Un printemps africain

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 9 juin 2000 - 588 mots

L’art primitif se porte bien, et Paris demeure une place majeure dans cette spécialité, comme en témoigne la vente organisée le 28 mai par l’étude Ricqlès avec le concours d’Alain de Monbrison. Celle-ci a dépassé les 10 millions de francs et obtenu plusieurs fortes enchères pour des masques Punu et Baoulé notamment, dont un s’est envolé à 1 million de francs. La vente d’art africain de la collection Baudoin de Grunne, qui s’est tenue le 19 mai à New York, s’est, elle, soldée par un produit total de 2,5 millions de dollars (18 millions de francs) pour cent lots.

PARIS - C’est la plus forte enchère de la vente. Exécutée en 1907 par Pablo Picasso, cette œuvre qui comporte au recto des études préparatoires pour les Demoiselles d’Avignon représentant des reliquaires Kota, et au verso un portrait d’André Salmon, a été préemptée à 1,7 million de francs par le Musée Picasso. Elle a figuré dans plusieurs expositions importantes : “Primitivism in XXth century art, affinity of the tribal and the modern art” au Museum of Modern Art de New York, et “Picasso et le portrait” au MoMA, puis au Grand Palais en 1996. Elle est importante car elle témoigne de l’influence qu’a eue l’art primitif dans l’évolution de l’artiste vers le cubisme. Les autres vedettes de la vente étaient deux masques Punu qui ont largement dépassé leurs estimations. Ainsi de cette pièce du Sud Gabon en bois de fromager, représentant un visage féminin recouvert d’une coiffure constituée d’une coque centrale formée de deux tresses, qui s’est envolée à 1 million de francs, et de cet autre masque Punu, d’une grande simplicité stylistique et d’une profonde intériorité, adjugé 400 000 francs, contre une estimation haute à 250 000 francs. Beau résultat aussi pour un masque Baoulé à la patine noire brillante, représentant un visage d’homme pensif, orné de scarifications signifiées par des clous de tapissier. Estimé 600 000 francs, il a été adjugé 820 000 francs. La partie arts d’Océanie et d’Asie du Sud-Est était, cette année, moins étoffée et moins riche que lors des ventes organisées au printemps 1998 et 1999. On remarquait pourtant une planche Gope de Nouvelle-Guinée (152 cm) ornée de pigments de couleur ocre et noire qui a été adjugée 90 000 francs, et un crâne Asmat Irian Jaya de Nouvelle-Guinée lui aussi, parti à 45 000 francs. La plupart de la cinquantaine d’objets précolombiens, qui ne comprenait aucune pièce majeure, sont partis pour quelques milliers de francs. Les deux plus fortes enchères ont salué la dispersion d’un poncho du Pérou, orné de plumes multicolores, de motifs d’oiseaux stylisés et de motifs ornementaux en forme de vague (50 000 francs) et d’une statuette anthropomorphe en céramique brun-rouge représentant un homme torse nu, aux pectoraux soulignés, assis les jambes écartées (40 000 francs).

2,5 millions de dollars pour Baudoin de Grunne
Quelques jours plus tôt, Sotheby’s dispersait l’importante collection d’art africain du comte Baudoin de Grunne. La plupart de ces pièces ont été acquises entre 1965 et 1980 auprès de grands collectionneurs et marchands comme Pierre Dartevelle, Philippe Guimiot ou Jacques Kerchache. Plus de 75 % des lots ont été adjugés pour un produit total de 2,5 millions de dollars (18 millions de francs). Les pièces les plus importantes ont été emportées par des marchands européens. Parmi elles, un personnage Songe debout, représenté les mains reposant sur un abdomen protubérant, et un élégant masque Baoulé à la patine brune (162 250 dollars chacun, soit 1,1 million de francs), ainsi qu’une sculpture Kusu-Hemba partie à 132 500 dollars.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°107 du 9 juin 2000, avec le titre suivant : Un printemps africain

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