Les derniers Romains

Par Julie Portier · Le Journal des Arts

Le 4 juin 2008 - 390 mots

Après Sagalassos, cité oubliée, un documentaire plusieurs fois primé dans les festivals à sa sortie en 2004, Philippe Axell signe un deuxième film, Les Derniers Romains, qui met cette découverte archéologique de premier plan à la portée du plus grand nombre.

En Turquie, à la fin des années 1980, l’archéologue Marc Waelkens découvre sous les décombres d’un tremblement de terre les ruines inviolées d’une cité antique, s’offrant, tel un puzzle, à sa reconstitution. Sagalassos, désertée au VIIe siècle, était le secret bien gardé des montagnes du Taurus, en Anatolie ; depuis vingt ans, près de deux cents ouvriers et archéologues mettent au jour les splendeurs et décadences de son histoire.
Épargnées par la chute de l’Empire romain au Ve siècle, sous la pression des invasions barbares, les colonies d’Asie Mineure ne cessent de briller dans le faste et l’opulence, tandis que le reste de l’Europe entre dans le Moyen Âge. Sagalassos est à ce jour le plus riche témoin de cette période charnière, l’Antiquité tardive. Parangon de la cité romaine, s’y dressent plusieurs temples copieusement décorés, des thermes aux mosaïques intactes, une bibliothèque, un théâtre de 8 000 places et même un stade olympique, alors que sa population ne devait pas dépasser 5 000 habitants. La démesure de ces architectures luxueuses porte les noms des élites bâtisseuses gravés dans la pierre, comme la première page d’une saga familiale que se plaisent à imaginer les archéologues. Mais la visite guidée de la cité radieuse, à grand renfort d’images de synthèse dans ce film, laisse trop rapidement place à une enquête sur les causes de son abandon. Le destin de la cité, qui essuie en moins d’un siècle perte d’influence, bouleversement climatique, sécheresse, pandémie et séismes n’était-il pas digne d’une tragédie grecque ? C’est plutôt le genre du film catastrophe que mime poussivement le commentaire, d’une voix venue d’outre-tombe sur fond de « violonades ». En effet, cet épisode de « L’aventure humaine » reste malheureusement fidèle au mauvais goût de l’émission, qui met son point d’honneur à proposer d’inutiles reconstitutions en costumes. La chaîne ne pourrait-elle pas tenter de sensibiliser le fan-club de Bruce Willis aux passions de l’archéologie sans renoncer à l’exigence qui caractérise ses programmes ?

« L’aventure humaine », Les Derniers Romains, réal. Philippe Axell, diffusé sur Arte le samedi 7 juin à 21 heures (durée 50 min).

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°283 du 6 juin 2008, avec le titre suivant : Les derniers Romains

Tous les articles dans Médias

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque