Jeux de mutation

À Milan, les artistes s’inspirent de la science

Le Journal des Arts

Le 22 janvier 1999 - 373 mots

Francesca Alfano Miglietti met constamment l’accent, dans la revue Virus qu’elle a créée et dirige depuis 1993, sur les influences croisées des différents modes d’expression actuels. Elle vient d’organiser au Pavillon d’art contemporain, à Milan, l’exposition « Rouge vif », qui décline les thèmes de la mutation, de l’hybridation, des manipulations génétiques, de la chirurgie esthétique, des relations entre nature et technologie, et des usages et influences des mass media sur notre rapport au corps .

MILAN - Chacun à leur manière, de nombreux artistes s’inspirent des recherches scientifiques pour développer leurs propres réflexions et introduire de nouvelles formes visuelles. Ils s’éloignent ainsi des sources socio-historiques du passé – qu’ils ont anticipé pendant des siècles – pour s’intéresser davantage à la science et aux technologies, qui ont bien souvent dépassé les prévisions les plus optimistes tout en créant un imaginaire plus surprenant encore que ce que l’art a réussi à construire en parallèle. Les artistes de l’exposition, tels Louise Bourgeois, Jan Fabre, Thomas Grünfeld, Yasumasa Morimura, Orlan, Pierre et Gilles, Andreas Serrano, Cindy Sherman, Jana Sterback ou Joel-Peter Witkin, mènent des recherches centrées sur le corps en tant que mesure d’appartenance à la réalité, comme l’avait déjà montré l’exposition “Post-human” du Castello di Rivoli en 1992. Au cours des années soixante-dix, les maîtres du Body Art prônaient le corps nu et outrageant en tant qu’instrument symbolique, dans ses rites sacrificiels, d’évocation des horreurs du passé et de magie alchimique et liturgique. Les années quatre-vingt-dix sont celles du corps mutant selon l’esthétique définie par les canons de la gymnastique et des “beauty farms”, par le lifting et le piercing, par le tatouage et la mode. Certains créateurs, comme Sterlac, se sont même aventurés sur le terrain de véritables implants technologiques. De même, la littérature et le cinéma de science-fiction imposent de nouvelles règles, à l’image des romans de Philip K. Dick ou de James Ballard, dont le réalisateur David Cronenberg a tiré le film Crash, ou, plus récemment, du film d’Andrew Niccol qui imagine, dans la cité de Gattaca, une société eugéniste où tout document d’identité exige des individus de continuelles analyses sanguines.

ROUGE VIF

Jusqu’au 21 mars, Pavillon d’art contemporain, via Palestro 14, Milan, tél. 39 2 78 33 30, tlj sauf lundi 9h30-18h30.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°75 du 22 janvier 1999, avec le titre suivant : Jeux de mutation

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