Monument

Journées du Patrimoine

Disette festive

À l’approche du rendez-vous automnal, les acteurs du secteur rappellent les aléas de la crise financière.

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 2 septembre 2008 - 715 mots

Placées sous l’égide du thème fédérateur de « Patrimoine et création », les Journées du Patrimoine 2008 devraient, les 20 et 21 septembre, se solder par une forte fréquentation. Mais elles ne sauraient masquer les tensions et la crise fnancière qui affectent le secteur.

Le Jardin Botaniquede la ville de Dijon%26copy; Jardin de sciences

Patrimoine et création : pour leur 25e édition, les traditionnelles « Journées du Patrimoine » sont placées sous l’égide d’un thème fédérateur, probablement choisi avec quelques arrières pensées. Puits sans fond des politiques culturelles, l’entretien du patrimoine se doit désormais d’être envisagé sous le prisme unique de l’attractivité. Or, comme l’ont déjà compris maintes collectivités locales, principaux bailleurs de fonds, celle-ci peut aussi passer par un mariage avec la création contemporaine. En apparence, l’ambiance sera donc festive dans la plupart des 15 000 sites ouverts à la visite pour fêter le quart de siècle de ces journées créées par Jack Lang en 1984 sous le nom de « Portes ouvertes dans les monuments historiques ». Avec une fréquentation annuelle oscillant entre 11 et 12 millions de visiteurs, leur succès ne s’est depuis jamais démenti. Présidence française de l’Union européenne oblige, l’édition sera également l’occasion de valoriser le label européen du patrimoine, lancé en 2007 par une quinzaine de pays de l’Union Européenne (UE), qui ont tous déjà importé, depuis 1999, le concept de Journées du Patrimoine. Destiné à faire connaître les lieux emblématiques de l’histoire européenne, ce label a fait l’objet d’une première concertation le 21 juillet à Versailles lors de la rencontre informelle des ministres de la Culture de l’UE.

Déclaration solennelle
Cette couleur internationale ne viendra toutefois pas faire oublier la persistance des tensions qui pèsent sur le secteur depuis 2003, et que les ministres successifs peinent décidément à apaiser. Début juillet, le G8 du patrimoine, qui réunit les principales associations représentatives du secteur, a, en effet, anticipé en rendant publique une déclaration solennelle. Celle-ci rappelait, en préambule, les engagements du président de la République pris lors de l’inauguration de la Cité de l’architecture et du patrimoine, en septembre 2007. « La sauvegarde du patrimoine suppose, vous le savez, des moyens importants et un effort constant, déclarait alors Nicolas Sarkozy. Je souhaite la rétablir comme un objectif important de notre politique culturelle. [...] Il ne sert à rien d’être si fier de notre patrimoine français et de continuer à mégoter pour l’entretenir. » Or, depuis un an, la situation n’a guère évolué. Au contraire, la possibilité d’une remise en cause du dispositif fiscal lié aux monuments historiques protégés a semé un vent de panique chez les propriétaires privés, toujours suspendus aux arbitrages budgétaires (lire le JdA n°284, 20 juin 2008). À l’instar du Sénat, qui a déjà alerté le gouvernement à plusieurs reprises, le G8 du patrimoine réclame notamment de parvenir au seuil de 400 millions d’euros de ressources annuelles pérennes, en recourant à une affectation nouvelle par le biais d’une loterie, sur le modèle britannique. Cette solution reprend les préconisations du sénateur Philippe Richert (UMP), réitérées récemment après que la ministre de la Culture a proposé, en janvier 2008, l’instauration d’une taxe sur les nuitées d’hôtels, vite retoquée par le gouvernement. Un prélèvement de seulement 1 % des recettes de la Française des Jeux générerait ainsi plus de 90 millions d’euros de ressources. Le G8 demande, par ailleurs, de faire appel à une contribution exceptionnelle de 500 millions d’euros prélevés sur le produit de la vente d’actifs publics, afin d’apurer les dettes, à l’exemple de l’initiative du gouvernement Villepin, en 2006, qui avait pourtant eu un résultat décevant pour le patrimoine monumental, la majeure partie de ces ressources ayant été affectées à l’achèvement des grands travaux culturels.
À quelques jours de la présentation du projet de loi de finances 2009, qui n’échappera pas à la rigueur, l’inquiétude risque donc de s’accroître. La plupart des ministères devrait voir leur enveloppe progresser de « 0 valeur », c’est-à-dire accuser une diminution hors inflation. À moins que Christine Albanel ne crée la surprise en annonçant le 9 septembre, lors de sa conférence de presse de lancement des Journées du Patrimoine, qu’elle a réussi à convaincre Éric Woerth, son collègue du budget, de concéder un effort en faveur du patrimoine ?

« Patrimoine et création »

Journées du patrimoine, dans toute la France, les 20 et 21 septembre, programme complet : www.journeesdupatrimoine.culture.fr

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°286 du 5 septembre 2008, avec le titre suivant : Disette festive

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