British Museum : des réformes avant la rénovation

...mais sa direction va être partagée entre deux responsables

Par Martin Bailey · Le Journal des Arts

Le 5 février 1999 - 769 mots

Le British Museum vient de lancer une série d’entretiens d’embauche pour sélectionner son futur directeur général. Pour la première fois en près de deux cent cinquante ans, la gestion de l’institution sera partagée entre deux personnes, l’une chargée de la conservation, l’autre des questions financières. L’élu, dont on n’exige aucune expérience des musées, devra travailler en collaboration avec le directeur actuel, le conservateur Robert Anderson.

LONDRES (de notre correspondant) - Le British Museum a publié une annonce de recrutement qui suscite un certain émoi dans le monde des musées britanniques. La plus grande institution du Royaume-Uni recherche en effet son directeur général, qui cohabitera avec l’actuel directeur et aura “le dernier mot pour tout ce qui concerne les questions de budget et de dépenses”. Il est demandé au candidat d’“avoir un sens aigu des affaires et une bonne habitude de la finance car il devra concrétiser le potentiel commercial du British Museum”. En revanche, aucune expérience des musées n’est déclarée indispensable.

Si certains établissements publics français, comme Versailles ou le Centre Georges Pompidou, connaissent un partage des tâches de ce genre entre un directeur-conservateur et un président ou un directeur chargé des questions administratives, la situation est inédite en Grande-Bretagne. La décision du conseil d’administration du British Museum crée un précédent et risque d’avoir un impact sur d’autres musées dans le pays.

“Actuellement, la direction du musée ne peut être assurée par un seul homme, tempère Graham Greene, président du conseil d’administration. “Nous avons plusieurs projets gigantesques – la Great Court, le Centre d’études (voir ci-contre) et la recherche de financements – pour lesquels deux personnes de haut niveau sont indispensables. Nous avons adopté une solution un peu inhabituelle pour répondre à une situation particulière”.

En fait, la décision a été prise à l’occasion du renouvellement dans ses fonctions du Dr Robert Anderson, début janvier. Bien que personne n’ait remis en cause son action de conservateur – ni le remarquable travail effectué par lui-même et son équipe pour rassembler des fonds pour le projet de la Great Court –, certains se demandaient, dans les allées du pouvoir, s’il était suffisamment bon gestionnaire pour conduire le musée jusqu’au troisième millénaire. Selon la rumeur, Graham Greene s’est fermement opposé à tous ceux qui suggéraient de remplacer le Dr Anderson. Le conseil d’administration a donc décidé de le reconduire, tout en créant, parallèlement, un poste de directeur général.

Des responsabilités amputées
Certes, Robert Anderson aura davantage de temps à consacrer à son rôle de conservateur, mais ses responsabilités s’en trouveront amputées. Ce sera désormais le directeur général qui décidera de la manière de dépenser l’argent, ce qui lui donnera évidemment une autorité considérable sur les questions concernant le musée et sa politique. D’après une lecture minutieuse de la description des deux postes, le directeur général jouira d’un pouvoir supérieur à celui de son collègue, étant chargé de la planification budgétaire et de la comptabilité, du contrôle des actifs, ainsi que du contrôle des dépenses et des résultats.

En outre, certaines responsabilités seront partagées dans les domaines de l’action pédagogique – le directeur général s’assurera que les programmes définis par le directeur sont exécutés efficacement et dans les délais –, des investissements, de l’accès aux collections, du marketing et de la communication avec le public.

Échange de bons procédés
Selon notre enquête, même si la création de ce poste a été décidée par le conseil d’administration, l’idée lui en aurait été fortement suggérée par le ministère de la Culture. La structure de gestion du British Museum y est depuis longtemps jugée insuffisante pour une institution aussi importante et complexe, à la veille d’entreprendre le plus grand projet qu’elle ait jamais réalisé en un siècle et demi. Il est vrai que le British Museum reçoit davantage de subventions que n’importe quel autre musée britannique (32,9 millions de livres sterling, environ 303 millions de francs, pour l’année 1998-99). Pourtant, sa situation financière est actuellement si difficile que toute réduction de son budget contraindrait à imposer un droit d’entrée, ce que refuse catégoriquement le conseil d’administration.

Le calendrier reflète assez bien les transactions qui ont eu lieu. La création d’un poste de directeur général a été annoncée le 8 décembre et aussitôt saluée par Alan Howarth, secrétaire d’État chargé des Arts, comme “extrêmement raisonnable”. Six jours plus tard, le ministre Chris Smith publiait les budgets détaillés des musées dans le cadre de son compte rendu des dépenses (“Spending Review”). Quelque 34,7 millions de livres sont alloués au British Museum pour 1999-2000, soit une augmentation de près de 6 %. L’établissement a répondu “qu’il accueillait avec gratitude la somme accordée pour l’année prochaine, après six ans de coupes effectives”...

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°76 du 5 février 1999, avec le titre suivant : ...mais sa direction va être partagée entre deux responsables

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