Maîtres anciens d’exception

Christie’s a redécouvert un Vélasquez

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 22 janvier 1999 - 684 mots

Les auctioneers dépasseront-ils en janvier le record – plus de 53 millions de dollars – établi par Sotheby’s l’an passé au cours des ventes de tableaux anciens ? Cela semble peu probable. Christie’s mise sur un produit de 20 à 27 millions de dollars, alors que Sotheby’s en espère 28 à 37 millions. De belles surprises attendent également les collectionneurs, lors de la dispersion par Christie’s de la collection de dessins italiens constituée par la BNP Arts.

NEW YORK - Quatre catalogues chez Christie’s, trois chez Sotheby’s, les ventes de tableaux et dessins anciens de cette fin janvier se révèlent cette année encore particulièrement riches. Le 28 janvier, Sotheby’s présentera plusieurs Bruegel d’Enfer, dont le Triomphe de la mort, estimé 1-1,5 million de dollars (5,6-8,4 millions de francs), une des ses œuvres majeures exécutée en 1626. Ce grand format (116 x 167 cm) figure une armée de squelettes saisis en pleine action, des soldats de la mort semant la désolation. Le paysage est lunaire, le ciel couleur charbon. C’est une copie d’un tableau conservé au Prado à Madrid, peint en 1562 par Pieter Bruegel le Vieux.

Autre point fort de la vente, le Combat au jardin, une huile sur cuivre de Nicolas Poussin, aurait été commandé vers 1626 par le très influent cardinal Francesco Barberini, neveu du pape Urbain VIII, lorsque le peintre séjournait en Italie. Il décrit un épisode des Évangiles qui a pour cadre le jardin de Gethsémani : Jésus prie aux côtés de trois de ses disciples endormis, tandis que Judas apparaît en arrière-plan accompagné d’un groupe de soldats en armes. L’œuvre est estimée 3-4 millions de dollars (16,8-22,4 millions de francs). Cette vente fleuve de 534 lots comporte également une toile de Jean-Honoré Fragonard, le Pacha (1,2-1,6 million de dollars) et un Lorenzo Lotto, Saint Jérôme au désert (100-150 000 dollars).

Chez Christie’s, la vacation du 29 janvier inclut une vingtaine de maîtres espagnols. Un tableau est particulièrement attendu, Santa Rufina, patronne de Séville, aujourd’hui donné à Vélasquez après avoir été vendu en 1948 comme un Murillo et avoir disparu depuis. Il serait estimé plus de 3 millions de dollars (16 millions de francs). Autre toile phare, un Greco datant de 1605-1610, Saint François agenouillé en méditation. Quelques maîtres français figurent également dans la vente, tels Pierre-Hubert Subleyras avec un Portrait de jeune homme en costume hongrois (600-800 000 dollars), et Hubert Robert avec une Fantaisie égyptienne (350-450 000 dollars). “C’est le summum de l’art d’Hubert Robert, s’enthousiasme Bruno de Bayser. Il y a de la folie, une sorte de démesure dans cette façon de représenter les pyramides”. Les écoles hollandaises et flamandes sont notamment représentées par un Portrait d’homme de Frans Hals et une toile de Bruegel d’Enfer, Querelle de paysans, signée et datée de 1619 (300-500 000 dollars).

Vingt feuilles de Federico Zuccaro
Le 27 janvier, Sotheby’s proposera 245 dessins anciens, dont une feuille de Pieter Coecke van Aelst, le Sacrifice à Lystre (100-150 000 dollars), et un charmant dessin de Louis Léopold Boilly, la Peur enfantine (150-200 000 dollars) : une jeune femme élégamment vêtue d’une robe de taffetas serrant son enfant contre elle.

La dispersion de Christie’s, le 28 janvier, plus étoffée que celle de sa concurrente, regroupera sous le nom de “Cabinet italien” quarante-cinq lots reflétant la diversité des écoles italiennes du début du XVIe à la fin XVIIIe siècle. C’est l’un des ensembles de dessins les plus importants passés en vente publique depuis la collection Chatsworth, en 1984 et 1987. Constitué entre 1989 et 1991 par la filiale de la Banque nationale de Paris, BNP Arts, il comprend une série de vingt feuilles de Federico Zuccaro, – acquise 2,5 millions de dollars chez Sotheby’s à New York en janvier 1990 – qui retracent la vie de son frère Taddeo, estimée 2-3 millions de dollars (11,2-16,8 millions de francs), ainsi qu’un Canaletto, Grande place avec obélisque (250-350 000 dollars). Parmi les autres œuvres majeures de la vacation, figurent un dessin de Federico Barocci, la Madone du Peuple (1,9-2,5 millions de dollars) et un Portrait du prêtre Nicolas Trigault en costume chinois par Rubens (400-600 000 dollars).

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°75 du 22 janvier 1999, avec le titre suivant : Maîtres anciens d’exception

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