L’art sous ses plus beaux atours

Démocratie et enseignement à Tours

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 18 décembre 1998 - 741 mots

Le second Congrès interprofessionnel de l’art contemporain (Cipac), qui s’est tenu à Tours les 26 et 27 novembre sur le thème “L’art, une éducation à faire�?, a été marqué par des prises de positions claires face “aux pratiques antidémocratiques�?. La ministre de la Culture Catherine Trautmann, qui est intervenue au terme de la première journée de travaux, a précisé avec conviction les axes de sa politique en faveur des arts plastiques.

TOURS - Depuis le mois de mars et les élections régionales, il est peu de dire que le paysage politique a changé en France, et certains directeurs de Frac, dont les structures sont souvent financées à parité par l’État et les régions, se retrouvent aujourd’hui dans des positions particulièrement inconfortables. Même si l’ensemble de ces responsables a pour l’instant décidé de rester en poste, certains, comme en Languedoc-Roussillon ou en Rhône-Alpes, joignent dorénavant une lettre à toute demande de subvention, précisant que cette démarche n’implique pas une acceptation tacite des alliances conclues pour l’élection du président de région. Dans une lettre ouverte dévoilée lors du Congrès de Tours, l’Association nationale des directeurs de Frac (ANDF) a renouvelé son soutien à “ses membres afin de leur permettre de résister de la façon qu’ils ont choisie”. Après avoir changé ses statuts, l’ANDF a également précisé qu’elle “intentera des actions en justice chaque fois qu’elle le jugera utile et qu’elle se joindra à l’Observatoire sur les pratiques antidémocratiques, qui s’est constitué ce jour [le 26 novembre n.d.l.r.] dans le cadre du congrès”. La commission mixte “Pour une vigilance sur les pratiques antidémocratiques” avait auparavant tenté de “cerner les moyens de réaction et d’action au niveau juridique et politique” contre “les récentes attaques à l’encontre de la liberté d’expression des artistes et contre les structures de l’art contemporain  par différents partis politiques, dont le Front national”. Dans son discours, Catherine Trautmann a également réaffirmé “faire preuve d’une véritable vigilance démocratique pour dénoncer et combattre toutes les atteintes à la liberté d’expression et de création”.

La ministre a profité du Cipac pour présenter les grands axes de sa politique en faveur des arts plastiques et dévoiler les missions qu’elle a données au nouveau délégué aux Arts plastiques, Guy Amsellem : “le renforcement de la formation aux disciplines artistiques, un soutien plus affirmé à la création et aux structures de diffusion, et une modernisation de l’administration [la Dap n.d.l.r.] dont il a la charge”. Elle a aussi annoncé la création de Centres de formation d’artistes intervenants (CFAI), qui a bénéficié d’un accueil mitigé de la part des congressistes. Cette formation de deux ans, sanctionnée par un diplôme de médiation, permettra aux titulaires recrutés par les collectivités d’intervenir auprès des écoles maternelles et primaires. Catherine Trautmann a également précisé avoir signé des circulaires conjointement avec Claude Allègre et Ségolène Royal, qui “ont des effets directs sur l’enseignement des arts plastiques”. Enfin, dans un grand élan d’enthousiasme, la ministre a décidé que “la priorité pour les trois ans à venir [de son] département chargé des Affaires internationales et de la Délégation aux arts plastiques, sera la présence des artistes français à l’étranger”.

Trouver la formule idéale
Ce thème avait déjà été abordé, au cours de la journée, par une commission mixte qui avait notamment constaté “un déficit de la reconnaissance des artistes français à l’étranger”. D’autres proposaient, par exemple, la création de sites Internet communs aux professionnels, l’amélioration de la conservation préventive des œuvres des différentes collections, l’adoption d’un autre ton pour parler de l’art à la télévision, le renforcement de la sensibilisation à l’art contemporain ou, même, une définition de la critique d’art. Ces réunions ont ainsi permis aux professionnels de l’art contemporain de confronter leurs points de vue et leurs expériences, mais aussi de suivre l’évolution de questions déjà abordées au cours de la première édition de ces rencontres.

Pourtant, le Cipac ne semble pas encore avoir trouvé, au niveau de son organisation, la formule idéale. Soucieux de s’adresser également au grand public, et de bénéficier par-là même d’une certaine couverture médiatique, la manifestation est divisée en deux parties : le congrès proprement dit et un colloque. Pourtant, l’intérêt de ce dernier reste discutable. “Je suis venu pour vous dire que je n’étais pas là”, déclarait vendredi soir Jean-Luc Moulène au cours de sa “leçon d’artiste”. Vu le peu de monde qui restait encore à Tours, beaucoup semblent avoir fait l’économie d’une telle annonce. Une grève de la SNCF, il est vrai, avait démotivé plus d’un congressiste.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°73 du 18 décembre 1998, avec le titre suivant : L’art sous ses plus beaux atours

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