Puech exposé

Une sélection de la célèbre donation

Le Journal des Arts

Le 8 janvier 1999 - 721 mots

En 1996, dix ans après lui avoir offert quelque 600 peintures, sculptures et objets d’art, l’antiquaire et collectionneur Marcel Puech a renouvelé sa générosité envers le Musée Calvet avec une donation de mille dessins du XVe au XIXe siècle, signés Lotto, Bassano, Véronèse, Le Guerchin, Simon Vouet ou Le Lorrain. L’établissement avignonnais et le Musée du Luxembourg à Paris présentent respectivement une sélection française et italienne de ce fonds fabuleux. Malheureusement, l’hommage parisien laisse le visiteur sur sa faim : le choix des œuvres est contestable et l’accrochage pour le moins déroutant.

PARIS - Assis sur un rocher, un satyre nous tourne le dos. Ses cheveux sont suggérés par de légères vagues, tout comme les frondaisons des arbres. En quelques traits aux hachures serrées et estompées avec art, Benedetto Luti parvient à donner une atmosphère de douce mélancolie à cette scène arcadienne. Mais que le lecteur ne salive pas trop, ce dessin offert par Marcel Puech ne figure pas dans l’exposition que le Musée du Luxembourg consacre à la partie italienne de la donation.

Qu’une sélection implique des choix semble une évidence. Cependant, sur la centaine d’œuvres retenues, certaines semblent nettement moins intéressantes que ce Benedetto Luti ou d’autres pièces également absentes des cimaises, comme la Figure allégorique de Salviati – pourtant chérie du collectionneur –, le Martyre de sainte Ursule de Mattia Preti, une Déposition d’un artiste du cercle d’Alessandro Allori, ou encore un beau Paysage classique de Crescenzio Onofri.

Tintoret, maître du Cinétisme
Certes, plusieurs chefs-d’œuvre sont au rendez-vous. À commencer par un Tintoret époustouflant, un Homme en train de frapper, très bien campé, vu en contre-plongée, et dont la décomposition du mouvement des bras et des jambes évoque un effet cinétique tout à fait extraordinaire. Exceptionnelle aussi cette Assomption où le corps de la Vierge se dissout dans un lavis virtuose, qui permet de découvrir le très rare et peu connu Pietro Faccini. De même, un Paysage avec montagnes rocheuses et fleuve, construit par petites masses fragmentées, révèle le talent de Lodewijk Toeput dit Pozzoserrato, un peintre d’origine flamande dont l’activité en Italie reste encore peu documentée.

D’autres pièces, moins surprenantes mais de très belle qualité, sont également exposées : une Tête d’homme de profil de Beccafumi, une Étude d’apôtre de Lotto, un visage féminin de Daniele da Volterra, le Passage de la mer Rouge par Taddeo Zuccaro, une Tête de faune de Véronèse, une Étude de composition de Palma le Jeune, une très mouvementée Vierge à l’Enfant avec des saints de Daniele Crespi, une superbe Charité de l’Algarde, deux beaux Pier Francesco Mola et deux Luca Giordano, ainsi qu’une monumentale Femme à genoux d’Étienne Parrocel.

Des œuvres mineures
Mais parmi les grands maîtres, beaucoup sont représentés par des œuvres mineures, telle la minuscule esquisse de paysage de Salvator Rosa, l’étude de mains du Baroche, l’étude de drapés du Guerchin, ou encore les dessins de décors de Ludovico et Agostino Carracci.  De tout cela, le visiteur retire une impression de juxtaposition de pièces inégales, renforcée par l’absence d’ensembles forts et un parcours déroutant qu’aucun panneau explicatif ne vient éclaircir. Sur un même mur se succèdent ainsi une Prédication de saint Paul par Domenico Piola – un Génois de la seconde moitié du XVIIe siècle –, une Divinité fluviale d’Antonio Balestra – peintre académique véronais du début du XVIIIe siècle –, un buste en bronze du XVIe siècle et diverses études des Carrache.

Espérons que l’exposition présentée simultanément au Musée Calvet offre une progression plus compréhensible. Parmi les 58 dessins français sélectionnés, plusieurs retiennent l’attention : l’une des premières feuilles de Watteau, une superbe étude de femme par Eustache Le Sueur, un vigoureux Jésus chassant les marchands du Temple de Natoire, et des travaux signés Simon Vouet, Le Lorrain, Charles de La Fosse, François Boucher ou encore Jean-Baptiste Huet. Enfin, le double catalogue, somptueux et documenté, permet d’admirer, par écoles, l’ensemble de la donation Marcel Puech au Musée Calvet.

DESSINS ITALIENS DE LA DONATION PUECH AU MUSÉE CALVET, jusqu’au 14 février, Musée du Luxembourg, 19 rue Vaugirard, 75006 Paris, tél. 01 42 34 25 94, tlj sauf lundi 11h-18h, jeudi 11h-20h. DESSINS FRANÇAIS DE LA DONATION PUECH AU MUSÉE CALVET, jusqu’au 22 février, Musée Calvet, 65 rue Joseph-Vernet, 84000 Avignon, tél. 04 90 86 33 84, tlj sauf mardi 10h-13h et 14h-18h. Catalogue de la donation, 2 vol. , 500 F.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°74 du 8 janvier 1999, avec le titre suivant : Puech exposé

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