La rénovation du Musée russe doit s’achever en 2008

Mais la guerre en Tchéchénie pourrait freiner les subventions

Le Journal des Arts

Le 3 décembre 1999 - 816 mots

Pour les Russes, le musée, qui a fêté son centième anniversaire en mars 1998, est la pierre angulaire de l’identité nationale. Ses 380 000 objets constituent la collection d’art russe la plus complète au monde : bijoux anciens en or, icônes, sculptures, monnaies et médailles, peinture réaliste du XIXe siècle et grands noms de l’avant-garde russe. La qualité et la rapidité des travaux de rénovation dépendent du financement de l’État : lorsque la reconstruction sera achevée, en 2008, l’investissement total représentera 5,8 milliards de roubles (environ 1,4 milliard de francs), mais la guerre en Tchéchénie pourrait freiner les subventions promises.

SAINT-PETERSBOURG - Tous ceux qui ont visité le Musée russe avant 1995 se souviennent sûrement du sous-sol crasseux qui servait d’entrée. Depuis, les quatre palais du musée font l’objet d’importants travaux de rénovation, pour un coût total de près de 900 millions de francs. Déjà, l’ancienne entrée, disparue en même temps que le communisme soviétique, a fait place à un hall propre et moderne conçu pour le plus grand confort du visiteur.

Pourtant, la tâche s’annonce rude pour la rénovation des différents palais du musée, dont certains n’ont été restaurés qu’une seule fois au cours du siècle, et il ne sera pas aisé de rendre à l’intérieur des bâtiments leur grandeur passée. Les derniers grands travaux de réhabilitation du palais Mikhailovsky, bâtiment principal du Musée russe, ont eu lieu il y a tout juste cent ans. Selon l’architecte Irina Teterina, qui dirige le projet, le plus difficile sera de doter les lieux d’une infrastructure moderne ; et il ne s’agit pas de communication numérique ni de centre informatique high-tech, mais simplement de l’installation d’un réseau électrique adéquat et de conduites d’eau et de chauffage qui ne risquent pas de fuir ou d’éclater. Il faut également refaire la toiture, changer les fenêtres et le système d’éclairage, restaurer les salles d’exposition et aménager une nouvelle entrée dans l’aile nord du musée donnant sur le parc Mikhailovsky.

Vladimir Gusev, qui a dirigé le Musée russe pendant onze ans, en a doublé la surface, entrepris des travaux de reconstruction des palais et enrichi la collection de nouvelles œuvres. L’institution a su intelligemment exploiter la célébration de son centenaire afin d’obtenir l’accord du gouvernement pour des acquisitions extraordinaires : les palais Stroganov, de Marbre et Mikhailovsky.

À première vue, le palais de Marbre, construit par Catherine II la Grande au cours du dernier quart du XVIIIe siècle pour son amant Orlov, semble en assez bon état de conservation, alors qu’en fait, sa façade menace à tout moment de s’effondrer : à la fin des années quatre-vingt, ses plaques de marbre ont été restaurées avec du marbre italien qui résiste mal au climat très rude du nord de la Russie et est rapidement devenu cassant. Comme le signale l’architecte, l’affaire est “grave” ; les restaurateurs sont toujours à la recherche de solutions permettant de consolider la façade. À l’intérieur, ils commencent à redécouvrir les peintures murales, dont certaines sont dorées à la feuille, qui avaient été recouvertes par les Soviets à l’époque où le palais était le Musée central de Lénine (il l’est resté jusqu’en 1991). “Le plus gros problème concernant les travaux intérieurs est que nous ne savons pas toujours quelle période restaurer, indique Irina Teterina. Le palais a eu plusieurs propriétaires et l’on trouve donc différentes couches relatives à chacun d’entre eux, certaines baroques, d’autres néoclassiques”.

De 1995 à 1998, le gouvernement fédéral a alloué 450 millions de roubles (quelque 375 millions de francs si l’on se base sur le taux de change de l’époque) pour la seule reconstruction des bâtiments, mais 40 % seulement de la somme ont été versés. Les dons privés sont négligeables : ils représentent moins de 5,5 millions de francs pour les deux dernières années confondues. Mais avec la célébration du centenaire, le gouvernement a finalement reconnu la nécessité de restaurer le Musée russe. “Depuis que nous avons fêté le centième anniversaire du musée, l’État nous accorde davantage de fonds, ce qui nous permet d’avancer les travaux”, observe Irina Teterina.

En 1999, les dépenses du musée se sont élevées à plus de 85 millions de roubles (20,5 millions de francs) et Natalya Denisova, directeur général du Musée russe en charge des finances, précise qu’il faudra y ajouter 62 millions de roubles (15 millions de francs) d’ici à la fin de l’année. Pour l’an 2000, le budget alloué à la reconstruction a été fixé à 200 millions de roubles (48 millions de francs). Selon le plan financier prévu sur dix ans, lorsque les travaux de reconstruction seront achevés, en 2008, l’investissement total se montera à 5,8 milliards de roubles (environ 1,4 milliard de francs), un chiffre calculé sur la base du taux de change actuel et qui sera réajusté en fonction de l’inflation au cours des prochaines années. Toutefois, fait-elle remarquer, avec la guerre en Tchétchénie, le gouvernement pourrait ne pas accorder ce qu’il a promis.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°94 du 3 décembre 1999, avec le titre suivant : La rénovation du Musée russe doit s’achever en 2008

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