Tempête à Washington

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 18 décembre 1998 - 402 mots

Si aucune décision contraignante n’est sortie de la conférence de Washington consacrée aux restitutions de biens juifs volés pendant la guerre, les États présents, soumis à la pression des
États-Unis et du Congrès juif mondial, se sont engagés à accélérer les procédures. D’autre part, la Russie a esquissé un infléchissement de sa position sur les « trophées » de l’Armée rouge.

WASHINGTON - Après quatre jours de discussions parfois vives, la conférence de Washington, à laquelle participaient 44 États et 13 ONG, s’est soldée par l’adoption de onze principes “non contraignants”. Cette déclaration demande aux musées, gouvernements, collectionneurs et institutions de tout mettre en œuvre pour identifier l’art volé et retrouver “rapidement” les propriétaires légitimes. Elan Steinberg, directeur exécutif du Congrès juif mondial (CJM), a estimé que ce texte “pose les principes d’un mécanisme continu” et marque “un progrès très important, [...] inimaginable il y a deux ans”. Toutefois, plusieurs pays européens, dont la France et la Suisse, se sont émus de la possible incompatibilité de ces principes avec leurs législations respectives, et du droit d’intervention tous azimuts ainsi offert au CJM. La France, notamment, a dû subir ses attaques à propos des MNR. Tenant compte de ces réserves, le document précise le caractère “non contraignant” des principes et reconnaît que les pays ont “des systèmes judiciaires différents”. Désormais, “le monde de l’art, en ce qui concerne l’art pillé par les nazis, ne sera plus jamais le même”, a conclu le sous-secrétaire d’État américain Stuart Eizenstat, maître d’œuvre de cette conférence.

Si les dispositions adoptées devraient accélérer les procédures, nombre de problèmes restent en suspens. Une semaine avant le rendez-vous de Washington, Israël avait publié une liste d’États et d’entreprises accusés d’entraver l’accès à leurs archives sur le génocide des Juifs. S’y côtoient le Vatican, la France, le MI5, la République tchèque, la Pologne, mais surtout la Russie. Celle-ci a toutefois créé la surprise en présentant trois documents sur des œuvres volées à des Juifs autrichiens, établis par les nazis. En témoignant ainsi de sa volonté de coopérer à l’effort de restitution des biens spoliés, la Russie annonce peut-être un infléchissement de sa position sur les “trophées” de l’Armée rouge. En seraient désormais exclues les œuvres volées à des victimes de la politique raciale nazie. Au moment où la Russie est dans une position délicate vis-à-vis des organismes financiers internationaux, on veut croire que cet assouplissement n’est pas le fruit d’un calcul...

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°73 du 18 décembre 1998, avec le titre suivant : Tempête à Washington

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