestation officielle. Un exemple à suivre.

1ère Biennale internationale DE Design 98, Saint-Étienne : PRISUNIC 1968-1976 et UNE HISTOIRE DU SIÈGE AU XXe siècle, jusqu’au 13 décembre, Musée d’art moderne, La Terrasse, Saint-Étienne, tél. 04 77 79 52 52, tlj 10h-18h. Catalogue, 392 p., 150 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°71 du 20 novembre 1998, avec le titre suivant : Le champ du signe

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