Finoglio tenté par le spectaculaire

Actif entre Naples et les Pouilles, ce peintre du Seicento bénéficie de sa première rétrospective

Le Journal des Arts

Le 9 juin 2000 - 697 mots

Peintre méconnu de la première moitié du Seicento, Paolo Domenico Finoglio n’en a pas moins participé à quelques chantiers importants comme celui de la chartreuse de San Martino, à Naples. L’essentiel de son activité s’est déroulée dans la capitale campanienne et les Pouilles, avant de s’achever à Conversano, où lui est offerte sa première exposition monographique. Divisée entre le château de la ville et les églises Santi Cosma e Damiano et San Benedetto, elle permet de resituer ce contemporain de Ribera et de Stanzione dans le cadre du panorama bariolé de la peinture méridionale de l’époque.

CONVERSANO (de notre correspondante) - La Circoncision, peinte en 1626 pour la salle capitulaire de la chartreuse de San Martino, à Naples, marque les débuts officiels de Paolo Domenico Finoglio. En revanche, de nombreuses interrogations demeurent sur son activité antérieure, et même sur son lieu de naissance. S’il en va de même de sa formation, le caravagisme de Battistello Caracciolo, manifeste dans les fresques de la chapelle de San Martino peintes vers 1632, a exercé un ascendant indéniable sur le jeune peintre. Le Baptême de saint Celse, exécuté vers 1635 pour la cathédrale de Pouzzoles, en apporte le témoignage dans cette exposition. Des œuvres à sujet religieux et destinées à des églises montrent l’évolution de son langage figuratif, des expérimentations d’un maniérisme tardif, entre Ippolito Borghese et Belisario Corenzio, à l’assimilation de la leçon de Ribera, Stanzione, Francesco Guarino, Artemisia Gentileschi et Aniello Falcone. Les tableaux présentés à Conversano proviennent d’églises campaniennes – comme le Mariage de la Vierge de Santa Maria di Piedigrotta, la Madone avec sainte Thérèse de Santa Maria di Donnaromita, à Naples, ou l’Immaculée, l’Annonciation et la Mariée des Cantiques Sacrés de l’église de l’Annunciata d’Airola – et d’églises des Pouilles – tels les Histoires d’Abraham de l’église du Rosaire de Legge, la Madone et saint Gaétan de l’église du Carmine de Grottaglie, Saint André et sainte Catherine de la cathédrale d’Ugento.

Le goût de Finoglio le porte vers une mise en scène spectaculaire, soulignée par l’utilisation d’une gamme très variée d’accords chromatiques. Celle-ci ressort surtout dans les œuvres à sujet profane, demandées à Finoglio par de riches commanditaires privés, auxquels il fournissait également ses services en tant que copiste et marchand d’art. Au sein de cette rétrospective, le cycle des dix grandes toiles représentant les Scènes de la Jérusalem libérée occupe une place centrale. Il est le fruit de sa rencontre avec Giangirolamo II Acquaviva, le plus puissant vassal du vice-roi, comte de Conversano, issu d’une famille d’humanistes, d’écrivains, de poètes et de mécènes. Selon les choix précis du commanditaire, Finoglio privilégie dans le poème du Tasse les épisodes épiques, chevaleresques et amoureux pour célébrer, dans la splendeur des soies et des velours, les origines de la famille qui remontent aux croisés normands, et ses plus récentes gloires, attestées par la mort héroïque de Giulio Antonio lors de la croisade contre les descendants d’Agramant. Grâce à son mécène, il compose également le décor à fresque de la voûte de Santi Cosma e Damiano. À quelques pas de l’église, Finoglio a réalisé deux retables d’autel pour le château. Après la disgrâce et l’arrestation de son protecteur en 1643, le peintre reprend contact avec la capitale en quête de nouvelles commandes, mais ne quitte pas définitivement les Pouilles, où il conserve des liens d’intérêt et familiaux. Il continue de travailler à Conversano au service de la supérieure du monastère de San Benedetto, une sœur du comte, qui lui commande le grand retable avec Saint Benoît et saint Sabin. Le tableau votif destiné à l’église des Parlotti di Monopoli, avec la Vierge et les saints Éloi et Triphon, où apparaissent les tons chauds de la peinture flamande et génoise, date de cette époque.

À travers la figure de Finoglio s’esquissent les rapports entre Naples et les Pouilles, dont Francesco Guarino, Cesare et Francesco Fracanzano, Luca Giordano ou Francesco Solimena sont les protagonistes. De plus, l’étude de son œuvre attire l’attention sur la carrière d’artistes locaux, personnalités mineures mais intéressantes, comme le Maître de Bovino, Carlo Rosa ou Francesco Altobello.

- PAOLO DOMENICO FINOGLIO (1590-1646), jusqu’au 30 septembre, château de Conversano, églises Santi Cosma e Damiano et San Benedetto, Conversano.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°107 du 9 juin 2000, avec le titre suivant : Finoglio tenté par le spectaculaire

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