Écouen

Médecine parallèle

Par Julie Portier · Le Journal des Arts

Le 24 avril 2008 - 534 mots

Le Musée national de la Renaissance fait le point sur l’histoire de la médecine au XVIe siècle.

ÉCOUEN - Le Musée national de la Renaissance présente l’exposition « Ars Medicina », une histoire de la médecine au XVIe siècle qui devrait attirer les visiteurs au château d’Écouen. En effet, ce bijou d’architecture de la première Renaissance française « a moins de succès que les autres châteaux de la région, comme son voisin Chantilly », confie son directeur, Thierry Crépin-Leblond, qui affiche un programme d’expositions grand public, alors que le musée expérimente la gratuité. L’exposition se donne pour tâche de transmettre au plus grand nombre les récentes découvertes historiques sur la médecine à l’époque moderne, thème qui connaît un regain d’intérêt chez les spécialistes. Mais le parcours orchestré par Sophie Daynes-Diallo, responsable de la documentation au musée, ne distille pas les connaissances à dose homéopathique. La commissaire a manié la notion de vulgarisation avec des gants pour réussir une exposition à la fois instructive et plaisante, fidèle à la doctrine de Thierry Crépin-Leblond : « être clair mais pas ennuyeux ». « Ars Medicina » donne autant à lire qu’à voir à travers une sélection d’objets et de livres rares accompagnés par des panneaux qui renseignent sur le contexte d’émergence de la médecine moderne. Au XVIe siècle, l’ébranlement du cosmos médiéval par la théorie copernicienne, et la remise en question du rapport à Dieu par la Réforme sont propices à une révolution dans le domaine médical. La pratique de la dissection remet peu à peu en question la relecture des traités antiques, réconciliant le savoir doctoral avec le travail « manuel » des chirurgiens qui, à l’image d’Ambroise Paré, gravissent la hiérarchie du corps médical. La mise en regard des ustensiles et des manuels de médecine dans les vitrines de l’exposition exprime cette nouvelle complémentarité de la science et de la technique en même temps qu’elle montre de manière didactique la méthode de l’historien : la consultation des planches illustrées a permis de retrouver la fonction de plusieurs objets.
« Pourquoi ne pas voir ces objets comme des œuvres d’art ? », suggère le conservateur du musée au sujet de ces trépans, scies d’amputation, tire-balle et autres bistouris exposés dans le décor intact du château d’Écouen. En effet, l’histoire de la médecine et l’histoire de l’art se croisent dans cette exposition, sur les vases d’apothicaires ou sur les volutes en fer forgé qui ornent ces instruments de torture aux yeux de nos contemporains. Des pièces exceptionnelles réjouissent par leurs qualités plastiques comme le petit mannequin en ivoire dit « de la maternité » ou les illustrations de l’artiste vénitien Francesco Salviati dans le recueil offert en 1542 par Guido Guidi à François Ier. De cette façon, l’exposition rappelle que le grand renouveau des arts à la Renaissance s’inscrit dans le même élan humaniste qui entraîna le progrès médical. Les conséquences lointaines d’une discipline sur l’autre se mesurent au regard des planches anatomiques qui illustrent les manuels universitaires.

ARS MEDICINA, MÉDECINE ET SAVOIR AU XVIe SIÈCLE

Jusqu’au 7 juillet, Musée national de la Renaissance, Château d’Écouen, 95440 Écouen, tél. 01 34 38 38 50, tlj sauf mardi 9h30-12h45 et 14h-17h45. Catalogue, éd. RMN, 7 euros, ISBN 978-2-7118-571-4.

ARS MEDICINA

- Commissaire de l’exposition : Sophie Daynes-Diallo, chargée d’études documentaires au Musée de la Renaissance
- Nombre de salles : 3
- Nombre de pièces exposées : 84

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°280 du 25 avril 2008, avec le titre suivant : Médecine parallèle

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