Une affaire à saisir

Le ministère italien de la défense met en vente un palais

Le Journal des Arts

Le 22 janvier 1999 - 470 mots

Après avoir été confiée à la surintendance de Modène et fait l’objet d’importants travaux de restauration, le Palais ducal de Sassuolo, l’un des principaux palais baroques d’Italie du Nord, a été mis en vente par le ministère de la Défense. La Surintendance, scandalisée, dénonce une décision illicite et incohérente.

SASSUOLO (de notre correspondante) - Une question posée depuis un demi-siècle reste pendante : celle de la “gestion” de l’un des monuments les plus représentatifs du Baroque en Italie septentrionale, le Palais ducal de Sassuolo, qui vient d’être mis en vente par le ministère de la Défense. En 1939, ce palais avait été placé sous son contrôle, et la tutelle en avait été confiée à l’Académie militaire de Modène, qui l’a conservé et préservé des dégradations jusqu’en 1979. À cette date, un décret du ministère des Biens culturels le reconnaît comme monument historique et l’inscrit aux Domaines immobiliers de l’État, dont la direction dépend du ministère des Finances.

Création d’un musée
En avril 1995, un nouveau décret raye l’immeuble des Domaines et, en décembre de la même année, le ministère des Biens culturels demande à celui des Finances que le bâtiment soit officiellement confié à la surintendance pour les Biens artistiques et culturels de Modène et Reggio Emilia, compétente territorialement, afin de transformer le palais en musée. L’administration des Domaines enregistre la remise formelle du Palais ducal de Sassuolo à la Surintendance en 1996.

Le problème enfin résolu, la surintendance de Modène entre en possession du palais. Coup de théâtre : quatorze jours seulement après l’acte officiel entérinant le changement de destination, un décret de la Présidence du Conseil l’inscrit sur la liste des immeubles relevant des Domaines et mis en vente au titre de la loi 662 de 1996, pour en tirer mille milliards de lires (3,38 milliards de francs).

Il est naturel qu’une telle décision suscite des polémiques à n’en plus finir. “Le Palais ducal, proteste énergiquement la surintendante de Modène, Jadranka Bentini, n’est ni un phare, ni une île, ni une caserne, mais le palais baroque le plus prestigieux du nord de l’Italie. Sa vente serait illicite, puisque la loi 127 du 15 mai 1997 prévoit expressément l’inaliénabilité de monuments de ce type ; à moins que l’État ne veuille s’acheter à lui-même un bien qu’il possède déjà !”

Par ailleurs, au cours des dix dernières années, le Palais ducal a fait l’objet d’importantes restaurations, pour un coût total de dix milliards de lires (33,8 millions de francs) ; deux milliards supplémentaires sont prévus, ainsi que d’autres financements provenant de lois spéciales. Depuis la fin des travaux de restauration, il est devenu un musée et le siège de manifestations culturelles importantes, dont la dernière en date était une exposition de dessins du Louvre. Au cours du seul mois de septembre, le palais a reçu plus de vingt mille visiteurs.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°75 du 22 janvier 1999, avec le titre suivant : Une affaire à saisir

Tous les articles dans Patrimoine

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque