Art ancien

Pièces de musée

Cabiati, Rüdiger et Toderi à Ajaccio

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 8 janvier 1999 - 491 mots

Comptant jusqu’à 17 626 objets, dont 16 000 peintures, la collection du cardinal Joseph Fesch (1763-1839) a été l’une des plus importantes de son époque. Le Musée Fesch d’Ajaccio conserve aujourd’hui en son sein un millier d’œuvres issues de ce fonds, principalement des tableaux italiens datant du XVIe au XVIIIe siècle. Soucieux de s’ouvrir à la création contemporaine, l’institution accueille cet hiver trois jeunes artistes italiens : Vincenzo Cabiati, Bernhard Rüdiger et Grazia Toderi.

AJACCIO - Il n’est jamais évident, pour un musée disposant d’une collection historique de premier plan, de s’aventurer sur les pentes savonneuses de l’art contemporain. Les confrontations entre anciens et modernes restent souvent stériles pour les uns et les autres. L’idée ajaccienne d’inviter en premier lieu des artistes italiens est, en ce sens, bonne. Les créateurs de ce pays semblent en effet davantage imprégnés par leur histoire de l’art nationale, quand ils n’y font pas référence, au moins implicitement. L’exposition du Musée Fesch va même jusqu’à emprunter son titre à l’une des œuvres majeures de Raphaël, les fameuses Stanze du Vatican dont l’institution corse possède trois copies dans ses réserves. Les œuvres de Vincenzo Cabiati, Bernhard Rüdiger et Grazia Toderi sont justement répartis dans trois “Stanze”, c’est-à-dire trois “pièces”.

L’exposition est organisée par deux commissaires invités, Giovanni Careri, professeur à l’École des hautes études en sciences sociales de Paris, et Sergio Risaliti, le nouveau directeur du Centre d’art du Palais des Papesses à Sienne (lire le JdA n° 73, 18 décembre 1998). Loin des “snapshots” et de “l’art quotidien”, Careri et Risaliti proposent une exposition à la fois utopique et poétique, qui réunit “des œuvres situées dans l’histoire de l’art”, comme l’écrit Giovanni Careri dans le catalogue qui accompagne la manifestation. Le propos se situe ici à contre-courant d’une tendance actuelle à la désacralisation de l’œuvre d’art. Il privilégie en revanche la production sur la reproduction, et revendique le caractère démiurgique de l’activité artistique. Retrouver dans une exposition Cabiati et Rüdiger n’est pas une surprise, même si le premier est davantage connu en France puisqu’il vit à Paris. Les deux artistes ont par exemple déjà montré leurs travaux ensemble à Milan. La présence de Grazia Toderi est plus inattendue, son univers sidéral semblant a priori étranger aux deux autres. Pourtant, l’alchimie fonctionne, notamment grâce à Bernhard Rüdiger qui expose dans la salle centrale et joue un peu ici le rôle du passeur avec le Chevalier et sa mort. Vincenzo Cabiati propose quant à lui une étrange partie de ping-pong dont les balles font référence à l’architecture de Ledoux. Tous trois se retrouvent enfin dans un couloir adjacent où a été rassemblé un ensemble de leurs dessins, qui nouent ici un dialogue plus étroit encore, même s’il s’agit, en fin de compte, d’”exercices de distanciation”.

STANZE, EXERCICES DE DISTANCIATION

Jusqu’au 10 février, Musée Fesch, 50 rue Cardinal-Fesch, 20000 Ajaccio, tél. 04 95 21 48 17, tlj sauf dimanche et lundi 9h15-12h15 et 14h15-18h15. Catalogue, 40 p., 86 F.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°74 du 8 janvier 1999, avec le titre suivant : Pièces de musée

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