Fauvisme

A la mode magyare

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 2 juillet 2008 - 402 mots

Le Musée d’art moderne de Céret lève le voile sur un pan méconnu de l’histoire de l’art européen.

CÉRET (PYRÉNÉES-ORIENTALES) - Méandres de l’Histoire obligent, les grands conflits européens du XXe siècle ont parfois eu raison des artistes, stigmatisant certains mouvements dits « dégénérés » ou les passant tout bonnement à la trappe. Il en fut ainsi de l’effervescence que connurent la peinture hongroise et son avant-garde « fauve » avant que n’éclate la Première Guerre mondiale. Grâce aux recherches initiées par Krisztina Passuth, professeure émérite à l’université Eötvös-Loránd à Budapest, ce courant pictural avait fait l’objet, en 2006, d’une publication scientifique, accompagnée d’une exposition à la Galerie nationale hongroise. C’est cette dernière que reprend aujourd’hui le Musée d’art moderne de Céret, avant le Musée départemental Matisse du Cateau-Cambrésis et le Musée des beaux-arts de Dijon. Si la rétrospective de Budapest avait orchestré une confrontation entre les œuvres magyares et une trentaine de toiles fauves françaises, l’exposition de Céret fait la part belle aux tableaux hongrois de la période 1904-1914, pour lesquels l’étiquette « fauve » est loin d’être usurpée.
Alors que l’Empire austro-hongrois ronronne sous le règne conservateur de François-Joseph, les jeunes artistes de Budapest s’échappent pour Paris et ses académies libres de peinture dont ils mettent les enseignements à profit de retour au pays. Couleurs audacieuses de Matisse et Derain, mais aussi du Blaue Reiter – Budapest subit également l’influence munichoise –, lignes synthétiques des symbolistes et plasticisme de Cézanne : le visiteur assiste à un véritable condensé de peinture européenne. Mais comme le démontre l’exposition, ni Béla Czóbel, ni Géza Bornemisza ou Sándor Ziffer ne s’essayent à la copie ou à la réinterprétation. Les jaunes, rouges et verts s’inspirent du folklore local, les paysages appartiennent aux contrées magyares, les portraits empruntent à l’introspection freudienne. Quant aux natures mortes, ou aux nus callipyges, loin d’être prétextes à des explorations abstraites, ils sont fermement ancrés dans un espace réaliste. Si ces artistes ont su intégrer avec talent les notions avant-gardistes, leurs œuvres n’ont pas pour autant été l’occasion de découvertes radicales, l’Histoire ne leur en ayant sans doute pas laissé le temps. L’Empire austro-hongrois ne devait pas se remettre de l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand à Sarajevo en 1914.

FAUVES HONGROIS 1904-1914

Jusqu’au 12 octobre, Musée d’art moderne, 8, bd Maréchal-Joffre, 66403 Céret, tél. 04 68 87 27 76, www.musee-ceret.com, tlj 10h-19h. Catalogue, éditions Biro, 185 p., 190 ill., 34 euros, ISBN 2-901298-57-5.

FAUVES HONGROIS

- Itinérance : Musée départemental Matisse, Cateau-Cambrésis, du 25 octobre au 22 février 2009 ; Musée des beaux-arts de Dijon, du 13 mars 2009 au 15 juin 2009 - Unique à Céret : le Musée d’art moderne de Céret présente une sélection de tableaux que József Rippl-Rónai a réalisés à Banuyls, alors qu’il résidait chez le sculpteur Aristide Maillol.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°285 du 4 juillet 2008, avec le titre suivant : A la mode magyare

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