Un demi-succès

155,5 millions de francs pour Karl Lagerfeld

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 12 mai 2000 - 570 mots

L’intense campagne médiatique qui a précédé la dispersion de la collection Lagerfeld n’a pas suffi à transformer l’événement en triomphe. Le grand couturier et Christie’s, l’organisateur de la vente qui s’est tenue les 28 et 29 avril à Monaco, ont dû se contenter d’un demi-succès, avec un produit total de 155 millions de francs correspondant à la fourchette moyenne de l’estimation.

MONACO - Les grands antiquaires parisiens étaient tous là pour assister à la vente et profiter d’une phase d’atonie afin d’emporter quelques belles pièces. Un peu amers toutefois de n’avoir pas été cités dans les catalogues parmi les prestigieuses provenances. Plus de 96 % des 389 lots proposés, estimés 120 à 180 millions de francs, ont trouvé preneur, générant un produit total de 155,8 millions de francs. La fête aurait été évidemment encore plus éclatante si les pièces avaient été présentées puis vendues dans l’hôtel particulier de Karl Lagerfeld. Mais les retards successifs pris par la réforme ne l’ont pas permis. La collection a donc été exposée, à la mi-mars, dans les locaux parisiens de Christie’s, trop exigus pour un pareil ensemble, et trop longtemps avant la vente. Certaines pièces comme les sculptures et l’argenterie ont pu, en outre, pâtir d’avoir été montrées comme des éléments décoratifs anodins et de ne pas figurer dans un catalogue spécifique, mais au milieu d’un ensemble consacré aux arts décoratifs. Résultat ? Le groupe d’époque Louis XV d’Étienne-Maurice Falconet en bronze ciselé, allégorie de la Source représentant deux jeunes femmes, estimé 3-5 millions de francs, n’a pas trouvé preneur. Une sculpture représentant l’allégorie de la Géométrie est, elle, partie à 282 000 francs, contre une estimation de 500-800 000 francs.

Quelques estimations et prix de réserve élevés – 6-10 millions de francs pour trois vases formant garniture de cheminée d’époque Louis XVI, finalement ravalés à 4,8 millions de francs – ont pu décourager d’éventuels acquéreurs. Les lits à baldaquin qu’affectionnait le grand couturier n’ont pas non plus suscité l’enthousiasme. Ainsi, le  lit d’époque Louis XV, recouvert d’une garniture de velours de soie gaufré Louis Delanoy, a été adjugé 352 500 francs alors qu’il était estimé 500-800 000 francs. Mais les sièges se sont remarquablement vendus, comme un fauteuil à châssis d’époque Louis XV attribué à Jean Boucault, estimé 1-1,5 million de francs, qui a été acquis à 2,7 millions, et une suite de six fauteuils en cabriolet à châssis d’époque Louis XVI par Louis Delanois à 3,3 millions de francs. Quelques autres bonnes surprises ont dû réjouir le collectionneur et les organisateurs de la vente, tels les 8 millions de francs obtenus par un vase d’époque Louis XV, les 7,7 millions enregistrés par un guéridon d’époque Louis XVI estampillé de Martin Carlin, ou encore les 6,1 millions de francs qui sont allés à un tapis de la Savonnerie d’époque Louis XV. L’État français a préempté trois lots, dont une suite de tapisseries de la Manufacture des Gobelins du XVIIIe siècle et le buste de l’architecte Wailly par “l’atelier d’Augustin Pajou”, selon le catalogue de Christie’s. Ce buste, qui avait été vendu comme étant de Pajou 800 000 francs par Nicolas Kugel, a été adjugé 220 000 francs à l’antiquaire, avant d’être préempté pour le Musée des beaux-arts de Lille. “J’ai proposé à Karl Lagerfeld de le racheter au prix où je lui avais vendu quand il m’a fait savoir que Christie’s avait décidé de l’attribuer à l’atelier d’Augustin Pajou”, a précisé Nicolas Kugel.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°105 du 12 mai 2000, avec le titre suivant : Un demi-succès

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