Souvenirs ottomans

L’art d’Orient en vedette à Paris

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 28 mai 1999 - 783 mots

Après le succès de la vente d’art d’Orient organisée en septembre 1998 par les études Wapler et De Ricqlès, le cabinet Soustiel, très sollicité, a réuni des pièces issues de quelques grandes collections (Ambroise Baudry, Odon de Toulouse-Lautrec) qu’il proposera le 7 juin, à Drouot Montaigne, en association avec les mêmes commissaires-priseurs. Les 30 juin et 1er juillet, Claude Boisgirard et Anne-Marie Kevorkian disperseront à Drouot Richelieu des objets d’art de l’Islam et d’importantes pièces d’archéologie.

PARIS. “Le bouton de rose s’est ouvert, la prairie est là, riante et gaie. Elle offre ses touffes, la jacinthe a grandi en dansant [...] Du ciel, des anges ont apporté la bonne nouvelle sur terre. En ce monde est venue avec gloire Aïché Sultane.” Rédigé à Istanbul en 1887, ce poème calligraphié en belle écriture (3-4 000 francs) célèbre la naissance de la princesse Aïché, sixième fille du sultan Abdulhamid II (1876-1909), qui suivit son père en prison à Salonique, avant de gagner la France où elle vécut vingt-neuf ans. Ce sont ses souvenirs et ceux de sa mère, Muchfika Cadine Efendi, qui seront dispersés par Me Wapler, après la vente des collections du petit-fils du sultan, en juillet 1996 puis en avril 1998. Cet ensemble comprend quelques peintures : un portrait du sultan Abdulhamid II représenté en buste, de trois quarts et coiffé du fez (20-25 000 francs), ou un autre du sultan Abdulhamid Ier (1839-1861), vêtu d’une grande cape mauve (15-20 000 francs). Des photographies, comme celles prises lors de la visite d’amitié de l’empereur Guillaume II au sultan Mehmet V à Istanbul – l’arrivée du train, la revue des troupes, le passage à Galata... (3-4 000 francs) – et des livres complètent la première partie. La seconde réunit environ 75 lots issus de l’ancienne collection de l’architecte Ambroise Baudry (1839-1906), qui vécut en Égypte de 1871 à 1898 et auquel on doit notamment le montage de la statue du sultan Mehemet Ali sur un socle signé par L.V. Louvet. Parmi les pièces les plus importantes figurent quatre vantaux de porte en bois de pin provenant de la mosquée de l’émir Âltunbûqâ al-Mâridânî, édifiée au XIVe siècle dans le quartier Darb al-Âhmar, au Caire (150-250 000 francs la paire). “Ces quatre vantaux appartiennent à un groupe de volets dispersés au Caire à la suite des travaux d’embellissement de la ville entrepris après 1863, explique Jean Soustiel. Le Musée du Louvre a acquis au Caire, en 1898, deux autres volets de sanctuaire provenant de cette mosquée.” À noter aussi une table de jeu d’échecs en bois incrusté d’ivoire et d’étain, Égypte ottomane, XVe siècle (80-100 000 francs), un coffre à jeu d’échecs et tric-trac en bois à décor de marqueterie muni de deux poignées (Égypte mamelouke, XIV-XVe siècle), des armes, des décorations ottomanes et des photographies. La troisième partie de la vacation regroupe des objets qui décoraient le petit salon oriental de La Haichois, la demeure seigneuriale du comte Odon de Toulouse-Lautrec (1842-1937). Cette dispersion succède à celle du 25 septembre 1998, rassemblant également des objets du petit salon oriental, qui avait enregistré quelques beaux résultats : un plateau mamelouk en laiton incrusté du XIII-XIVe siècle avait été adjugé plus de 4 millions de francs. À côté d’un panneau aux polygones de bois sculpté assemblés en étoile (80-120 000 francs),pouvant être rapprochés de polygones conservés au Metropolitan Museum of Art à New York, figure un coffre-cabinet en marqueterie à abattant composé de plusieurs essences de bois, dont le palissandre et l’ébène (80-120 000 francs). La dernière partie propose des tableaux orientalistes, parmi lesquels une huile d’Adrien Dauzats, Les environs de Damas, (150-200 000 francs), ainsi que des cartes et documents, telle cette carte du Bosphore dressée à la plume et rehaussée d’aquarelle, vers 1780 (70-80 000 francs).

Un buffle mésopotamien en bronze
Les 30 juin et 1er juillet, Claude Boisgirard, assisté d’Anne-Marie Kevorkian, dispersera des pièces d’archéologie, verreries, céramiques, livres et tableaux orientalistes. La partie consacrée à l’archéologie réunira des objets de Mésopotamie, d’Anatolie, de Syrie, du Luristan et d’Égypte : un buffle mésopotamien en bronze du IIème millénaire av. J.-C. (350 000 francs), un disque  achéménide à décor de lions, VIe-Ve siècle av. J.-C. (400 000 francs), une mosaïque byzantine du Ve siècle ap. J.-C. (150 000 francs). La deuxième partie, l’art de l’Islam, proposera des verreries du VIIe au XIIe siècle (entre 5 000 et 40 000 francs), des céramiques du XIIe au XVIIe siècle, dont un rare ensemble de carreaux syriens du XVe siècle (30 000 francs pièce), et quelques livres, notamment une section de Coran andalou de la fin du XIIe siècle (35 000 francs). La vente s’achèvera avec la dispersion d’un ensemble de tableaux orientalistes de Dinet, Rousseau, Washington et Manago.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°84 du 28 mai 1999, avec le titre suivant : Souvenirs ottomans

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque