L’art public en régions

La politique de commandes publiques reste dynamique

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 22 octobre 1999 - 837 mots

Relancée, après 1983, par la création d’un fonds spécial au sein du Centre national des arts plastiques (Délégation aux arts plastiques), la commande publique reste l’un des axes majeurs de la politique de diffusion de l’art contemporain en France. Le ministère y a d’ailleurs affecté, en 1998, une enveloppe de 18 millions de francs. Petit tour d’horizon des dernières créations dans le domaine.

PARIS - En arrivant à la tête de la Délégation aux arts plastiques, Guy Amsellem a souhaité élargir le champ de la commande publique, dont l’archétype reste la statue sur la place, une conception qui remonte tout de même à plusieurs siècles, voire millénaires. Fait nouveau, les artistes sont invités aujourd’hui à intervenir à l’orée des villes, dans des zones non bâties, et ne sont plus cantonnés dans les centres historiques. De plus, l’État n’investit plus seulement dans des œuvres pérennes, mais soutient également des réalisations temporaires, comme l’installation-projection de Beat Streuli en 1998, en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Les arts plastiques n’ont plus l’exclusivité, puisque sont aussi concernés le design, le graphisme, le mobilier urbain et d’intérieur ou même les nouvelles technologies. L’Internet est par exemple un nouveau champ ouvert aux artistes, à l’image du projet “Entrée Libre”.

En marge de ces nouvelles orientations, de nombreux projets plus traditionnels ont été inaugurés ces six derniers mois ou sont en cours de réalisation. Ainsi, à Perpignan, Shirley Jaffe, une artiste américaine vivant en France, a conçu des vitraux pour la chapelle Saint-Jean-l’Évangéliste, dite de la Funéraria. Initié en 1995, cet ensemble vient s’inscrire dans un programme de restauration du bâtiment gothique. Une autre technique traditionnelle est à l’honneur en Limousin, avec la réalisation par l’Anglais Glenn Baxter de cartons pour une tapisserie d’Aubusson : douze dessins sur le thème de Richard Cœur de Lion, mort au château de Chalus-Chabrol, vont être tissés sous forme de bannières. Plus au nord, l’Allemand Andreas Brandolini a créé quarante bornes lumineuses sur le pont de l’Europe, qui enjambe le Rhin entre Strasbourg et Kehl ; chacune d’entre elles contient un texte rédigé dans une des vingt-neuf langues différentes par quarante écrivains, historiens, artistes, cinéastes et musiciens. Toujours à Strasbourg, trois objets de Gaetano Pesce ont été installés dans le parc de sculptures contemporaines de Pourtalès : un moulage en bronze du fauteuil UP5-6 de 1969, un arbuste planté sur un support très haut, en lattes de bois cerclées, et une maquette de maison taillée dans un bouquet d’ifs.

À Nice, Ben est récemment intervenu dans les locaux de la Faculté de médecine. Il a notamment inscrit des textes sur les sols et les murs du hall d’entrée et créé une fresque de 5 x 3,5 m en mosaïque numérique. Jean Bazaine a lui aussi réalisé une mosaïque sur la façade est de l’Espace François-Mitterrand de Saint-Dié des Vosges. Cette œuvre de 80 m2, constituée de 60 000 tesselles d’émaux de Venise, représente un oiseau rose abstrait qui se détache sur des nuages rouges. Dans un autre style, Alain Séchas a conçu pour le parvis du Safran, à Amiens, un centre culturel pluridisciplinaire, un personnage à quatre pieds et trois têtes de chat en résine de polyester haut de 4 mètres, même si, selon l’artiste, “nous n’avons pas l’impression d’un monument, mais davantage d’un personnage à échelle humaine”.

Cinq commandes à Montpellier
D’autres œuvres viennent d’être dévoilées : ainsi, le 15 octobre, le Jardin Sévigné imaginé par Françoise Vergier à proximité du village de Grignan, en Rhône-Alpes. Cette commande s’est notamment inscrite dans le cadre du tricentenaire de la mort de la marquise de Sévigné, dont le château s’élève encore dans la commune. À Nancy, une sculpture en verre de Piotr Kowalski sera inaugurée le 26 octobre à l’École nationale supérieure d’art. Cette pièce, Passionnément, a été faite à partir de l’enregistrement de la voix du poète Gherasim Luca. Enfin, des projets sont en cours d’élaboration dans le cadre de la construction de la première ligne de tramway de l’agglomération montpelliéraine, qui devrait entrer en service en septembre 2000. Les designers Garouste et Bonetti vont développer une décoration intérieure des rames, avec des vols d’hirondelles argent sur des fonds bleus. Cinq commandes sont associées à ce projet. À la station “Terminus-Mosson”, Chen Zhen réalisera une calotte formée de soixante-dix chaises en fonte d’aluminium et épousant les formes de celles prêtées par des habitants du quartier. Tandis qu’Alain Jacquet proposera un Hommage à Confucius à l’Université des Sciences et des Lettres, Allan Mc Collum dévoilera, sur l’esplanade du Corum, cinq reproductions de statues détériorées se trouvant dans le parc du château Bonnier de la Mosson. Dans la rue piétonne Maguelone, Sarkis installera trente-six sièges, références à autant de merveilles du monde, et, à Port Marianne, Ludger Gerdes construira une arène à partir de poteaux métalliques.

D’autres projet sont en cours ailleurs, mais tous partagent un financement croisé, des fonds versés localement venant compléter les dotations de la Délégation aux arts plastiques. Ce tour d’horizon permet en tout cas de réaffirmer l’important engagement des différentes régions françaises dans la promotion de la création contemporaine.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°91 du 22 octobre 1999, avec le titre suivant : L’art public en régions

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