Pour son 30e anniversaire, Bâle réalise son rêve américain

Participation renforcée des marchands new-yorkais à la “meilleure foire du monde�?

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 28 mai 1999 - 905 mots

La foire d’art contemporain de Bâle, pour son trentième anniversaire, devrait être fidèle à sa réputation. Privilégiant, comme le soulignent à l’envi ses organisateurs, « la qualité sur la quantité », elle réunira du 16 au 21 juin quelque deux cent soixante galeries d’Europe, d’Asie, du Japon, des États-Unis et d’Australie, sélectionnées parmi sept cents candidats.

Bâle connaît, une fois tous les deux ans, une effervescence supplémentaire due au vernissage de la Biennale de Venise, qui précède cette année le salon d’une semaine. Les artistes présentés dans les pavillons des Giardini et dans les autres expositions italiennes disposent ainsi d’un carrefour idéal pour bénéficier, sur le marché, de la dynamique vénitienne. Les collectionneurs sont également plus nombreux encore à traverser l’Atlantique pour parcourir ces rendez-vous européens du début de l’été, avant de repartir aux États-Unis avec des œuvres des artistes en vue en Europe. Cette année, les galeries new-yorkaises ont bien compris cet enjeu en venant massivement à Bâle, qui les accueille à bras ouverts. Les marchands de la “Grosse Pomme” disposent de trente-sept stands, sans compter neuf autres galeries originaires du reste du pays, contre trente-trois l’an dernier. Parmi les nouveaux exposants, figurent Barbara Gladstone, Paula Cooper, Luhring Augustine, Tony Shafrazy, mais aussi David Zwirner, Pat Hearn, Jack Tilton, Bonakar Jancou, Alexander & Bonin, I-20 et Anton Kern. D’autres galeries sont aussi présentes pour la première fois en Suisse, venant de Scandinavie – Atle Gerhardsen (Oslo) –, d’Amérique du Sud – Luisa Strina (São Paulo), Der Brücke (Buenos Aires) –, ou d’Asie - Art Beatus (Hong Kong), Shimada (Tokyo).

La participation française s’élève cette année à vingt-sept galeries. Notre pays est particulièrement bien représenté dans le secteur “Édition”, avec un peu moins d’un tiers des exposants. L’Atelier Franck Bordas, Item Éditions, la galerie Lelong, Picaron, la galerie Catherine Putman-SDOPM, Atelier Eric Seydoux, Sollertis Éditions et Michael Woolworth Publications feront le voyage. Même si certaines bonnes galeries françaises ne participent pas, pour diverses raisons, à Art 30’99, les habitués de la manifestation sont au rendez-vous. Fidèle aux trente éditions, la galerie Lahumière présentera sept œuvres d’Auguste Herbin balayant plus de cinquante ans de création. Autre galerie présente dès 1970 sur les bords du Rhin, Denise René expose cette année une importante sculpture de Hans Arp, Colonne de Muse (1965), le plus grand marbre qu’il ait réalisé. La galerie Durand-Dessert proposera des peintures de Djamel Tatah, et Evelyne Canus celles du jeune Cédric Teisseire. Parmi les ténors de la scène parisienne, on retiendra également la Galerie de France, 1900-2000, Marwan Hoss, Chantal Crousel, Ghislaine Hussenot, Yvon Lambert, Daniel Templon, Air de Paris et Jennifer Flay. Le secteur réservé à la photographie accueillera les galeries Michèle Chomette et Françoise Paviot.

Créé l’an dernier, “Art Sculpture” s’annonce exceptionnel, avec trente-deux espaces réservés à de grandes pièces et installations pour autant de galeries. Le secteur reste fidèle aux artistes “classiques” ou reconnus, tels Alexander Calder, Richard Long, Yves Klein, Louise Bourgeois, Carl Andre ou Daniel Buren. Mais la sélection 1999 s’est quelque peu rajeunie avec des créateurs comme Huang Yong Ping, Wang Du, Angela Bulloch, Thomas Locher, Carsten Höller ou Fabrice Gigy.
Le secteur “Statements” accueille vingt-six expositions de très jeunes artistes de onze pays, dont le Suisse Olaf Breuning (Arsfutura, Zurich), le Suédois Henrik Hakansson (Brändström, Stockholm), le Norvégien Bjarne Melgaard (Riis, Oslo), le Japonais Takashi Murakami (Blum & Poe, Santa Monica) ou l’Allemand Lothar Hempel (Anton Kern, New York). Deux galeries parisiennes y ont un stand : Almine Rech présente l’Allemand Johannes Kahrs, et Gabrielle Maubrie le Belge Frédéric Lefever.
Malheureusement, aucun artiste français n’expose dans ce secteur. Pourtant, des projets de niveau international ont été déposés par des galeries de notre pays, avant d’être rejetés par le comité de sélection. Il semble que de nombreux galeristes étrangers n’apprécient pas que les marchands français soient aidés financièrement par l’État. La Direction des Affaires internationales du ministère de la Culture, la Délégation aux Arts plastiques et l’Association française d’action artistique (ministère des Affaires étrangères) ont ainsi réparti 800 000 francs, en 1998, entre les vingt-huit galeries hexagonales qui avaient consacré la moitié de leur stand à des créations de nos compatriotes.

Les jeunes artistes français arrivent en revanche en force à la petite “Liste”, qui se tient en même temps que l’”Art”. Cette foire est d’ailleurs un tremplin pour accéder à la trentenaire, puisque cette dernière accueille Cassey Kaplan (New York), Nicolai Wallner (Copenhague) et Mot & van den Boogard (Belgique) qui avaient participé à la “Liste” l’an dernier. Pour cette édition, qui compte trente-six stands, la galerie parisienne Chez Valentin (Paris) a demandé à Mathieu Mercier de concevoir un stand où se déploie un ensemble de meubles gigognes, du porte-crayon à la chaise et à la table. Emmanuel Perrotin expose notamment des photographies de Jean-Pierre Khazem, et la galerie Anton Weller accueille le projet “Une vie de rêve” avec des créations de Bernard Lallemand, Dana Wyse et Christelle Familari. Enfin, contre toute attente, Glassbox dispose également d’un stand à la “Liste”. Cette structure associative, qui ne fonctionne pas vraiment comme une galerie, présente tout de même des œuvres de Stefan Nikolaev, Sandie Tourle et Anna Adah. Durant la foire, le Musée Migros de Zurich animera un centre de gravure, avec Rirkrit Tiravanija, Urs Fischer, Nic Hess et Lori Hersberger. Dans le même temps, Kaskadenkondensator proposera des forums sur l’art contemporain, des performances, de la musique, des surprises, “pour se relaxer un verre de vin à la main”.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°84 du 28 mai 1999, avec le titre suivant : Pour son 30e anniversaire, Bâle réalise son rêve américain

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